Ballerines, tregging, bootcut ou slim, ça te parle. Bref, tu gères un mimimum le vocabulaire vestimentaire et la différence entre les escarpins et les tongs, ce qui est relativement utile au quotidien.
Mais il serait dommage de s’arrêter là. Le lexique de la mode fourmille de termes complètement incongrus que je te propose de découvrir. Voici comment décrypter ces répliques que tu pourrais (ou aurais pu) entendre un jour.
« J’ai fait les soldes mais je suis tristesse : il n’y avait plus de cotehardie à ma taille. »
Après la côte de boeuf et la côte d’Azur, voici donc la cotehardie. Celle-ci n’a rien de bien graveleux, puisque c’est une robe que portaient les femmes du Moyen-Âge par-dessus leurs robes et par-dessous leur chasuble.
La cotehardie avait des manches longues serrées, descendait jusqu’en bas du corps et était boutonnée ou lacée. Si on y rajoute toutes les couches que devaient mettre les nanas pour ne pas se peler dans les châteaux d’antan, la cotehardie participait grandement à la technique dite de l’oignon.
« Hé Marcelle dis voir, passe-moi le tuyau-de-poêle. »
Malheureuse, repose donc le tube de métal que tu as vivement agrippé ! Le tuyau de poêle n’a pas d’accointances avec le BTS plomberie ni d’affection particulière pour ta caisse à outils.
C’est tout simplement le nom d’un chapeau très proche du haut-de-forme, mais un peu moins haut quand même, qui a fait surface au début des années 1870. Ça paraît tout de suite moins étrange que d’aller se coller un tuyau sur la tête, on est bien d’accord.
« La semaine prochaine, avec les copines, on fait un atelier de découpe de crêpe Georgette. »
Ni pâte, ni sucre, ni blague des Bronzés font du ski : le crêpe Georgette n’a rien, mais alors rien à voir avec sa plus que lointaine cousine la crêpe Suzette.
Le crêpe Georgette n’est pas comestible (du moins pas à ma connaissance), puisqu’il s’agit d’un type de tissu. C’est un dérivé du taffetas, qui est tissé très serré avec de la soie dont les fils sont teints. Son petit truc en plus, c’est qu’il est légèrement granuleux sous les doigts.
Son nom un peu chelou, il le doit à une certaine madame Georgette de la Plante, une créatrice de mode parisienne qui l’a rendu populaire au XIXème siècle. Comme dirait Maxime : « on choisit pas ses parents, on choisit pas sa famille ».
« Marco, bien que j’apprécie ton slip de bain à pois roses, je te suggère vivement d’adopter le mankini. »
Si tu as failli demander un mankini dans le bar du coin en pensait qu’il s’agissait d’un cocktail un peu plus chargé en Martini que le Mojito, tu as bien fait d’hésiter.
Je n’ai pas réussi à retracer la piste exacte du mankini, mais il semblerait que ce maillot de bain d’un goût plus que douteux a été popularisé par Borat, le journaliste kazakh complètement azimuté interprété par Sacha Baron Cohen.
Le mankini offre une couverture de l’épiderme masculin plus que réduite, puisqu’il se présente comme un string banane avec deux bretelles, exclusivement réservé aux mecs. Un modèle très porteur, assurément.
« Où est donc ce cher sergé ? »
Il aurait pu être un prénom méditerranéen qu’auraient donné à leur enfant des parents particulièrement friands de Serge Lama.
Mais le sergé est en réalité une armure de tissage, c’est-à-dire une façon de tisser les fils pour qu’ils forment des lignes obliques sur le tissu. Ne le cherche pas sur tes t-shirts en croisant tes globes oculaires, il est en général utilisé pour les jeans.
Par contre, un tissu fait de laine en sergé s’appelle le Serge. Tant de mots, ça a de quoi rendre malade, complètement malade. Et pour le manteau de madame, ce sera plutôt Reggiani ou Gainsbourg ?
« Dis donc Germaine, j’ai la goutte au nez, tu ne sais pas où j’aurais mis mon réticule ? »
Certes, le réticule a un nom d’engin de torture pour raccourcir des cuticules qui auraient poussé aussi vite que du gazon Géant Vert. Mais encore une fois, circulez, il n’y a rien à voir.
Le réticule est le it-bag qui faisait un carton aux XIXème et XXème siècle. À l’époque où les robes sont devenues plus fines et donc moins pourvues en poches, ce petit sac directement inspiré de l’Antiquité romaine était trimballé par les nanas dans toutes leurs sorties. Rond, carré, en soie ou en tapisserie, c’était un peu le kit de survie lorsque tu étais au bord de l’évanouissement. Remarque qu’il ne fallait pas être trop mal quand même, puisque le réticule ne pouvait pas contenir plus d’un mouchoir ou un flacon de sels.
« Quand je pense qu’elle m’a dit que j’avais minci, alors que j’ai juste enlevé mon vertugadin. »
Non, cette meuf n’a pas perdu sa ceinture de vertu et ce n’est pas non plus une insulte un peu désuette. Le vertugadin est un accessoire totalement WTF qui a eu son petit succès au XVIème et XVIIème siècle.
Il s’agit d’un espèce de bourrelet monté sur une armature arrondie, que les femmes se mettaient autour de la taille sous la jupe. Tu te demandes peut-être où est le glamour dans le fait de rajouter à ta tenue une poignée d’amour artificiel qui ressemble à un coussin d’avion. Et bien ça servait tout simplement à faire donner du volume à tes hanches pour que ta jupe aie la forme d’une cloche (et toi aussi, un peu).
« Si tu viens samedi, prends tes galoches, pour danser ça sera plus fastoche ! »
Si tu penses que
la galoche a un quelconque rapport avec le verbe qui désigne l’entrée en contact humide et visqueuse de ta cavité buccale avec celle d’un-e inconnu-e, ne te fourvoie pas. Non pas que la galoche soit nécessairement liée à une partie du corps beaucoup plus hygiénique, mais elle serait plutôt plus proche de tes orteils que de tes gencives.
Ce terme qui-a-l’air-argotique-mais-pas-vraiment désigne une chaussure dérivée du sabot. La galoche est en cuir, elle a une épaisse semelle en bois, en érable ou en hêtre, dans laquelle sont plantés des clous mastocs. En fait, elle est tellement énorme qu’on la met carrément par-dessus un chausson.
« Il est carrément pur, ton Johdpur » (oui, c’est la fin pour les blagues aussi)
Voilà peut-être le mot le plus facile de cette sélection. Il est fort probable que tu aies croisé le Jodhpur dans ton enfance, même si tu n’as jamais mis un dixième de voûte plantaire à Bollywood.
Alors oui, le Jodhpur est bien originaire de la ville du même nom en Inde. À la base, c’est un pantalon élargi aux cuisses et resserré au genou qui est porté pour faire du cheval-c’est-trop-génial. Il a ensuite été rapporté par les officiers anglais, puis a conquis le coeur des joueurs de polo, avant d’atterrir dans le joyeux monde de la mode.
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Les Commentaires
J'entends ça depuis que je suis petite et je pensais que ça s'écrivait tuyaux de poils et vous imaginez ce que peut être un tuyau avec des poils...
Mon dieu... Je suis tellement débile !