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Pourquoi revenir aux contes de fées ?

Avez-vous remarqué un retour en force des contes de fées dans les films et séries récemment ? Fenn aussi. Est-ce une bonne chose ? D’où cela vient-il ? Elle se penche sur la question.

Une brève sur Elbakin.net l’autre jour soulignait ce qui semble être la tendance actuelle à miser sur les contes de fées. L’auteur de l’article citait pour cela l’actrice Lana Parrilla, tenant le rôle de la méchante reine dans la nouvelle série à venir d’ABC Once Upon a Time, exemple typique des nombreux cas de féérie urbaine ; celle-ci attribue en effet ce « retour à la féérie » à cette capacité d’évasion qui qualifie si souvent le genre de la fantasy : le monde est tellement sombre en ce moment, dit-elle. Peut-être avons-nous tout simplement besoin de ces jolies histoires pour nous échapper de tout ce qui nous pèse.

Et là j’ai envie de dire : oui, MAIS ! Parce que je n’écris pas des articles pour dire que ouais, je suis super d’accord et tout, vous vous en doutiez (encore que). En fait, ce n’est pas vraiment que je ne suis pas d’accord. C’est surtout que quelque chose me chiffonne, en l’occurrence, avec cette explication facile.

Fantasy & quotidien

Certes, le vaste monde de la fantasy est synonyme de rêves tout comme le sont facilement les mythes. Entrer dans ce monde, c’est aspirer à une autre vie, plus grande, plus épique, ou au moins piquée d’un peu de cette… « fantaisie ». C’est appartenir à ce que Tolkien appelait un « monde secondaire » et accepter la « croyance secondaire » qui va avec, ce monde doré étant par définition riche en magie et en mythes « vivants ». Tolkien qui, d’ailleurs, refuse le mépris qui va souvent de pair dans notre société avec cette envie d’évasion : Why should a man be scorned if, finding himself in prison, he tries to get out and go home ? Or if, when he cannot do so, he thinks and talks about other topics than jailers and prison-walls ? (« Pourquoi mépriser un homme si, alors qu’il se retrouve en prison, il tente de sortir et rentrer à la maison ? Ou si, quand il n’est pas en mesure de le faire, il pense à et parle d’autre chose que des gardiens et des murs de prison ? » – mais non je ne me la pète pas avec mon anglais.)

Dans le cas de notre tendance culturelle actuelle, pourtant, il semble s’être passé l’effet inverse : ce sont les êtres magiques et féériques de ces mondes secondaires qui se sont évadés… chez nous. D’où le nom de « fantasy urbaine ». Alors, j’aurais tendance à être d’accord avec Lana Parrilla dans un premier temps, le temps des paillettes. Les « jolies histoires » venant à nous, notre quotidien apparaît plus féérique, doux, rêveur, plus autre chose. Je pense au magnifique roman de Neil Gaiman, Neverwhere, très bel exemple de fantasy urbaine et dont je reparlerai probablement et avec plaisir, mais disons juste pour l’instant qu’il s’agit de la grande aventure de Richard Mayhew, un jeune homme comme un autre qui, du jour au lendemain, change de vie et de regard à cause d’un être fantastique qui l’entraîne dans le London Below (le Londres d’en-bas), sorte de dimension magique et parallèle au Londres que nous connaissons.

Le cas « Once Upon a Time »

Ou alors, revenons à Once Upon a Time, ladite série où figure notre actrice : le synopsis nous parle de personnages de contes de fées (Blanche-neige, Jiminy Cricket…) réduits à vivre tels des gens normaux parmi nous sans se souvenir de leurs féériques origines (découvrir que l’on est « plus » qu’on ne le pensait et qu’on n’appartient pas vraiment à ce monde, n’est-ce pas un fantasme récurrent ?).

Tout cela était donc mon « OUI », voici venir maintenant mon « MAIS ! ».

Le monde est tellement sombre en ce moment. Peut-être avons-nous tout simplement besoin de ces jolies histoires pour nous échapper de tout ce qui nous pèse. Échapper ? Jolies histoires ? Ces histoires, qui pullulent gaiement dans nos librairies, nos cinémas et nos écrans d’ordinateurs, sont-elles réellement jolies ? Belles, à la limite. Mais jolies ?

Dites moi si je me trompe, mais des personnages féériques privés de leur féérie dans notre monde volontairement présenté comme l’antithèse de leurs origines, c’est tout de même un peu triste. À l’heure où j’écris cet article, la série n’a pas encore commencé, mais le trailer m’a donné une impression un peu « glauque » (Where are we going ?, pleure la douce Blanche-neige. Somewhere horrible

, répond la méchante reine). Où sont-ils passés, ces héros épiques de nos vieilles histoires ? Vous les trouverez au bar ou en train de crever. Mmmh… Magique !

