L’adolescence, c’est pas toujours la joie. Je veux dire, c’est une période qui est, pour la plupart des gens, vachement forte en émotions, parfois très positives… et parfois l’inverse. Personnellement, pendant la mienne, j’ai eu l’impression de faire un grand 8 émotionnel super vénère. Mais comme j’aime bien les grands 8, je précise que j’avais l’impression de faire un grand 8 sans pause, alors que j’ai pas mangé en me levant, que j’ai pas dormi depuis huit semaines et que je sors d’une gastro. Pour que tu te fasses une idée.
Un grand 8 chiant, quoi.
Mais quand même, y avait des valeurs sûres : des petits bonheurs tout simples qui remplissaient mon coeur à l’hélium, et me donnaient l’impression d’être toute légère, plus légère qu’une plume, ou qu’un pet, ou qu’un pet de plume. C’est une sensation de plénitude très forte, et ces petites joies, je leur sautais dessus vu que le reste du temps, je le passais à tenir la chandelle en regardant mes potes rouler des pelles à leur mec.
La joie du prof absent
J’ai eu des profs coriaces en terme de santé (et j’en suis, sans second degré aucun, tout à fait ravie). En plus de ça, mes établissements scolaires n’étaient pas situés dans des grandes villes aux artères bouchées : aucun-e d’entre eux, donc, ne se retrouvait coincé-e dans les transports.
Du coup, il ne m’arrivait que très rarement de ressentir cette joie intense d’apprendre que le prof venait pas. Alors ça m’a marquée. C’est une sensation indescriptible.
Ça commence par dix minutes d’attente devant la porte de la classe. Dix minutes pendant lesquelles les esprits s’échauffent, entre ceux qui préfèrent rester pessimistes pour pas être désagréablement surpris (« j’suis sûre il est seulement en retard »), et ceux qui veulent très fort croire que l’enseignant•e a chopé une petite gastro, par exemple. Rien de méchant, hein : même les profs qu’on n’aimait pas trop, on n’avait pas envie de savoir qu’ils souffraient pour de vrai, c’est pas parce qu’on a les hormones qui jouent au con qu’on est des monstres, dites.
En fait, je sais même pas pourquoi on était si contents d’apprendre que notre prof n’était pas là, parce que jusqu’au lycée, on était obligés d’aller en permanence à la place, et qu’écrire des messages d’amour qui se terminent sur « Big Bisous Bien Baveux » dans les agendas Diddl des copines, c’est sympa cinq minutes mais c’est vite chiant.
Deux paquets de biscuits qui tombent à la machine
Y a des gens, ils ont drôlement pas de chance avec tout ce qui touche aux distributeurs de bouffe : ils ont toujours le numéro du petit tortillon qui ne fonctionne pas. Ou du paquet de Skittles qui se retrouve coincé par l’angle dans la machine. Et là, t’as l’air bien con, il ne te reste qu’à t’éloigner en espérant que personne n’a vu à quel point t’as été flouée par la vie.
Et puis y en a d’autres qui ont trop de chatte, si je puis me permettre l’expression : bien souvent, ce n’est pas un mais deux friandises de leur choix qui chutent en même temps.
Ça m’est arrivé, une fois, au distributeur dans la cour du collège, et j’ai crié de joie. Du coup j’ai eu un peu l’air stupide en expliquant la raison de ma liesse (« bah j’ai voulu une gaufre et j’en ai eu deux »), et ça c’était moins facile à gérer, surtout qu’on m’a répondu « comme si t’avais pas déjà un gros cul ». J’espère qu’aujourd’hui, ces gens sont frappés par une malédiction et que tout ce qu’ils mangent a un goût d’anchois pas frais.
Ce que j’ai envie de faire à la machine quand elle me donne deux paquets de biscuits. (Not safe for work)
Le dernier jour d’école
Le dernier jour d’école avant les vacances d’été, à l’école primaire ou au collège, n’était pas obligatoire : il était même totalement inutile. Mais on était beaucoup à y aller quand même. Parce que de toute façon, on allait pouvoir kiffer plus de quarante grasses mat’ alors se lever aux aurores une dernière fois avant de ne (presque) rien foutre, c’est pas bien grave.
Surtout, ce jour-là, on ne foutait absolument rien en cours. On jouait aux jeux de société, on faisait des petits bacs, on dessinait des trucs sur le tableau, mais on le faisait avec toute la classe et nos profs. C’est d’ailleurs à ces occasions que j’ai réalisé que ces derniers étaient humains : une fois passée la barrière de la pédagogie et de l’autorité, on réalisait, une fois dans l’année, qu’ils étaient cool, qu’on pouvait leur parler de plein de trucs, et qu’il faisait bon les avoir dans notre équipe au Trivial Pursuit.
Se percer un bouton
Y a pas grand-chose que j’ai plus haï, dans ma vie toute entière, que l’acné que je me tapais à l’adolescence (et que je me coltine toujours un peu aujourd’hui, alors que vraisemblablement j’ai soixante-cinq ans vu que je viens d’écrire « coltiner » de façon très premier degré). Le seul truc que j’ai détesté encore plus, c’est probablement le monde entier (quand j’ai eu une rage de dents) et mon traitement de texte (chaque fois qu’il « a quitté de manière imprévue, voulez-vous envoyer un formulaire de signalement ? »).
Mais l’acné avait du bon : les séances de perçage de boutons. Déjà parce que je me sentais tellement rebelle et anticonformiste, à aller à l’encontre des recommandations de ma dermatologue. Mais surtout, surtout, jparce que ‘aimais la sensation de soulagement, de fierté, et de fascination dégoûtée. Ceux qui me rendaient la plus heureuse du monde étaient les mêmes qui me demandaient de longues minutes de tâtonnements avant de daigner me faire part de leur pus. C’était comme une offrande de l’adolescence à moi-même, comme un cadeau.
Voilà au moins une joie que Lizzie gnagnagna « je ne connais pas les croûtes » McGuire nous a laissée.
Et puis en plus, c’était rigolo quand ça giclait sur le miroir.
Chpouik. Les gens essayaient de me foutre les boules en me disant que si j’en perçais un, il en repousserait dix autour, mais je suis pas un panda de six semaines, hein : on me la fait pas, à moi, avec les légendes sur la beauté.
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Mention spéciale à l’arrachage de croûtes de bouton à l’agonie : ça piquait un peu et je nettoyais la plaie avec ma salive. Ça piquait encore plus, mais j’aimais bien. Est-ce sale ? J’ai l’impression que c’est sale. Je. Je réalise que j’avais jamais dit ça à personne. Je me sens nue.
Et toi, c’était quoi, tes petites joies préférées de l’adolescence ?
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