J’ai passé une bonne partie de mon adolescence enveloppée dans des vêtements noirs, à ruminer en silence contre cette espèce étrange qui semblait envahir la Terre (ou plutôt la cour du collège) : les fameuses « pouffes ». Maintenant, avec du recul, j’ai essayé de comprendre d’où venait ce mépris, en listant tout ce pour quoi je les haïssais et en imaginant ce que j’aurais maintenant à répondre à mon satané « moi « de 13 ans.
£3s pOuf’S èycr[iii]v kom sààh
Semant la terreur sur les statuts MSN avec leur terrible tr[iii]ple [iii], remplaçant les lettres par les chiffres et se jouant de toute forme de grammaire… lire un Skyblog de pouffe s’avérait être un véritable défi.
Et puis j’ai refait un tour sur mon Skyblog (que je ne divulguerai pas ici pour épargner ce qu’il me reste d’amour-propre), et parmi les phrases en franglais et les citations tragiques que je pensais très philosophiques, j’ai trouvé un article, intitulé The sky cry :
« Quand j£ vOis tOmb£r la plui£ j£ m£ s£ns mOins s£ul£ d£ savOir qu£ l£ ci£l pl£ur£ aussi… »
Voilà, voilà.
Les pouffes écoutent du rap et du r’n’b
Mêêêêêêêêl.
Déchéance des temps modernes, ramassis de « niktamère », autant dire que je ne considérais cette musique comme le summum de l’horreur et du mauvais goût. Depuis j’ai découvert Syrano, Eminem et Macklemore (grâce à madmoiZelle). Et bizarrement, en écoutant les paroles de certains morceaux de métal (quand il y a des paroles) ou en étudiant les tablatures de chansons de rock, je me suis rendue compte que ce n’était pas forcément si recherché ou profond que ça.
Les pouffes ne peuvent pas vivre sans leur bestahh forever
Je cherche, mais je vois même pas comment j’ai pu considérer ça comme un défaut, donc je vais pas épiloguer sur cette excuse tellement elle est débile.
Les pouffes s’habillent mal
Pince blanche placée au hasard sur des cheveux colorés blond paille, slim taille basse, débardeur moulant et ballerine, je n’avais à l’époque jamais songé que les critères de la mode n’étaient pas universels et que non, les « pouffes » ne s’habillaient pas mal, mais selon leurs goûts. J’ai d’ailleurs depuis tout essayé, sauf les cheveux blonds.
Autre tendance phare du collège : le sacro-saint jogging à trois bandes.
Les pouffes ne se préoccupent que du regard des autres
Si les pouffes prennent tellement soin de leur apparence et passent une heure dans leur salle de bain chaque matin pour se maquiller, c’est bien parce qu’elles sont incapables de vivre sans se soucier de ce que les autres pensent d’elles.
Comme si c’était pas le cas de tous les adolescents de la terre. Même si ça ne me prenait que 2 minutes, j’ai quand même passé 6 ans à ne pas sortir sans entourer mes yeux d’épaisses lignes de crayon noir (qui finissaient irrémédiablement par me faire ressembler à un panda en fin de journée). Et mieux, je ne serais pas sortie si on m’avait fait porter des vêtements colorés : paye ton naturel.
Les pouffes sont toutes bien foutues, elles le savent et en profitent
Le slut-shaming c’est mal, très mal, merci Laci Green.
Les pouffes pratiquent la duck face
Pratique que je trouve encore ridicule et qui fait tout sauf mettre quelqu’un en valeur, mais après tout pourquoi pas ? D’autant que je suis pas sûre que les photos en contre-plongée, en noir et blanc et hyper contrastées que j’affectionnais aient été bien mieux.
Les pouffes sont intolérantes
C’est vrai quoi, il y a que les pouffes pour se moquer de celles qui pensent, se comportent et s’habillent pas comme elles….
Hahaha. Ceci n’est pas une blague, c’était ce que je leur reprochais le plus.
J’essaye vainement de me conforter en me disant qu’on se construit en s’identifiant à des groupes et en se posant en opposition à d’autres, mais franchement, si je pouvais rencontrer mon moi de cette époque, je me foutrais une grosse baffe. Je me suis fermée à beaucoup de gens et j’ai sûrement raté de belles amitiés à cause de mes préjugés débiles. Je suis loin d’en être débarrassée et j’ai encore un ricanement en coin quand je vois ma voisine d’amphi passer 2h à remettre sa mèche devant sa webcam, mais au moins maintenant je me soigne.
Et toi, quels préjugés pas vraiment fondés regrettes-tu ? Y a-t-il encore un « style » de gens avec qui tu ne t’imagines pas du tout avoir des atomes crochus ?
Écoutez Laisse-moi kiffer, le podcast de recommandations culturelles de Madmoizelle.
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