Ils et elles sont partout, dans nos playlists Spotify et dans toutes les séries que l’on binge. Eux, ce sont les nepo babies, un terme popularisé ces derniers mois via TikTok. Par nepo baby, comprenez enfant du népotisme, qui doit sa réussite ou son ascension sociale aux membres de sa famille.
C’est une une du New York Magazine qui a mis le doigt sur le phénomène avec cette accroche imparable et dévastatrice « Elle a les yeux de sa mère. Et son agent. », et quelques visages emblématiques de cette tendance, Dakota Johnson, fille de Don Johnson et Melanie Griffith, Maya Hawke, fille de Uma Thurman et Ethan Hawke ou encore Zoë Kravitz, fille de Lenny Kravitz et Lisa Bonet.
Un pied dans la porte et beaucoup de travail, vraiment ?
Comme nous le disait si bien Lily-Rose Depp (tiens, elle aussi est sur la une du New York Magazine) dans une interview pour ELLE : « Internet accorde beaucoup plus d’importance à votre famille plutôt qu’aux personnes qui vous castent. On arrive peut-être à avoir un pied dans la porte, mais ce n’est qu’un pied. Il y a beaucoup de travail à fournir ensuite. » Si l’on continue de filer la métaphore pédieuse, on pourrait répondre que parfois la porte est aisément tenue ouverte pour qu’il soit plus facile d’y glisser un pied.
Soyons honnêtes : il n’est pas nécessairement reproché aux nepo babies d’avoir été aidés, conseillés, d’avoir reçu un coup de pouce salutaire qui leur a permis d’être au bon endroit au bon moment. C’est plutôt la facilité déconcertante avec laquelle ils et elles balaient souvent cette possibilité d’un revers de main et ne s’attribuent leur réussite qu’à leur seul mérite et dur labeur, qui devient sérieusement agaçante pour tout le monde. Si au moins, ils et elles admettaient qu’avoir des connexions dans le milieu via leur entourage ou qu’un peu de cooptation, tout cela aide ! Au contraire, chacun est capable de débiter avec assurance un discours prémâché sur le fait qu’ils et elles n’étaient pas du tout prédestinés à fouler plateaux de cinéma et tapis rouge et qu’ils et elles ont travaillé si dur pour en arriver là. Encore heureux. Mais certainement moins que n’importe qui n’ayant pas leur réseau ou n’étant pas issu d’une grande dynastie hollywoodienne.
Vulture en a même profité pour faire un quizz assez réjouissant où le but est d’attribuer une phrase typique de nepo baby au nepo baby qui l’a effectivement prononcée. Ici, Maya Hawke, visiblement pas du tout aidée pour décrocher un rôle dans un film de Quentin Tarantino, sachant que maman était son égérie :
« Vous savez, j’ai passé l’audition comme tout le monde… peut-être qu’à la fin, j’ai eu droit à une étreinte un peu plus rapprochée et à un clin d’œil de Quentin. »
Et si le problème n’était pas les nepo babies ?
C’est la chanteuse Lily Allen qui a récemment apporté sa contribution au débat sur Twitter. Fille de l’acteur Keith Allen (et sœur de l’acteur Alfie Allen vu dans Game of Thrones), elle a tenu à préciser que les choses sont parfois un peu plus compliquées qu’elles n’en ont l’air, mais aussi comment elle a évolué sur cette question :
« Quand j’avais dans la vingtaine, ça me mettait vraiment sur la défensive, je trouvais que j’avais bossé extrêmement dur et que je méritais le succès que j’avais, que les gens appréciaient mes chansons, et qu’elles venaient de moi, j’avais aussi une relation tendue avec certains membres de ma famille, alors c’était difficile de leur attribuer mes succès à l’époque. Mais on sait tous que c’est plus compliqué que ça. C’est assez clair qu’il y a un manque de représentation dans cette industrie où la classe et la race sont touchées. Tout le monde est perdant au final. »
Elle estime que l’obsession pour les nepo babies éloigne finalement du vrai problème des inégalités d’accès à ces élites culturelles Que l’on soit convaincue ou non par l’argumentaire déployé par Lily Allen, il a le mérite au moins de reconnaître qu’il y a un souci et ne se limite pas à un « quand on veut, on peut ».
Et en France ? Parviendra-t-on un jour à dire les termes sur le népotisme de tous les milieux culturels, du cinéma à l’édition en passant par la musique ? Sera-t-on un jour prêt à dire que oui, le talent ne fait pas tout, et qu’un bon carnet d’adresses et un nom (Garrel, Lindon ou Chédid, au hasard) ne font jamais de mal quand on veut s’engager sur l’autoroute de la fame… pardon, quand on veut faire une carrière artistique ?
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