Parler d’argent, en France, c’est encore tabou. Pourtant, c’est un sujet passionnant, et par certains aspects… féministe ! Dans notre rubrique Règlement de comptes, des personnes en tout genre viennent éplucher leur budget, nous parler de leur organisation financière (en couple ou solo) et de leur rapport à l’argent. Aujourd’hui, c’est Pauline qui a accepté de nous ouvrir ses comptes.
- Prénom : Pauline
- Âge : 40 ans
- Métier : Aide soignante en Suisse, en CDI à 60%
- Salaires mensuel : 2 600€ net par mois, et 650€ de revenu locatif
- Lieu de vie : Un appartement, en France, dont elle est propriétaire et qu’elle partage en colocation
Les revenus de Pauline
Depuis bientôt deux ans, Pauline est aide soignante à domicile à Bâle, en Suisse. Un métier qu’elle occupe à 60% d’un temps complet, en CDI, pour une entreprise à but non lucratif, et qui lui rapporte 2 600€ net par mois. Ce salaire est largement plus avantageux que celui des aides soignantes sur le territoire français :
« Les salaires sont plus élevés en Suisse. Je ne pourrais plus travailler en France, où les conditions de travail sont difficiles et où le salaire est trop bas. Les conditions sont meilleures en Suisse, même si en tant que français on nous fait sentir que nous sommes des étrangers.
Le fait que je vive en France, où la vie est moins chère, me permet d’avoir une qualité de vie au dessus de la moyenne. Je suis très satisfaite de ma situation : en travaillant à 60% d’un temps complet, j’ai beaucoup de temps libre, mais je suis indépendante et subviens à mes besoins toute seule. »
En plus de son salaire, Pauline est propriétaire de deux appartements. L’un où elle vit en colocation, avec sa nièce qui lui verse un loyer de 350€ chaque mois, l’autre où elle ne vit pas, et qu’elle loue pour 300€ mensuels En tout, ses revenus s’élèvent donc à 3 250€ chaque mois.
Le rapport à l’argent de Pauline
Si Pauline se décrit comme une fourmi, son rapport à l’argent a beaucoup évolué dans le temps :
« Avant, j’avais beaucoup de dépenses que je considère aujourd’hui comme inutiles. Tout ce qui concerne l’apparence et la “taxe rose”, par exemple : je me lissais les cheveux et j’allais chez le coiffeur très régulièrement pour des brushings, j’avais des tas de produits de beauté différents, je m’achetais des vêtements… Je sortais beaucoup dans les bars, et en soirée. Et surtout, je ne tenais pas mes comptes ! »
Aujourd’hui, elle pose un regard très critique sur ces anciennes dépenses :
« J’ai arrêté de boire de l’alcool, donc je vais moins dans les bars. Je n’ai pas envie de payer un Coca 5€ ! Quant aux produits de beauté, et tout ce qui concerne la “taxe rose”, je n’en utilise plus autant. J’ai une crème de jour, j’attends que le pot soit vide avant de le remplacer, et c’est tout. »
Elle raconte vivre bien plus simplement depuis quelques années, pour concentrer ses finances sur des projets de plus grande ampleur. Après un tour du monde d’un an et deux ans à Bali, elle est revenue vivre en France il y a bientôt deux ans, et œuvre à se constituer un patrimoine.
Des projets immobiliers
Déjà propriétaire d’un petit appartement qu’elle loue pour 300€ chaque mois, elle est récemment devenue propriétaire d’un trois pièces où elle vit en colocation, à la frontière de Bâle, et a pour projet d’en acheter un troisième.
« J’économise un maximum pour devenir propriétaire de ces trois appartements en tout. Je traque scrupuleusement toutes mes dépenses, essaie de rentabiliser mes dépenses loisirs… Parfois, c’est un peu dur, mais c’est nécessaire pour atteindre les objectifs que je me suis fixés. »
En effet, Pauline n’a pas l’intention de garder son CDI éternellement. Elle envisage sérieusement une reconversion professionnelle, et un mode vie très différent de l’actuel :
« Mon projet est de me reconvertir en maîtresse-nageuse, de travailler 6 mois par an et vivre à l’étranger les autres 6 mois. »
Pour y parvenir, elle a à cœur d’économiser au moins 1 400€ par mois.
Les dépenses de Pauline
Pauline est childfree, et vit en colocation avec sa nièce. Pour l’heure, son premier poste de dépense se trouve dans ses courses alimentaires qui lui coûtent 200€ chaque mois.
« Je fais mes courses dans une enseigne de hard discount, le rapport qualité-prix y est très bon. Je sais que l’enseigne est stigmatisée, mais je m’en fiche totalement. »
Viennent ensuite des dépenses liées à l’appartement que Pauline vient d’acheter. Elle vient d’y faire des travaux pour lesquels elle a contracté un crédit à la consommation sur 8 ans, qu’elle rembourse à hauteur de 180€ par mois.
