Le livre Triste Tigre de Neige Sinno est l’un des succès de cette rentrée littéraire. Salué par la critique, il fait même partie des favoris du prix Goncourt des lycéens.
Mais les élèves du lycée privé Le Mennais de Ploërmel, dans le Morbihan en Bretagne, ne pourront pas y accéder dans leur établissement. Comme l’a rapporté Ouest-France, la proviseure du lycée, Véronique Calas, a pris la décision de retirer des rayons du CDI, qui y figurait dans le cadre d’une sélection proposée aux élèves, afin qu’ils rédigent une critique pour le Prix de la plume lycéenne.
En cause ? Dans ce récit autobiographique, l’autrice aborde les viols incestueux qu’elle a subi de la part de son beau-père, entre ses 7 et 14 ans. Ainsi, pour la cheffe d’établissement, ce livre comporte « des passages d’une grande violence » et « des mots, des phrases, des pages qui peuvent heurter des sensibilités », et n’a donc pas sa place dans l’établissement.
« Je suis la première à vouloir lutter contre l’inceste mais nous devons aussi protéger les jeunes et ne pas ajouter de la fragilité à la fragilité. Je retire un livre de l’établissement mais je ne le censure pas », s’est-elle justifiée auprès du Le Parisien.
Les enseignants sont « émus et choqués » par cette décision
Si l’Association des parents d’élèves soutien et « appuie » la décision de la cheffe d’établissement, elle ne passe pas du tout du côté des professeurs. Certains d’entre eux avaient pourtant proposé la création d’un comité de lecture, pour accompagner les élèves. Sans réponse de la part de la cheffe d’établissement. Dans les colonnes du Parisien, ils se disent « émus, choqués, voire révoltés par le principe même de la censure d’une œuvre validée par l’Éducation nationale et l’Académie Goncourt ».
Du côté des éditeurs du livre également, cette décision suscite des interrogations : « Nous sommes fiers de l’avoir publié. Je suis d’autant plus surpris que c’est un livre, bien que traitant de l’abus sexuel sur les enfants, d’une grande intelligence, d’une grande sensibilité. Neige Sinno respecte son lecteur en écrivant sous la forme d’une conversation », a exprimé à Ouest-France Frédéric Boyer, directeur littéraire de la maison d’édition P.O.L.
Même son de cloche pour Jean-Paul Hirsch, attaché de presse des éditions P.O.L : « Ce livre qui a déjà obtenu le prix littéraire du Monde est aussi sélectionné pour le prix Goncourt, le prix Médicis, le prix Femina… Bref, la quasi-totalité des prix de l’automne et aussi le Goncourt des lycéens. Le censurer dans un établissement me paraît scandaleux », s’est-il-indigné, avant de conclure : « Ceux ne sont pas les mots, les paragraphes de ce livre qui sont très durs, c’est l’inceste et le silence qui règne autour. »
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