Publié le 12 juin 2017
— Mais pourquoi la victime ne s’est-elle pas débattue ?
C’est une question qui revient régulièrement quand on parle de viol ou de façon plus large d’agression sexuelle.
Il est, pour certaines personnes, difficile d’envisager que la victime puisse être « passive », surtout qu’on imagine qu’il est facile de blesser un agresseur laissant accès à ses parties intimes.
C’est pourtant une réaction courante, et incontrôlable. Une récente étude s’est penchée sur le sujet.
Les victimes de viol qui restent immobiles
À Stockholm, une chercheuse a enquêté auprès de 298 femmes ayant un contacté un centre d’aide pour les victimes de viol dans un délai de 30 jours après l’agression dont elles ont été victimes.
189 d’entre elles ont été à nouveau étudiées six mois plus tard.
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Les résultats de cette étude mettent en lumière le nombre de victimes qui ne se sont pas débattues. La chercheuse parle de thanatose : c’est le terme qu’on utilise quand un animal « fait le mort » en cas de danger.
« 70% ont témoigné avoir ressenti une thanatose, 48% à un point extrême. »
En cas d’agression, il est courant de se sentir incapable de bouger. C’est aussi ce qu’on appelle la sidération, déjà abordée sur madmoiZelle.
« Parfois, la violence induit dans le cerveau un réflexe de protection qui « sort » la victime de son corps, l’immobilise, la coupe totalement de la réalité et l’empêche de réagir […]
La sidération psychique est un phénomène tout à fait réel, observable notamment sur des IRM, et qui se retrouve chez les victimes ou témoins de violence. »
La double peine d’une victime de viol qui ne se débat pas
En plus de subir une agression sexuelle, les victimes ayant expérimenté une thanatose risquent de pâtir davantage sur le long terme. Auprès des 189 femmes suivies pendant 6 mois :
« 38% ont développé des troubles de stress post-traumatiques et 22% une sévère dépression.
Celles qui ont expérimenté une thanatose présentaient des risques élevés de développer des troubles de stress post-traumatique et des dépressions. »
La psychiatre et psychotraumatologue Muriel Salmona, interviewée dans le cadre d’un focus sur la sidération en cas d’agression sexuelle, avait également évoqué les conséquences de ce phénomène.
« La sidération psychique empêche d’intégrer correctement les informations perçues par notre système nerveux, de les digérer.
L’agression peut rester perpétuellement vivace, à fleur de peau, et un rien peut ramener la victime à un état de traumatisme lié à cette violence non assimilée. »
Quand une victime de viol prend la parole, il est important de la croire et de l’accompagner. Sans lui faire payer une réaction incontrôlée, qui la ronge déjà peut-être de l’intérieur.
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