Pas une journée ne passe sans qu’une femme n’en fasse les frais. Le slutshaming est omniprésent. Rien que cette semaine, la fille de Judith Godrèche, Tess Barthélemy, en a été victime : alors qu’elle montait les marches de Cannes, de nombreux internautes ont étrillé sa tenue sur X, à grand renfort de remarques sexistes. Certains ont même ironisé sur le sort morbide qui, selon eux, l’attendrait à cause de son décolleté. « Dans 25 ans, elle viendra chouiner, elle aussi, qu’elle s’est prise des coups de b*** contre son plein gré », peut-on par exemple lire dans l’un des commentaires dénigrants repérés par le média Fraîches.
En finir avec les insultes putophobes
Souvent traduit en français par « putophobie », le slut shaming est la contraction des mots « salope » et « honte ». Selon le site du Conseil du statut de la femme, organisme gouvernemental québécois, l’expression implique une stigmatisation péjorative et patriarcale de « toute femme dont l’attitude, le comportement ou l’aspect physique sont jugés provocants, trop sexuels ou immoraux ». Cette stigmatisation, et les insultes putophobes qui en découlent, sont révélatrices à plusieurs niveaux. D’une part sur la manière dont sont perçues (et marginalisées) les travailleuses du sexe, mais aussi sur les injonctions sociales misogynes que l’on fait peser sur la sexualité des femmes.
La putophobie désigne à la fois un processus de dénigrement misogyne, qui reproche en sous-texte aux femmes d’avoir une sexualité libre n’appartenant pas à un homme, mais aussi – et surtout – un levier pour la marginalisation et la précarisation des travailleuses du sexe.
La putophobie tue
Le terme anglais slut-shaming à été popularisé en 2011 par deux féministes canadiennes, Sonya Barnett et Heather Jarvis, lors de manifestations féministes lancées suite à la déclaration d’un officier de police de Toronto qui avait suggéré aux femmes de « ne pas s’habiller comme des salopes » pour ne pas être violées.
Très tôt, on apprend aux jeunes filles que les femmes « respectables » sont celles dont le body count est le plus bas (voir non existant), tandis que les femmes qui multiplient les partenaires ne méritent pas le respect. Cette dichotomie est celle que l’on retrouve dans le mythe bien désuet de la mère (ou de la vierge) et la putain. Comme la sexualité des femmes ne pouvait appartenir qu’à l’un ou l’autre, et en disait long sur la vertu de chacune.
Outre les remarques pseudo-morales sur une sexualité jugée débridée, et l’impact terrible que les biais putophobes ont sur le quotidien des TDS, la putophobie revêt des formes très diverses, pouvant aller jusqu’au cyberharcèlement, au revenge porn, aux violences sexuelles, voire même au suicide ou au féminicide. Taxée de « fille facile » parce qu’elle avait subi un viol collectif, Shaïna, 15 ans, a été poignardée et brulée par son petit ami en 2019.
Et si le film que vous alliez voir ce soir était une bouse ? Chaque semaine, Kalindi Ramphul vous offre son avis sur LE film à voir (ou pas) dans l’émission Le seul avis qui compte.
Les Commentaires
L'article est intéressant mais ne parle pas de putophobie.