Depuis quelques années, les questions féministes fleurissent dans le monde de la bande dessinée. De nombreuses BD particulièrement cools interrogent et éduquent les lecteurs et lectrices sur ces questions, que ce soit sur Internet ou dans les librairies.
La BD et le féminisme
Par exemple : Les Culottées, de Pénélope Bagieu. Cœur cœur cœur. Vous pouvez aussi lire – par exemple – tous nos articles sur Mirion Malle ou sur Le Projet Crocodile.
Du côté des professionnel•les, le débat sur l’absence des femmes pour le grand prix du Festival d’Angoulême 2016 a été l’occasion d’attirer l’attention sur le sexisme ambiant et a permis d’entamer une réflexion – ainsi que des actions – sur la présence des femmes dans ce milieu.
Il reste toutefois encore beaucoup de travail à accomplir, notamment dans la prise de conscience des manifestations plus ou moins insidieuses du sexisme, et de la violence que celles-ci représentent pour les autrices.
Paye ta bulle, une initiative collective
Dans un métier où les femmes sont en minorité (12% à 27% selon les organisateurs ou la police les sources), mais aussi où l’on travaille généralement seul•e chez soi ou, au mieux, en atelier, il est parfois difficile de faire entendre sa voix.
C’est à partir de ce constat qu’est né et a grandi Le Collectif des Créatrices de Bande-Dessinée contre le Sexisme… Ou BDégalité, pour les intimes.
Lancé à l’origine par Julie Maroh (l’autrice, notamment, de Le Bleu est une couleur chaude) suite à une énième exposition intitulée « La BD des filles », celui-ci compte aujourd’hui 230 autrices environ. Il s’agit d’un outil de veille, de dénonciation, d’actions communes, mais aussi de soutien entre autrices.
Et pour en être moi-même membre, je peux vous dire que c’est une initiative salutaire.
À lire aussi : BD Égalité, le collectif des créatrices de bande dessinée contre le sexisme
Une BD d’Aurélia Aurita, sur… le sexisme dans la bande dessinée !
C’est ce même collectif qui a lancé la page Paye ta bulle, hébergée directement sur son site internet. Si la compilation de témoignages existait dès le lancement de BDégalité, elle a néanmoins récemment eu droit à un vent de « fraîcheur » (fraîcheur nauséabonde, on va dire) (oui, c’est un oxymore) (j’ai fait L), avec l’ajout de nouvelles participations.
S’y succèdent des récits très variés, rapportant les comportements d’auteurs, ou encore d’éditeurs, d’organisateurs de festival, allant du harcèlement à l’agression, en passant par l’insulte misogyne.
Capture d’écran de Paye ta bulle
À l’origine de ce regain de vigueur (j’ai fait L, je l’ai déjà dit ?), deux facteurs : d’abord le Festival d’Angoulême 2017 qui a certainement été pourvoyeur d’anecdotes, mais également un passage bien précis d’un article du site Konbini, sur la place des femmes dans le milieu de la BD.
Christophe Blain, auteur reconnu et respecté, y prend la parole en ces termes :
« Christophe Blain ne déplore qu’une simple « maladresse » de la part de l’institution. Il dément de façon véhémente toute rumeur de sexisme chez les professionnels du neuvième art :
« Il n’y a aucun machisme dans la bande dessinée, aucun ! », tonne-t-il lorsqu’on l’interroge. »
Choquées par ces affirmations péremptoires, les autrices ont donc décidé de réalimenter et repartager la page, jugeant que le poids de leurs témoignages était la meilleure réponse à cette négation du problème.
Paye ton ras-le-bol du sexisme
En même temps qu’elle a été mise à jour, la page de témoignages a aussi adopté ce nom de Paye ta Bulle.
« Bulle »… Un mot bien choisi puisqu’en plus de désigner le phylactère (mot compte-triple), il peut aussi évoquer cette impression confortable qu’ont parfois les acteur•rice•s du monde de la BD d’évoluer dans une sphère à part, où tout va bien, et dont le sexisme serait absent.
Le choix de ce nom est aussi une manière de s’inscrire dans la lignée des nombreux Tumblr qui ont fleuri sous le modèle de Paye ta Shnek : Paye ta fac, Paye ta robe, Paye ton sport, Paye ton taf…
Et ces nombreuses déclinaisons montrent deux choses. D’abord, que le sexisme est malheureusement présent dans toutes les sphères de la société et qu’aucun milieu n’est épargné.
Mais aussi, qu’une véritable prise de conscience est à l’œuvre, que les mentalités évoluent, que les initiatives pour changer les choses émergent de toutes parts… et qu’on va donc dans le bon sens.
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