Cette semaine, le podcast hebdomadaire Le seul avis qui compte, dans lequel Kalindi chronique sa mauvaise humeur ciné, s’en prend au film Deep Water. L’article ci-dessous est une retranscription du podcast.
Ma meilleure amie n’arrête pas de me dire que j’ai des pieds qui ressemblent à des mains. Ce qui n’est pas faux, honnêtement.
Hypothétiquement, ça veut dire que je pourrais escalader des baobabs en moins de temps qu’il n’en faut à Usain Bolt pour courir un 100 mètres, mais ça veut surtout dire qu’avec ces panards — je précise que je chausse du 42 chez Decathlon — j’aurais grave pu jouer dans Deep Water.
Deep Water, un thriller qui sent les pieds
Eaux profondes, de son titre français, c’est un bon gros navet sorti sur Amazon Prime Video le 18 mars, que je vous déconseille si vous êtes podophobe — je vous jure y a tellement d’images de pieds que j’ai eu l’impression de bouffer du gruyère pendant 1 heure 45 — ou tout simplement que vous êtes un être sensé, qui demande à un film d’avoir ne serait-ce qu’UN SCÉNARIO.
Signé Adrian Lyne, dont on sait désormais qu’il aime deux choses dans la vie, les pieds et le néant, Eaux profondes nous a été vendu comme un thriller érotique archi-chaud. Et avec un titre aussi aqueux que Deep Water, j’espérais que ça sente un peu la cyprine et autres substances, mais à part de vagues odeurs d’orteils sales, je n’ai eu droit qu’à des empyreumes de déception.
Pourtant, sur le papier, Deep Water avait tout pour faire frétiller les masses, à commencer par un casting tout feu tout flamme, j’ai nommé Ben Affleck et Ana de Armas. Autant dire deux personnes qui cumulent dans l’imaginaire collectif plus de sex appeal que Zelensky, même si perso Ben Affleck m’a toujours fait l’effet d’un yakitori poulet, c’est-à-dire aucun.
Mais un casting, tout excellent qu’il soit, ne peut pas rattraper un désastre scénaristique aussi important que celui du film d’Adrian Lyne. Car sauver ce film reviendrait à peu près à vider le Titanic avec une louche à trous.
De quoi parle Deep Water ?
Mais alors, qu’est-ce que ça raconte, Deep Water ? Eh ben justement, je cherche encore.
Après 10 minutes de film, je me suis demandé : « de quoi ça parle ? »
Après 30 minutes de film, je me suis redemandé : « de quoi ça parle ? »
Après 40 minutes de film, je me suis re-re-demandé avec la bave au menton et les yeux injectés de sang : « de quoi ça parle putain ? »
Et puis bon, après j’ai lâché l’affaire et j’ai accepté mon triste sort de journaliste obligée de regarder un film sans scénario jusqu’au bout. Ouin Ouin.
Eaux profondes, ça se passe à la Nouvelle-Orléans, dans une petite ville où tout le monde se connaît. Victor Van Allen et sa femme Melinda s’y livrent une guerre froide, à couvert dans leur grande maison bourgeoise, dont on comprend vite qu’ils ne peuvent se la payer que grâce à Victor, une sorte de génie des sciences ou de la tech, j’ai pas bien compris. Et surtout j’ai écouté qu’à moitié, tout occupée que j’étais à déglacer une saucisse au fenouil avec du cognac.
Victor adore sa femme, et c’est tout sauf réciproque. Elle, elle semble le haïr, pour un motif obscur. Du coup, elle prend des amants, avec lesquels elle s’affiche devant son époux, qui n’y répond que par un flegme suspect.
Quand le premier amant de Melinda, un certain Martin Mac Machin, disparaît, Vic se vante auprès du nouveau mec de sa femme de l’avoir tué d’un coup de marteau sur la tête.
L’a-t-il vraiment fait ou ce décès n’est-il qu’une pure coïncidence et la déclaration de Victor une simple menace ?
