Si tout le monde n’a pas envie d’écouter les détails de meurtres sordides, il semblerait que la consommation de récits « true crime » soit plus grande chez les femmes que chez les hommes. Une étude menée en 2018 le confirme : 73% des auditeurs de podcasts true crime sont des femmes. Selon une autre recherche, les femmes qui consomment du true crime ont tendance à le regarder en s’identifiant à la victime. Dans la majorité des histoires, les hommes sont agresseurs et les femmes victimes.
Ces récits permettraient « d’apprendre à être prudente » d’après Victoria Charlton, Youtubeuse True Crime. Elle indique que « malgré la peur que procurent ces histoires, il y a des leçons à en tirer et c’est ce qu’apprécieraient ses abonnés.»
Amanda Vicary, à la tête du département de psychologie à l’Université Wesleyenne, dans l’Illinois, et chercheuse en justice pénale, s’est aussi penchée sur le sujet. « Les femmes aiment les histoires dans lesquelles d’autres femmes survivent, par exemple si elles sont kidnappées et qu’elles échappent à leur agresseur», analyse l’universitaire.
À l’origine du true crime
Vous aussi vous êtes cette personne ? Si ce n’est pas le cas, je suis sure que vous en connaissez une ! Vous savez ? Celle qui s’endort le soir avec le doux son de « Faites entrer l’accusé » ou bien celle qui est sur TikTok tard le soir pour savoir si quelqu’un aurait aperçu Xavier Dupont De Ligonnes dernièrement ?
Le Truc crime est un genre documentaire traitant de vraies histoires criminelles. L’origine de ce genre littéraire nous vient tout droit des États-Unis, avec l’écrivain américain Truman Capote en 1966. Son livre retrace le meurtre d’une famille de fermier du Kansas. Il rencontre et interroge les assassins eux-memes et c’est la première fois qu’on s’intéresse aux criminels. Ce genre s’exporte ensuite à la télévision, et est devenu aujourd’hui une catégorie de podcast à part entière.
Si c’est Truman Capote qui a ouvert l’appétit de la population pour le true crime, certains chercheurs pensent cependant que l’attirance pour le genre a commencé dès la fin du XIXe siècle, notamment avec l’affaire Jack l’Éventreur en Angleterre.
Netflix surfe aujourd’hui sur la tendance en multipliant ses documentaires, qu’ils soient internationaux ou même français. Entre les histoires de sectes, Ted Bundy, Le petit Gregory, l’affaire d’Outreau, ou encore Jeffrey Dahmer, nos algorithmes regorgent de crimes sordides ! D’après Allocine, la série sur Jeyffrey Dahmer avait franchi le milliard d’heures de visionnage en deux mois seulement et figurait à la troisième place des séries les plus vues de toute l’Histoire de la plateforme.
Mais d’où nous vient cette curiosité morbide ?
Dès l’enfance, on peut remarquer une fascination pour les histoires d’horreur avec les monstres, les ogres etc… On intègre rapidement cette notion de bien et de mal, mais… il faut avouer que le mal intrigue davantage. Aujourd’hui, on ne compte même plus le nombre de Youtubeuses true crime sur la plateforme. Il existe même un genre de Chit Chat makeup du crime aux états unis…
« J’ai réalisé que la source de mon intérêt et de celles des autres femmes était la même : la peur de la violence que les femmes vivent au quotidien », explique Katherine Rogers, sociologue, Université de la vallée du Fraser, dans la revue Études féministes des médias en 2021.
Katherine Rogers
Même son de cloche pour Victoria Charlton, animatrice de documentaires criminels sur les médias sociaux et à la télévision. Elle déclare : « Je pense que c’est [les documentaires criminels] un moyen un peu pour nous d’apprendre à être prudente. Ça nous fait peur aussi, mais en même temps on peut tirer des leçons de certaines histoires. C’est ce qu’aiment mes abonnées. ». Elle ajoute avoir reçu la visite d’une mère et de sa fille venues lui dire merci. La mère lui aurait dit : « Merci, tu sais, grâce à toi, ma fille est plus prudente, j’aime qu’elle regarde tes histoires pour qu’elle se rende compte du danger réel. »
Des vertus pédagogiques ?
Les femmes auraient ainsi tendance à considérer le true crime comme un outil éducatif pour détecter les agresseurs potentiels et éviter les situations dangereuses. Et il faut l’avouer : un mystère non résolu peut être divertissant à souhait.
Regarder du true crime serait comme une sorte de guide de survie : en s’identifiant à la victime, on prend conscience des violences que subissent les femmes au quotidien et on apprend à les identifier, à les éviter.
Est-ce que regarder ces séries fait de nous une personne bizarre ? En fait non, c’est même plutôt normal, surtout lorsqu’ils s’agit d’affaire non résolues. Dans ce cas, le spectateur devient enquêteur : c’est notre curiosité qui parle, nous décortiquons l’enquête et faisons des théories.
Attention à ne pas abuser de ces contenus
Si ces histoires vous procurent des angoisses, que vous pensez croiser un tueur en série des que vous mettez un pied dehors, alors il faut songer à ralentir sa consommation. Les meurtres en série représentent moins d’un pour cent de tous les meurtres d’une année donnée, si cela peut vous rassurer. Et l’endroit où une femme est le plus en danger, c’est chez elle, comme en témoignent les violences conjugales.
Écoutez l’Apéro des Daronnes, l’émission de Madmoizelle qui veut faire tomber les tabous autour de la parentalité.
Les Commentaires
J'aime aussi voir comment les procès sont gérés. ça me permet de mieux comprendre le fonctionnement de la justice, et ça m'aide à me renseigner sur les absurdités de cette dernière, par exemple en ce qui concerne les condamnations envers les conjoints/exs violents. Grâce aux vidéos de True crime, j'ai appris que la justice était souvent mise sur un piédestal alors qu'elle est franchement défaillante, et je pense que ça peut nous aider à réfléchir à des pistes pour l'améliorer.
Cependant, il y a certaines vidéos que je ne regarde pas car les sujets sont trop trash pour moi.