Eh oui, samedi fut riche en émotions, en vrac on pourrait résumer l’événement en disant que :
- Amaury Vassili, notre représentant cocorico, avait manifestement oublié de se laver avant l’émission,
- de nombreuses chanteuses ont tenté un revival Céline Dion sans succès,
- certaines avaient feu à leur protège slip et se sont senti obligées de bouger très vite pour éteindre les braises,
- l’Irlande n’a pas gagné, faisant saigner mon coeur à jamais.
C’est aussi ça l’Eurovision : sentir que la France n’a aucun voisin, découvrir des pays inconnus, pester contre le mauvais goût des Européens, voir comme tous les ans que le Français est favori et puis en fait… ah beh non c’est pas encore pour cette année, et enfin se rendre compte que l’amour du Vieux Continent pour le kitsch et le mielleux est toujours au rendez-vous.
Cependant, on a tendance à oublier dès le lendemain les chansons qu’on a écoutées religieusement pendant toute une soirée. Petit retour rapide sur le best-of du pire, du meilleur ou du kitsch estampillé 100% Eurodance des années 2000, puisque France 3 lors de ses rétrospectives a l’air de croire que l’eurovision est un spectacle obscur qui s’est déroulé quelque part entre les années 60 et 70. Promis, on a laissé Marie Myriam chez elle.
2002 – L’ovni grec
Les grecs font presque toujours l’effort de chanter dans leur langue (ou au moins une partie de la chanson), et d’intégrer quelques éléments folkloriques. Parfois c’est réussi, avec le sirtaki endiablé de Sakis Rouvas en 2008 (qui se bougeait le boule sur « Shake it »), et parfois on a un peu peur. C’est le cas en 2002 avec : des costumes de scènes trop enclins à la sudation excessive (m’est avis que ceux-là ne faisaient pas du fromage, mais carrément une production européenne de féta), un chanteur qui a du mal à maîtriser sa voix, une chanson high-tech étrange et un accent grec sur les paroles en anglais. Pour info, sagapo veut dire « je t’aime » en grec, histoire que vous captiez toute l’intensité dramatique de la chanson.
http://www.youtube.com/watch?v=3sp94nRuwpo
2002 – De la Suisse, naturellement
La Suisse participe peu à l’Eurovision. Comprenez par là, les candidats passent rarement l’épreuve cruelle de la demi-finale. En 2004, miracle, la suissesse est sélectionnée et chante… en français. La langue de Molière rend l’épreuve casse-gueule, mais les paroles sont carrément dignes d’un poème de Maurice Carême. « Dans le jardin de mon âme », ôde à la métaphore littéraire de haut niveau, se plantera dans le classement, mais laissera aux étudiants de lettres un bel aperçu de l’inutilité de leur diplôme : retrouver des polyptotes et des épanadiploses dans ce fleuron musical. (non, je déconne, y’en a pas).
http://www.youtube.com/watch?v=R__UlckcOY4
2007 – la Turquie sans Tarkan
Soyons clairs : la Turquie sans Tarkan, c’est un peu comme un américain sans frites ; on sent que ça veut copier mais y’a un truc qui manque. La Turquie, qui nous présente des rockeurs depuis quelques années, s’est d’abord lancé dans l’entreprise de la musique dance/pop, qui n’est pas sans rappeller la vague Rai’n’B fever de quand tu étais jeune et que tu chantais toi aussi « Sobri le destin ». « Shake it up shekerim » se lance donc dans un exercice périlleux : c’est sympa, ça se danse facilement, je tamponne le Kitsch de la victoire et l’accent à couper au couteau.
2007 – L’Ukraine appelle les martiens en renfort
J’avoue, l’année 2007 fut particulièrement difficile : la Serbie gagne avec une chanson larmoyante ce qui me fait douter de la véracité du concours, tandis que l’Ukraine rate la victoire de peu. Tout y était : le costume délirant, le rythme qui reste dans la tête, les paroles faciles et la scénographie du tonnerre. L’eurodance a perdu là un grand vainqueur, et l’Eurovision reste marquée à jamais du passage du martien chantant les chiffres allemands.
Preuve flagrante que l’Europe ne sait pas récompenser les Justes.
http://www.youtube.com/watch?v=T9rJLtz64Hg
1998 – La France et sa chanson confession
En 1998, back to basics : la France tente une énième fois une chanson qui se classera tout au fin fond de la grille de points. Ok, le rythme est bof, la chanteuse est motivée mais celle-ci retournera malheureusement à son anonymat après cette émission. D’ailleurs, les paroles sonnent comme un aveu : décidément, depuis des décennies, la France ne sait pas où aller. Sinon, comment expliquer l’enchaînement Jessy Matador/Amaury Vassily ? Les autres pays doivent encore en rire, puisque la pauvre se prendra un bide monumental avec… 3 points. Heureusement, retour de Karma quelques mois plus tard, puisqu’on gagnera la Coupe du Monde.
http://www.youtube.com/watch?v=liapNXJT9n8
2008 – Golden shower, anyone ?
Petite tricherie : ce morceau était présenté par la Suisse en 2008 mais n’a malheureusement jamais passé la demi-finale. Collector tout de même, il réunit une chorégraphie au top, des paroles un peu cucul comme on aime (l’Eurovision aime les chansons d’amour et les papillons dans le ventre), et le sérieux du chanteur est un peu… déconcertant. Ses jambes ont l’air un peu trop encombrantes pour lui et se sent obligé de faire des élongations pour se détendre les articulations, pendant que le ventilo tente de lui décoller la mèche.
2003 – Encore une célébrité qui foire
Les « people » qui participent à l’Eurovision ne gagnent jamais. Preuve avec les Blue samedi pour la Grande Bretagne, qui malgré leur pectoraux et abdos apparents et les cris aigus d’I can, n’ont même pas intégré le top 3. En 2003, Tatu essayait désespérément d’arracher le prix pour la Russie, et quelques années plus tard, un Lou Bega lippu tentait la même prouesse pour sa contrée germanique. Rien, nada, peau de zob : aucun n’a réussi à sauver l’honneur de sa patrie. Je ne parle même pas de Patricia Kaas cuvée France 2009, je ne suis pas sadique.
L’Eurovision, c’est donc la communion des peuples, le seul soir où tu peux délibérément te lâcher sur le mauvais goût de tous les pays et réviser ta géographie (on est d’accord pour dire que c’est un peu le bordel depuis la chute de l’URSS), entendre les présentateurs français rire nerveusement devant le bide du poulain de notre écurie, et assouvir tes penchants pour la variété. Parce que je suis sûre que toi aussi samedi tu as trouvé que le Roumain faisait bien l’amour à la caméra. Et que le petit Finlandais avait bien besoin que tu le dévergondes.
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Les Commentaires
C'est vrai, c'est tellement kitche! Et enervant, parce qu'ils reconnaissent jamais les bonnes choses!