Autant le dire de suite : Perdu de vue de Thomas Lélu n’a pas vraiment des bonnes critiques. Petit OVNI narcissique, ce livre mérite tout de même qu’on y prête un peu attention. Pourquoi ? Parce que finalement, ce livre, tout le monde aurait pu l’écrire.
Un roman très rapide
L’intrigue du roman tient en deux ou trois phrases : Oscar Lélu a un souci de carte d’identité et est convoqué au commissariat. Oscar va devoir prouver qu’il est bien lui-même. Oscar essaye donc de montrer qui il est. Voilà la coeur du récit : Oscor décompose son identité du mieux qu’il peut. Le récit est donc très rapide, puisqu’il s’agit d’un monologue. Un après-midi suffit à terminer le roman, que l’on peut lire « en temps réel »
: il n’y a pas de saut dans l’histoire, seulement la parole directe du narrateur. A la fin de son monologue, l’histoire prend fin également, tout comme notre lecture. Le roman donne alors la sensation d’avoir assisté à son monologue, de l’avoir vécu en même temps que les inspecteurs de police du commissariat.
Un roman narcissique
Oscar Lélu est, bien entendu, un double de Thomas Lélu. L’identité d’Oscar va être prouvée à l’aide d’anecdotes, de détails qui peuvent paraître insignifiants. Ces souvenirs mélangent à la fois fiction et réalité (nous pouvons penser que certains viennent directement du passé de l’auteur), faisant alors du roman une sorte de confession, de mémoire sur papier. Cependant, le roman n’a rien d’une autobiographie : il ne s’agit pas de retracer une vie, mais d’en extraire des passages plus ou moins percutants. Tout l’enjeu de la lecture est alors de classifier les événements : est-ce que l’être humain se construit avant tout grâce les grands changements ou au contraire sur l’enchevêtrement de détails ?
Un roman miroir
Au terme de la lecture, chacun est amené à réfléchir sur soi-même : qu’est ce qui « fait » mon identité, au bout du compte ? D’un point de vue rationnel, la carte d’identité décline justement l’identité de son porteur. Le roman permet de nous montrer qu’au delà d’un statut légal, l’identité est finalement un concept un peu flou à démontrer. Comment prouver aux autres que je suis moi et que vous êtes vous ? Au bout du compte, toutes nos actions finissent par nous définir, mais aussi paradoxalement notre capacité à surmonter ces actions, à les « oublier ». Au terme de ce monologue, nous pouvons désormais commencer le nôtre : c’est donc un roman qui nous met face à notre propre vie, à notre propre définition de l’identité.
C’est donc un livre d’apparence extrêmement superficiel et très rapide, mais qui peut nous montrer à quel point l’identité est un terme que nous ne contrôlons pas tout à fait. Pour certaines, ce roman ne sera que divertissant. Pour d’autres, ce roman vous ouvrira les portes pour décoder quels événements vous déterminent. A chacune de s’en faire sa propre idée.
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