La part d’ombre des contes de fées

Dans le très bon comics Fables, scénarisé par Bill Willingham, nous suivons également les déboires (disons-le carrément) des personnages les plus célèbres tels que Blanche-neige (encore !), le grand méchant loup, Cendrillon, la Belle et la Bête, etc., qui ont été contraints et forcés par un mystérieux Adversaire de quitter leurs terres natales des contes pour s’installer à New-York. Apportent-ils de la magie dans notre quotidien ? Aha. Alors, déjà, ils se cachent scrupuleusement, au point d’être capable de menacer ou même tuer quiconque menacerait de découvrir la vérité sur leur petite communauté. Ensuite… Comme il est loin, le temps des petits oiseaux qui pépiaient autour de Blanche-neige ! La vraie vie a fait d’elle une femme forte, froide et déterminée, qui au début de l’histoire tient d’une main de maître/maire adjoint ladite communauté. Meurtres, chantages, argent, révolutions, sang, haine et froide manipulation, le voilà, le quotidien de nos contes de fées installés chez nous ! Pour la peine, ne dirait-on pas que c’est à eux que notre monde sombre pèse ? Et attendez…

Dans l’adaptation 2011 du petit chaperon rouge, le plus si petit Chaperon Rouge, on a clairement retenu du conte originel « méchant loup » et « manger fille » pour placarder la morale du conte en lettres rouges sang sur fond blanc. Vous n’aviez pas compris qu’on parle d’abuser une gamine ? Tenez, du sang, du sexe, de la peur, de l’érotisme et de la perversion !

Puisqu’elle semble fasciner par sa pureté, Blanche-neige est censée revenir sur les écrans, représentée par Kristen Stewart, et on peut déjà l’admirer sur les affiches… en armure. Vous n’aviez pas compris que la donzelle se faisait plumer ? Vlan, elle va vous en mettre plein la gueule !

Et combien de comics ont joué sur les origines mythologiques ou féériques de leurs personnages soudainement voués à se battre dans notre sombre et plate dimension ? (En ce moment encore sur vos écrans : Thor). Non, ça ne rigole pas. Alors ok, je mentionnais tout à l’heure Neverwhere, comme un joli roman… Neverwhere, où, au passage, Richard apprend au contact des habitants féériques de London Below à poser un regard neuf sur sa ville, et surtout, à se rendre compte de la misère et de la pauvreté… car féérie ou pas, ces êtres vivent parmi les vagabonds et autres laissés pour compte. Vous vouliez des petits êtres magiques dans vos rues ? Paf, ils font la manche, là-bas !

La fin des contes de fées

Alors oui, ce retour aux contes de fées via la fantasy urbaine a vraisemblablement la côte en ce moment. Mais si c’est pour égailler un peu notre quotidien, nous dire que la vie c’est joli, eh ben j’ai envie de dire que quelqu’un s’est planté quelque part. Qu’on ne se méprenne pas : j’adore la fantasy, j’y consacre même mon mémoire et mon énergie d’étudiante blasée. Précisément. Et tous les romans de fantasy urbaine que j’ai pu lire jusqu’ici (et de plus en plus d’auteurs s’y mettent) me laissent avec cette idée, au contraire, que les contes de fées sont morts, ou bien agonisent longuement, et que si on ne fait rien c’est pas parti pour s’arranger.

Nous sommes un peu plus loin de l’idée d’évasion : nous avons le nez bien dans notre caca, si vous me permettez l’image. Car c’est, il me semble, toute l’idée de la fantasy urbaine : provoquer un contraste. Prenez une princesse qui jadis pouvait charmer tous les animaux de la forêt par la pureté de son chant, et placez-la dans une rue avec un flingue, tachée du sang du type qui vient de la violer et qu’elle a abattu. Exit, la magie, figurez-vous que les princesses pures et innocentes qui du jour au lendemain finissent souillées, violées et livrées à elles-mêmes, ça existe. Prenez une communauté d’êtres féériques, faites-les vivre comme nous, et paf, ils s’entretuent. Y a pas un problème ?

Serait-ce que les méthodes subtiles des contes originels n’ont pas réussi à nous faire passer le message, pour qu’on ait besoin de quelque chose de plus direct ? Ouvre les yeux, ça ne va pas ? Car non, en effet, ça ne va pas. Et nous avons donc besoin de ces jolies histoires, non pas pour nous évader. Pour, de temps en temps, ne plus nous évader.

OUI, on peut, on a besoin de rêver. MAIS on y vit, dans cette prison, qu’on le veuille ou non. It’s time to make the best of it (Là, je me la pète avec mon anglais).

Sources et pour aller un poil plus loin

L’article d’Elbakin.netL’essai de J.R.R. Tolkien, « Du conte de fées »Fables, revue sur madmoiZelle.comUn excellent ouvrage consacré à la fantasy en général


Et si le film que vous alliez voir ce soir était une bouse ? Chaque semaine, Kalindi Ramphul vous offre son avis sur LE film à voir (ou pas) dans l’émission Le seul avis qui compte.

Les Commentaires

9
Avatar de Analinea
9 novembre 2011 à 13h11
Analinea
et j'ai adoré le premier épisode, vivement que j'ai le temps de regarder le second ! C'est assez marrant de retrouver les contes de fée que l'on a lu petit dans un série, ça permet de les redécouvrir. Les acteurs sont bons, les décors et costumes très beaux, l'histoire bien chouette, what else ? Je vous conseille cette série !

Oui mais ce que je trouve dommage c'est que c'est axé vraiment que sur Blanche Neige le prince et la méchante qui va avec. Après bon ya que 3 épisodes donc je parle peut être un peu vite mais bon je trouve ça dommage
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Voir les 9 commentaires

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