Un jour de promenade, je tombe en arrêt devant la vitrine d’une enseigne de vente à distance (du genre à vendre des gadgets aux vieux, du redresse-dos magnétique au téléphone en marbre). Sous mon nez, l’objet de mon désir : un tourne-disque, mâââgnifique de surcroît. Style rétro, en contreplaqué imitation acajou et boutons chromés en plastique. De l’authentique vintage neuf, si tu vois de quoi je parle…
Qu’importe. J’ai besoin d’un appareil qui me permette d’écouter la pile de vinyls qui dort depuis des années dans un coin de ma chambre, et celui-ci est parfait pour éviter l’investissement platine/ampli/enceintes (que je me promets depuis des lustres et que je ne réaliserai jamais). Hop, j’allonge la CB et repars avec le pickup et deux aiguilles de lecture, au cas où (j’ai renoncé à prendre la splendide table range-disques proposée avec, en faux acajou elle aussi).
Mais pourquoi s’encombrer d’un tel engin quand on possède déjà un iPod-nano-riquiqui ?
Je m’en vais te l’expliquer : voici cinq raisons qui donnent à l’écoute de vinyls une saveur particulière (et c’est pas Debbie Harry qui me contredira…).
Parce que ça fait un doux « crac » quand ca démarre.
Par rapport à ce que la technologie permet maintenant, ma p’tite dame, y’a pas à dire, le son de mon tourne-disque est pourrave. Mais mais mais… le bruit de l’aiguille qui se pose sur le vinyl, les crépitements qui suivent et le son un peu sourd de la chanson qui démarre, ça, c’est unique !
Parce que je me remets à ECOUTER de la musique.
Je suis accro à iTunes, c’est un fait. Je démarre le lecteur, je clique sur « play » et zou… 4852 titres prêts à tourner, en mode aléatoire si je lui demande.
Avec ma platine, c’est tout autre chose. Parce qu’on ne met pas en route un 45 tours comme on lance iTunes. Il faut choisir le disque d’abord, sortir l’enveloppe de la pochette, le vinyl de l’enveloppe, pour le poser sur la platine puis actionner le bras de lecture. Tout ça pour écouter une face A d’une vingtaine de minutes.
Alors quand je mets un vinyl en route, je prends le temps. Je m’assois et j’écoute, un peu abrutie par les tours que fait le disque sur lui-même.
Parce que j’aime les beaux objets.
Non, là je ne parle pas du pickup rétro des années 2000. Je pense aux pochettes d’albums. Rien à voir avec les photographies bêtes comme chou des pochettes de CD d’aujourd’hui.
Non, au temps des 45 tours, il y avait de la place sur la pochette pour s’exprimer alors vas-y que tout le monde s’en donnait à coeur joie : y’a de la couleur, des photos, des dessins, et y’en a partout (recto/verso/intérieur/extérieur) !
Sur celle-ci (un mythique Neil Young), on croirait même que le dessin a été fait à la main directement sur le carton (dingue, nan ?). Bref, c’est beau et, en plus, ça a la douce odeur du papier qui a vieilli.
Parce que c’est aussi et surtout la musique de mon papa (ou comment séduire son père en une leçon).
Sans conteste, mes préférences musicales ont été influencées par celles de mon père. Ma chance, c’est que mon papa était plutôt un mec branché (quoi ?… Bah oui, le plus fort c’est mon père !). Genesis, Pink Floyd, Patti Smith, Serge Gainsbourg, les Rolling Stones, François Hardy, Neil Young… y’a quasi que du bon (normal, c’est la musique de mon enfance) et plein d’autres trucs que j’ai encore à découvrir.
J’étais drôlement fière de dire à mon père que, ça y est, je pouvais ré-écouter les disques qu’il m’avait donnés (légués ?). Et lui était drôlement content de me parler de ses vieilles amours musicales. In the pocket, le papa.
Parce que ça m’oblige à fouiner pour trouver de nouveaux disques.
Et j’adore ça, fouiner ! Mon père, il a beau être fortiche, il a quand même manqué quelques trucs… Ces trucs-là, tu imagines bien que ce n’est pas à la FNAC que je vais les trouver.
Alors je passe du temps sur eBay-mon-amour à flâner dans la rubrique 45 tours. Et vazy que j’enchéris. Et vazy que je surveille. Et vazy que je gagne. Et vazy que j’envoie mon chèque. Et vazy que j’ai avis de passage du facteur. Et vazy que je vais chercher l’objet tant attendu à la Poste. M’enquiquiner la vie, j’aime ça.
Et puis il y a un chouette truc que je n’avais pas vu venir. Quand des amis passent à l’appart’, c’est immédiatement vers la boîte en bois et les caisses de vinyls que se porte leur curiosité. Avec la fierté de la collectionneuse, je les regarde faire le tour des albums, proposer d’écouter celui-ci ou, ah, non plutôt celui-là. Alors, on écoute de la musique et, pour une fois, on l’écoute vraiment.
PS : Depuis, je recois chaque mois le magazine Sédao. Promis, si je craque sur le redresse-dos magnétique (« Paraissez immédiatement plus jeune « ) ou sur la friteuse sans huile, je te raconterai. En attendant, mon pickup c’est là-bas que je l’ai trouvé.
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