Précédemment dans #62jours : Je veux être puissante, pour gravir des montagnes
Parfois, j’oublie que ça fait peur. Les responsabilités m’écrasent. C’est la gravité, ça te tire vers le bas et la peur agit comme un poids. Alors ça t’écrase encore plus et ça te demande davantage d’efforts de relever la tête, de continuer à avancer.
La peur nourrit la peur, alors c’est de plus en plus lourd. Bientôt, tu peux plus mettre un pied devant l’autre tellement ça t’appuie sur les épaules, le dos, ça t’enserre la poitrine, ça comprime les poumons.
La pression t’étouffe, puis tu ne respires plus.
Ma peur est un paralysant… et un stimulant
Parfois j’oublie que la peur a cet effet toxique et paralysant. Et d’autres fois, je me rappelle qu’elle peut aussi procurer un effet stimulant, enivrant, grisant. Souvent, la différence entre les deux, c’est juste une question d’état d’esprit.
Alors je me rappelle que la peur existe pour que mon cerveau soit en état d’alerte, parce que j’ai besoin d’être à 100%.
Si je ne bouge pas, si je ne fais rien, c’est comme si je me laissais paralyser : puisque je refuse de prendre l’initiative, mon cerveau prend celle de m’immobiliser. C’est plus sûr. Si on reste sur place, il ne peut rien nous arriver.
Mais c’est faux, bien sûr. Ou plutôt, y a un peu de vrai : il ne peut rien m’arriver. Le bad, vraiment. Parce que je ne veux pas d’une vie où il ne va rien m’arriver !
Alors il faut que j’accepte le risque. Et l’annonciatrice du risque, souvent, c’est la peur.
Parfois j’oublie que la peur est aussi un stimulant. C’est juste à moi de le décider et d’agir en conséquence, sans me laisser paralyser.
Ma peur et moi : une relation ambigüe
J’ai pas peur du noir. J’ai peur de pas être à l’heure à un rendez-vous. J’ai pas peur d’un accident d’avion. J’ai peur en voiture. J’ai pas peur des serpents.
Ma peur et moi, on a une relation ambigüe. Elle peut être ma meilleure conseillère, comme ma pire ennemie.
Elle me sauve la vie quand elle me file le vertige aux abords d’un précipice. C’est elle qui canalisait, enfant, mes envies d’envol en me coupant le souffle à l’approche des falaises.
Mais quand elle me retient d’envoyer un message, de prendre la parole, elle me bride, elle me fauche, elle m’enferme dans des limitations trop étroites pour mes ambitions.
Ma peur m’inhibe, elle sert à ça, j’imagine. Mais trop souvent, je m’en sers comme d’une excuse pour ne pas élargir mes horizons.
Si je l’écoutais, je ne tenterais jamais rien de nouveau. Je ne m’aventurerais jamais vers l’inconnu, parce que par définition, ça me fait peur.
Ma peur est un fauve qui me broie les tripes
J’ai pas peur de l’échec. J’ai peur de ne pas être à la hauteur.
Ma peur est comme un animal sauvage qui ronronne dans ma poitrine et me maintient en sécurité. Elle rugit et me mord les entrailles lorsque je l’ignore ou que je me mets en danger, selon elle.
Mais ma peur fait partie de moi, je ne peux pas m’en affranchir, et même si je le pouvais, je ne suis pas sûre de le vouloir. Elle me garde les pieds sur terre.
Ma peur est une panthère aux yeux de jade, et le feu de ses yeux se reflète au fond des miens lorsqu’elle hurle contre une menace imminente. Les cris qui viennent de mes entrailles sortent des siennes.
Face à ma peur, j’ai le choix de prendre l’ascendant
J’ai deux choix, face à ma peur : la dompter, ou être domptée par elle. Ça a souvent été le deuxième cas de figure mais je ne m’en veux pas. J’en mènerais pas large face à une panthère qui montre les crocs en grognant.
Aujourd’hui, je décide de changer, je ne veux plus être esclave de ma peur, je veux la dominer. Je veux regarder la panthère dans les yeux même lorsqu’elle plante ses dents dans mes tripes pour me faire réagir.
En m’écoutant, je me rends compte que je suis plus forte que mes peurs. Je les ai toutes dépassées. Même si ça a pris du temps.
Ma dernière fierté, c’était ma peur de l’eau, ou plutôt des grandes étendues d’eau dont on ne voit pas de fond.
Je me souviens des mouvements que faisait la panthère au creux de mon estomac la première fois que je suis descendue, en plongée, « dans le bleu ».
Je me souviens du vertige qui m’a pris, des nœuds dans les boyaux, de la gorge serrée, du souffle coupé face au « vide », l’impression d’un bleu sans fond.
Et je me souviens aussi des ronrons de plaisir que faisait la panthère lorsque je descendais, en respirant calmement, fermement, mais apaisée.
Ma peur me rend plus forte
J’ai pas peur de ce qui pourrait m’arriver. J’ai peur de rater un truc qui pourrait m’arriver.
Ma peur, c’est ce qui me rend invincible, puisque j’ai moi-même la clé pour dépasser mes propres limites.
J’ai une panthère dans la poitrine. Qu’est-ce que tu vas faire ?! Si tu me cherches, je te la lâche dessus. Moi je ne la crains plus, j’ai appris à communiquer avec elle.
Parfois j’oublie que la peur est grisante, quand je décide de ne plus la laisser m’étrangler, et que je me sers de son poids pour garder les pieds sur terre.
Comme le doute, la peur n’est pas mon ennemie. Elle peut même être une puissante alliée, si j’ai la patience de l’apprivoiser.
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