Cette semaine, le podcast hebdomadaire Le seul avis qui compte, dans lequel Kalindi chronique sa mauvaise humeur ciné, parle du film Coupez !. L’article ci-dessous est une retranscription du podcast.
Peut-être que vous ne le savez pas, mais je suis une grande cinéaste. Le premier (et dernier) film que j’ai écrit et réalisé s’appelait Sherlock et Pamela.
C’était globalement un film maxi-problématique où une dénommée Pamela se servait de ses énormes seins pour séduire Sherlock Holmes et dissimuler le fait qu’elle avait assassiné une jeune femme avec un lampadaire IKEA.
J’avais 12 ans quand j’ai réalisé ce chef-d’oeuvre avec avec ma meilleure amie, et on l’a fait en un seul plan-séquence, moins parce qu’on voulait se lancer un vrai challenge cinématographique que parce qu’on savait pas faire de coupes sur un ordinateur.
Coupez !, le remake du film japonais Ne Coupez pas !
Depuis, je suis particulièrement attirée par les longs plans-séquences au cinéma, de L’Arche Russe, à Time Code en passant par Birdman et 1917. Aussi, quand j’ai su que Coupez!, le nouveau film de Michel Hazanavicius, était le remake d’un film japonais intitulé Ne Coupez pas ! sur une équipe de tournage qui veut tourner un film en un seul plan-séquence, j’ai eu envie de simuler une paralysie faciale pour me barrer du travail et aller illico presto voir l’adaptation.
J’ai finalement attendu et suis allée le voir au lendemain de sa projection au festival de Cannes, où il faisait office de film d’ouverture. Et j’ai vécu devant une expérience particulièrement drôle, singulière et smart, bref, une expérience signée Hazanavicius quoi.
Pour rappel, Michel Hazanavicius est un réalisateur, scénariste, producteur, monteur et acteur français. Il est aussi président de la Fémis. Vous le connaissez sans doute pour avoir réalisé le film aux 10 Oscars The Artist ou pour ses parodies de James Bond devenues cultissimes et titrées OSS 117 : Le Caire, nid d’espions et OSS 117 : Rio ne répond plus.
Mais pour moi il est surtout le réalisateur du film qui m’a le plus fait rire au monde, j’ai nommé La Classe américaine, qui est le 3è volet de la trilogie du Grand détournement, réalisé à partir d’images d’archives et d’extraits de films de la Warner Bros.
Hazanavicius, créateur de comédies singulières
Hazanavicius est un cinéaste qui aime tout particulièrement actionner le levier de l’absurde, ce qui fait de lui, avec Quentin Dupieux, un créateur de comédies assez uniques dans notre paysage hexagonal régi par les propositions tièdes et souvent problématiques (hein, j’ai pas besoin de vous citer tous les Qu’est-ce qu’on a fait au bon dieu, Ténor et autres À bras ouverts).
Cette année encore, le grand Michel nous a livré une comédie tout à fait différente de ce que font ses confrères, et totalement différente de ses créations précédentes.
Coupez!, c’est l’histoire d’un cinéaste sous-pression qui réalise un film de zombies à petit budget en étant absolument odieux avec son équipe. Alors qu’il essaie de pousser ses acteurs à la crise de nerfs, de vrais zombies s’immiscent sur le tournage et la situation part en couilles. Ça, c’est l’intrigue de base du projet, et ça en constitue le premier tiers.
Toute la communication autour du film, de son synopsis à sa bande-annonce, est basée sur cette invasion zombies, et seulement sur elle.
Pendant toute la première demie-heure de Coupez!, j’ai donc eu très peur qu’il ne soit qu’une réplique kitsch et gênante du film japonais originel, un film de blancs qui moquent les codes d’un cinéma différent du leur,
Mais c’était bien mal connaître Hazanavicius qui ne s’est évidemment pas contenté d’un remake grossier, crétin et raciste, mais est resté fidèle à l’oeuvre initiale en façonnant 3 parties distinctes, un peu à la manière de Mademoiselle de Park Chan-wook version poilante, en créant un film dans le film dans le film.
Je ne peux pas vous révéler ce que contiennent les différentes parties de Coupez !, car ce serait vous gâcher le bonheur de découvrir la narration surprenante et barjo de Ne Coupez Pas, reprise par Michel Hazanavicius.
L’hommage aux cinéma maison
Ce que je peux vous confier, c’est que l’histoire des zombies n’est qu’un prétexte à l’hommage que Michel Hazanavicius entendait rendre au cinéma, et surtout à ses petites mains.
Dans Coupez !, Rémy, le réalisateur du film de zombies, n’est pas un grand réalisateur. Ses seules velléités sont de faire des films peu chers et moyens. Pour l’accompagner, il n’a qu’une petite équipe composée de quelques acteurs, un cadreur, une assistante-cadreuse et des assistantes de prod, et tous ensemble se démènent comme ils peuvent, pour fabriquer un film de bric et de broc.
Coupez ! était donc le film parfait pour ouvrir le festival de Cannes, en cela qu’il fait l’apologie de la fabrication maison et rend hommage aux travailleurs de l’ombre. Alors que Cannes est devenu un festival trop mondain, où les influenceuses et autres mannequins défilent sur le tapis rouge pour promouvoir des marques, on en oublierait presque qu’il demeure une célébration du cinéma, et surtout d’un cinéma social, qui fait souvent la lumière sur ceux qu’on oublie.
Hazanavicius a donc pansé les plaies de notre septième-art avec tout l’humour, l’absurde et l’intelligence qu’on lui connaît, devenant, cette semaine, l’homme le plus classe du monde.
Le népotisme pénible du cinéma français
En revanche, et parce qu’il faut bien que je râle un peu pour respecter ma ligne édito, il y a un point noir dans Coupez !, et il s’appelle SIMONE. Si les ¾ des acteurs sont formidables — mention spéciale à Jean-Pascal Zadi, Bérénice Béjo et à quasiment tous les seconds rôles, j’ai été sortie du film à de multiples reprises à cause d’une comédienne dont les répliques sonnent faux. Je ne l’avais encore jamais vue au cinoche donc en sortant de la salle j’ai tout de suite été voir de qui il s’agissait. Qu’elle ne fût pas ma surprise quand j’ai découvert que c’était en fait Simone Hazanavicius, c’est à dire, vous l’aurez compris, la fille du réalisateur.
Et le népotisme, eh bah ça commence à souler, surtout quand ça dessert le film. Mais en vrai, j’aime tellement Hazanavicius et sa compagne Bérénice Béjo, que pour cette fois-ci, je vais faire semblant de n’avoir rien vu.
En tout cas, Coupez !, ça m’a donné envie de retourner derrière la caméra, offrir une suite à cette splendeur filmique qu’était Sherlock et Pamela.
Je vise Cannes 2025.
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Le seul avis qui compte est un podcast de Madmoizelle écrit et présenté par Kalindi Ramphul. Réalisation, musique et édition : Mathis Grosos. Rédaction en chef : Marine Normand.
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Les Commentaires
Après ça reste sympathique à regarder mais il vaut mieux éviter de voir les deux coup sur coup en commençant par le remake parce que c'est assez énervant.
Edit : et je dois quand même préciser que les acteurs sont bons, notamment Finnegan Oldfield qui est hilarant.