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« Pourquoi les gens donnent leur avis quand on ne veut pas être mère ? » entretien avec la réalisatrice de Ninjababy, Yngvild Sve Flikke

À l’occasion de la sortie en salles de Ninjababy, on a rencontré la réalisatrice féministe Yngvild Sve Flikke pour parler des idées reçues et des tabous autour de la maternité et du choix de ne pas avoir d’enfant.

Ce mercredi 21 septembre, Ninjababy sort en salles. À cheval entre comédie et satire des normes sur la maternité et ses diktats, ce film norvégien s’est imposé à nous comme un coup d’éclat féministe. À l’occasion de la sortie du film, on a discuté avec la réalisatrice du film, Yngvild Sve Flikke.

ninjababy

Ninjababy, de quoi ça parle ?

Ninjababy nous plonge dans la vie de Rakel, une jeune femme de 23 ans aussi ambitieuse que drôle, franche et empathique. Ce personnage féminin d’un réalisme et d’une modernité détonante est à l’image d’un film qui tord le cou aux diktats et aux idées reçues sur la maternité. Rakel n’a aucune envie d’être mère. Pourtant, elle découvre qu’elle est enceinte de six mois. C’est alors qu’apparaît Ninjababy, un personnage animé sorti de son carnet de notes, qui va faire de sa vie un enfer…

Madmoizelle. Comment est né le sujet de Ninjababy ?

Yngvild Sve Flikke. J’ai deux filles et depuis que je suis mère, j’ai constaté la pression immense qui pèse sur vous en tant que femme enceinte. En fait, je réfléchis au sujet de mon film depuis quinze ou seize ans ! Être enceinte est la chose la plus folle que j’ai vécue. Pendant que tout le monde vous dit que vous avez un joli ventre, vous êtes partagée entre de nombreux sentiments : des doutes sur le fait de devenir une bonne mère, des regrets

Je me suis demandé : est-ce qu’il est possible de faire un film amusant et intéressant sur une grossesse ? Je voulais faire une comédie sur un sujet très sérieux. Dans Ninjababy, les émotions côtoient des moments qui font rire aux éclats. Comment faire ? Dans Ninjababy, la comédie côtoie des moments très émouvants. Je voulais faire une comédie avec beaucoup d’engagement. Je voulais que les gens rient aussi parce qu’ils se reconnaissent ou qu’ils reconnaissent des amis ou des connaissances. Je voulais qu’ils sortent du cinéma de bonne humeur, tout en ayant un vrai sujet auquel réfléchir et discuter.

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© Motlys

Raquel semble tellement réelle. On est toutes Rakel ou on a toutes une amie comme elle. Et pourtant, on voit peu de personnages comme elle au cinéma…

J’avais vraiment besoin de voir cette femme, Rakel, à l’écran. Les films sont souvent remplis de femmes stéréotypées. Et si vous n’êtes pas un stéréotype, vous êtes tout le contraire et ça ne marche pas non plus. C’est pourquoi je voulais qu’elle soit aussi réelle que possible. En plus, j’ai l’impression que la télé, le cinéma ou Instagram nous donnent à voir une version très lissée du monde. Donc je voulais vraiment que le film soit honnête et brut. Par exemple, pour Rakel, nous n’avions ni maquillage, ni styliste. On a utilisé un litre d’huile d’olive pour graisser ses cheveux ! Je voulais qu’elle se douche de moins en moins parce qu’elle n’a tout simplement pas le temps. Ça fait du bien de voir des gens normaux.

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© Motlys

Le thème du film est extrêmement actuel. Jusqu’à aujourd’hui, il peut être difficile de dire que l’on ne veut pas être mère.

Exactement. Si tu fais le choix de ne pas être mère, les autres se permettent toujours de donner leur avis et tu as toujours l’impression de devoir te justifier. Alors que si tu dis que tu veux être mère, ça ne suscite pas de réaction puisque c’est considéré comme tout simplement normal. Ce n’est pas vraiment accepté qu’une jeune femme ne veuille pas être mère.

Certaines personnes ne souhaitant pas êtres mères m’ont aussi raconté que ce choix attirait des regards et des réactions de pitié ! Les gens semblaient désolés. On a envie de leur répondre : « Ne soyez pas désolé. C’est mon choix ! » Pourquoi est-ce que c’est ainsi ? Pourquoi ne pouvons-nous pas dire, oui, je suis une femme et je ne veux pas d’enfants, surtout quand on voit le monde d’aujourd’hui qui rend ce choix si compréhensible ? Moi, je ne suis pas désolée pour Rakel. C’est aussi pour ça que je voulais créer ce personnage.

Votre film montre sans détour le désir féminin. Cela s’incarne notamment dans des scènes de sexe bien plus réalistes (et souvent drôles !) par rapport à ce qu’on a l’habitude de voir au cinéma.

Dans les films, je trouve que le sexe est souvent représenté de façon sublimée par rapport à réalité. Souvent, les scènes de sexe n’ont rien à voir avec la vraie vie ! Je voulais aussi montrer qu’en tant que femmes, on a aussi du désir sexuel. Par exemple, j’aimerais que chacune soit libre de pouvoir aborder un homme librement si elle le souhaite, pour en finir avec les stéréotypes. Les scènes de sexe font partie de cette envie de montrer des personnages réels, humains.

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© Motlys

À lire aussi : « Au cinéma, on a peu de personnages féminins intéressants parce que drôles » : entretien avec l’équipe de Tout le monde aime Jeanne

Crédit de l’image à la Une : © Motlys


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