Ben Affleck et les mollusques
Quoi qu’il en soit, la rumeur commence à enfler dans la ville que Victor bute des gars. Surtout qu’un autre amant de Melinda est retrouvé mort dans la piscine… de Victor. Et que la dernière personne à l’avoir vu est… Victor. Ambiance.
Du coup, Melinda elle-même croit en la culpabilité de son mari et compte bien le faire savoir à tout le monde. Elle engage d’ailleurs un détective privé avec l’aide d’un gars chelou de la ville qui se fait passer pour un psy.
Voilà, c’est à peu près tout. Avec une intrigue aussi pauvre, j’aurais espéré avoir droit à des dialogues musclés, une vraie réflexion sur le couple libre et pourquoi pas des super scènes de cul, mais je n’ai eu droit à rien. Rien. Genre rien du tout.
Ah si pardon, j’ai eu droit à Ben Affleck qui fait de la bisque de homard, à Ben Affleck qui arrose des escargots avec un brumisateur, à Ben Afflleck qui parle de mollusques toutes les 4 secondes.
Mais what about la moule à ta meuf Ben ? C’est pour te voir l’ausculter qu’on s’inflige ce navet bon sang !
Pour le coup, Ana de Armas, en face, se démerde toute seule avec l’érotisme supposé du film, et relève le défi de lancer 50 œillades suggestives par minute tout en accomplissant diverses activités — toujours de manière sexy.
Car ce film est clairement fait pour que des vieux gars se branlent sur le dos nu et les pieds de l’actrice cubano-espagnole. Même quand elle se lave les dents en étant furieuse, elle laisse couler du liquide blanc sur son visage, en mode « kikou les hommes », je vous laisse apprécier la métaphore visuelle du meilleur goût.
Sinon, le bordel entier repose sur un concept peu clair. On ne comprend pas si Vic et Melinda sont en couple libre ou s’ils sont juste séparés mais vivent sous le même toit. Ou si Melinda a juste décidé de vivre sa life sans se préoccuper de son mari. Bref, C’EST PAS CLAIR VOTRE HISTOIRE.
Deep Water, à la limite du problématique
Et du coup, le film a tendance à virer problématique en dépeignant le personnage de Melinda comme une infecte séductrice qui ken des mecs à tours de bras pour pousser son mari à bout, façon manipulatrice perverse.
À la fin de Deep Water, on a plus envie de mettre des claques à Melinda qu’à Vic alors qu’en vrai c’est un gars violent et dangereux.
Et ça, c’est la preuve que les scénaristes ont écrit un personnage féminin absolument dépourvu d’ambivalence et d’humanité, comme un simple prétexte à la violence de son mari. Pas une seconde on n’explique pourquoi Melinda hait son mari, pas une seconde on n’essaie d’expliquer pourquoi elle est tombée dans l’alcoolisme, pas une seconde on ne cherche à la rendre attachante ou au moins un peu nuancée.
Attendez, attendez, attendez, pouce ! Je viens de checker la page Wikipédia de notre navet du jour et je découvre avec stupeur que SAM LEVINSON a co-écrit le scénario.
Sam Levinson, rappelez-vous, c’est le créateur et showrunner d’Euphoria, auprès duquel quatre actrices du show se sont plaintes d’avoir trop de scènes de nu ou de sexe dans le scénario.
Décidément, tout s’éclaire : une absence d’enjeux et un surplus de tétons, c’est bien la pâte de ce bon vieux Levinson.
Bref, je vais demander à Amazon de me rembourser mon abonnement de ce mois-ci pour cet affront fait à mon cerveau.
Parce qu’au final, Deep Water est moins un thriller sexy qu’une grosse trace de pneu sur un tanga, pendant lequel vous allez tout faire sauf… prendre votre pied.
Regarder u003cemu003eDeep Wateru003c/emu003e sur Amazon Prime Video
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Le seul avis qui compte est un podcast de Madmoizelle écrit et présenté par Kalindi Ramphul. Réalisation, musique et édition : Mathis Grosos. Rédaction en chef : Mymy Haegel. Direction générale : Marine Normand.
Écoutez l’Apéro des Daronnes, l’émission de Madmoizelle qui veut faire tomber les tabous autour de la parentalité.
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