Farah Chamma a 19 ans et elle est étudiante en droit et en sciences politique à la Sorbonne d’Abu Dhabi. En plus de ses cours, elle écrit très régulièrement des poèmes depuis cinq ans, comme on l’apprend dans une interview faite avec l’ADIBF
(Abu Dhabi International Book Fair), et c’est une de ses oeuvres qui l’a fait connaître aujourd’hui.
Dans How must I believe ?, elle exprime ses pensées sur la corruption, sur le pouvoir, sur l’ambivalence de son identité arabe et, finalement, sur le fait d’être jeune, aujourd’hui, au Moyen-Orient. Elle n’y vise pas une personne : elle s’adresse à tous ceux qui sont au pouvoir. Un texte très fort, déjà vu plus de 40 000 fois et dont le succès ne devrait pas se tarir.
Le poème est clamé en arabe et sous-titré en anglais, mais on l’a traduit avec nos petites mains pour celles qui ne parlent ni l’une ni l’autre :
« Comment dois-je croire alors que vous avez transformé la foi en blasphème. Alors que vous divisez les pays, tuez et répandez la corruption, Au nom de la religion et de la dévotion. Vous qui, au nom de Dieu, avez transformé des enfants en orphelins. Vous qui au nom de Dieu, avez volé, menti, détruit des maisons Seulement pour vivre dans des châteaux faits des briques de l’injustice et de l’esclavage. Allez-vous répondre à cela, vous qui êtes convoqués ?
Car nous sommes fatigués de vos discours dépourvus de sens. Nous sommes fatigués de la poésie, des chansons, des chants. Nous sommes fatigués des mouvements de réforme, de l’extrémisme, de la neutralité. Nous sommes fatigués des présidents, des conseils de sécurité, du leadership. Nous sommes fatigués de la religion, de l’apostasie. Nous sommes fatigués, sommes exténués. Car y a-t-il des valeurs dans une Constitution sous l’ombre de la tyrannie ?
Je m’assois seule mais je ne me trouve pas moi-même. Car moi aussi, j’ai été colonisée. À l’intérieur de moi, il y a une prison politique. À l’intérieur de moi, il y a un règlement. À l’intérieur de moi, il y a un homme qui porte une arme. Et un autre qui cherche mes faiblesses. À l’intérieur de moi, il y a une femme qui lit une lettre dans un souffle qui tombe dans l’oreille de sourds. À l’intérieur de moi, il y a des avions et des explosions. À l’intérieur de moi il y a des adorateurs qui se plient devant Dieu et leur coeur ne s’adoucit pas. À l’intérieur de moi, il y a des pays arabes qui ne font pleuvoir que la douleur. Comment puis-je croire alors qu’à l’intérieur de moi, il y a un ennemi qui n’a peur de rien ?
Mon identité arabe m’antagonise. Ça fond dans ma poitrine comme de la glace, comme une nouvelle guerre froide. Ça m’antagonise… Ça m’empêche de passer et de faire tamponner mon passeport. Ça m’antagonise, alors que ça erre dans les rues à la recherche d’un gouvernement étranger pour l’accueillir. Ça erre, d’officier en officier, d’ambassade en ambassade, complètement ignorée. Mon identité arabe m’antagonise, ça fond dans ma poitrine comme de la glace, comme une nouvelle guerre froide. Car comment puis-je croire, quand mon identité arabe est devenue aussi effrontée qu’une femme égarée. Une suppliante, implorante prostituée.
Nous avons abandonné le savoir et donc avons été abandonnés. Alors que nous nous réjouissons du simple oubli et de plaisir, O Ummah of Iqraa, qu’as-tu lu ? Tu as préféré les biens à l’esprit. Nous avons recherché le savoir ailleurs, comme le feront nos enfants. Alors comment pourrais-je croire alors que j’aspire à vivre dans un autre pays que le mien ?
Comment je pourrais croire alors que vous avez transformé la foi en blasphème ? Alors que vous séparez des nations, tuez et répandez la corruption au nom de la religion et de la dévotion. Vous qui, au nom de dieu, avez changé des enfants en orphelins. Vous qui, au nom de Dieu, n’obtiendrez rien tant que vous oppresserez l’humanité.
Faites ce que vous voulez et déclarez ce que vous voulez. Car j’ai cru en Lui, alors pourquoi je devrais croire en vous ? Reprenez vos systèmes de croyances, Car je déclare ne pas croire en vous. »
– via Rue89
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