Au tout début de l’été, quand nos coeurs étaient plein de sable et nos peaux couvertes d’écran total, j’avais écrit un premier papier sur une liste de regrettés groupes de mots que nous n’entendrons plus jamais tant ils ne peuvent plus être d’actualité. Depuis, d’autres phrases de ce genre me sont revenues en tête. Listons-les donc ensemble, dans la joie, la bonne humeur, l’allégresse et tant d’autres synonymes du terme bonheur.
« Tu l’as pris en quelle couleur ton Ola ? »
Je sens que je suis en train de perdre les plus jeunes d’entre vous : les téléphones Ola furent parmi les tout premiers mobiles et virent le jour à la deuxième moitié des années 1990. Le Ola est en quelque sorte le petit frère du Bibop (une cabine téléphonique sans fil) et du Tatoo (une sorte de bipper avec un physique de tamagotchi).
Les téléphones Ola avaient pour particularité d’être relativement petits et fins en comparaison à leur aîné, étaient disponibles dans des couleurs pastels et réservés à une clientèle de jeunes gens actifs. Disparu de la vente au tout début des années 2000, le Ola n’aura jamais eu le temps de grandir. C’est dommage, parce que sa toute petite antenne lui donnait un charme certain.
« Je peux jouer à Snake sur ton Nokia ? »
À la fin de l’année 2000 est sorti le Nokia 3310 ; rares étaient dans mon établissement scolaire les élèves à en avoir reçu un pour Noël. Pourtant, quand j’ai réalisé qu’une de mes camarades de classe en avait fait l’acquisition, je me suis jetée dessus, grillant sa batterie pour jouer à Snake. Le serpent est le jeu le plus minimaliste depuis Pong (c’est-à-dire que l’étape juste en dessous, c’est le pixel mort, vous voyez). Le principe était des plus simples : il fallait faire sortir le serpent de l’écran sans jamais l’écraser contre les murs.
Il y a fort à parier que le Snake était la raison qui faisait que les préadolescents aimaient recevoir un téléphone portable. En disant ça, réalisant que, désormais, les premiers téléphones qu’ont les enfants sont des smartphones, j’ai l’impression d’avoir grandi à un temps où l’eau courante n’était pas très répandue et que personne n’était raccordé au tout-à-l’égout.
« Et alors là, y a eu une coupure de courant et j’ai perdu ma partie d’Alex Kid. »
Sur les premières consoles de jeux vidéo, il était impossible de sauvegarder sa partie en cours : si on perdait, on devait tout recommencer depuis le tout début du niveau
. Rappelez-vous de l’immense frustration ressentie quand, alors que vous vous apprêtiez à terminer un niveau, vos parents venaient éteindre la console parce que « Ça fait une heure qu’on t’appelle pour manger« .
Rappelez-vous des larmes qui vous montaient alors à la gorge et aux yeux, ce dépit, ce désespoir, cette impression d’être maudite par la vie. Rappelez-vous de cette souffrance, et savourez 2012.
« J’ai craqué : je me suis encore acheté des Stan Smith »
Cette phrase, c’est simple : nous ne l’entendrons plus puisque la Stan Smith n’est plus commercialisée pour de sombres histoires de mondialisation. Tristesse sur nos pieds. Mycose dans nos coeurs.
« Tu me files ton MSN ? »
Il fut un temps où la deuxième instance de socialisation avec une personne nouvellement rencontrée consistait à lui parler sur MSN. La vie et les rapports relationnels étaient à l’époque plus simple encore qu’une recette de tartine au beurre. Il suffisait de discuter trente secondes avec une personne, de lui dire « file-moi ton MSN » et de lui parler pendant des heures, établissant ainsi une complicité certaine. À moins que vous n’appréciez pas la personne et décidiez de la bloquer. C’était simple, MSN… Alors certes, on a Skype, mais c’est plus pareil. C’est moins coloré, c’est plus… Adulte. Facebook ? N’en parlons pas : il faut décider dans quelle liste on met les nouveaux arrivants pour filtrer ainsi certaines photos et quelques statuts qu’on ne voudrait pas qu’ils voient.
Alfrédette a d’ailleurs fait l’éloge de ce formidable outil de communication qu’était MSN, et je ne puis qu’approuver ses belles et sages paroles.
« Et maintenant, Sylvain Mirouf ! » (Michel Drucker après vérification sur ses fiches)
Sylvain Mirouf était un bien médiatisé magicien dans les années 1990. En ces temps anciens, Laurent Gerra et Virginie Lemoine faisaient rire les gens, Michel Drucker n’avait pas encore perdu sa vénérée chienne Olga et on payait encore en francs. Après avoir partagé ses tours de passe-passe tous les dimanches sur l’écran de la télévision familiale, Sylvain Mirouf a disparu du show-biz et fait désormais partie de ce clan d’anciennes personnalités publiques qui sont tombés dans l’oubli. Alors je me suis dit qu’aujourd’hui, on pourrait rendre hommage à sa gloire perdue. Big Up, Sylvain. Nous t’avons complètement zappé ne t’oublierons jamais.
Et vous, quelles sont les phrases qui vous rendent tristes quand vous pensez que vous ne les entendrez plus jamais ?
Écoutez Laisse-moi kiffer, le podcast de recommandations culturelles de Madmoizelle.
Les Commentaires
Oh mais oui, ça cartoon