Ces modifications de son logement lui ont permis de reporter les échéances de son prêt, soit 750€ chaque mois qu’elle ne commencera à payer qu’en janvier 2023. Elle doit toutefois continuer à régler l’assurance et les intérêts de son prêt, qui représentent 150€ mensuels.
En tout l’appartement qu’elle habite lui coûte donc au total 330€ toutes les quatre semaines. À partir de 2023, cette somme passera à 930€ pour le remboursement de son crédit immobilier et celui de son crédit travaux.
Elle compte une enveloppe de 300€ pour ses factures courantes : 50€ d’électricité, 50€ pour son fournisseur d’accès à internet, 50€ de taxe foncière, et 150€ de charges de copropriété qui comprennent le gaz, l’eau, et les lieux communs.
« Je retire mon salaire en liquide en Suisse, et je le dépose à ma banque en France »
D’autres charges fixes s’ajoutent à ces dépenses. Ses frais bancaires d’environ 18€ par mois lui permettent d’avoir deux banques, une de chaque côté de la frontière :
« Je paie environ 15€ par mois pour mon compte suisse, sur lequel est versé mon salaire chaque mois. Je retire cette somme, choisis l’endroit où j’opère mon change pour qu’il soit le plus avantageux possible, puis la dépose sur mon compte français et la répartis entre mon compte courant et mon livret A. »
Elle paie aussi 10€ d’assurance habitation chaque mois, et 30€ d’abonnements — pour son téléphone ainsi pour que des journaux en ligne.
Ses impôts s’élèvent pour l’instant à 30€ mensuels mais vont augmenter bientôt puisqu’ils prendront en compte ses revenus d’aide soignante de l’an dernier. Elle prévoit un mois de salaire, soit 2 600€ par an. Sa taxe foncière devrait augmenter aussi, au vu de son achat récent.
Le fait qu’elle travaille en Suisse lui impose par ailleurs de payer une assurance maladie helvète à 270€ par mois.
« Je vis très simplement »
Elle décrit son mode de vie comme volontairement très simple. Elle se déplace quasi-exclusivement à vélo, ce qui n’occasionne presque pas de frais de transports, et optimise ses dépenses plaisir :
« J’achète très rarement des vêtements, et quand c’est le cas, je passe par Vinted. Quand j’ai envie de me faire plaisir sur la nourriture, j’utilise des applis anti gaspillage comme Too Good To Go plutôt que d’aller au restaurant, ou celles qui proposent d’être client mystère en restaurant. Ce sont mes petites combines histoire de me faire plaisir pour moins cher !
Je ne souhaite pas avoir d’objets dont je n’ai pas l’utilité. À Noël, je recycle mes cadeaux en offrant ceux qu’on me donne, j’attends que Pâques soit passée pour acheter des chocolats en réduction pour offrir… »
Elle compte 322€ par mois pour ses loisirs, qui couvrent son abonnement pour la piscine, un Pass musées qui lui permet de voir des expositions en France, en Suisse et en Allemagne, et un abonnement au zoo de Bâle. Elle paie aussi une licence de natation pour une trentaine d’euros par an.
Sa devise ? « Je fais très attention, je calcule, compare, prévois et anticipe. » Elle se dit très rarement à découvert, et seulement à cause des délais de conversion entre la Suisse et la France.
« Je pense que je pourrais réduire les extras, mais il faut quand même se faire plaisir de temps en temps. Globalement, je suis assez satisfaite de la répartition de mon budget. »
Les enjeux de l’indépendance financière
Pauline explique avoir été éduquée aux économies très tôt par sa famille, qui l’a encouragée à acheter son premier appartement dès que possible. L’importance qu’elle accorde à l’argent est par ailleurs liée à ce qu’elle a constaté autour d’elle :
« J’ai vu la génération de ma grand-mère, les femmes très dépendantes de leurs maris au moment de la retraite, à devoir presque mendier pour avoir de l’argent. Je vois aussi des couples qui se séparent, avec des femmes qui se retrouvent à devoir se remettre en ménage très vite pour survivre financièrement…
C’est pour ça que l’argent est aussi important pour moi. Je ne veux surtout pas dépendre d’un homme, et si un mec me saoule, je veux pouvoir lui dire de partir immédiatement. »
Avec le patrimoine immobilier qu’elle tente de constituer en économisant, Pauline espère à la fois pouvoir assurer un mode de vie de saisonnière (en faisant les saisons tant que maitresse-nageuse en France, puis en voyageant l’hiver) et une retraite dans de bonnes conditions.
« J’ai envie de profiter de la vie maintenant, tout en essayant de me constituer une petite sécurité pour la retraite. »
Merci à Pauline de nous avois ouvert ses comptes !
Si jamais vous souhaitez commenter cet article, rappelez-vous qu’une vraie personne est susceptible de vous lire, merci donc de faire preuve de bienveillance et d’éviter les jugements.
Pour participer à la rubrique, écrivez-nous à l’adresse : jaifaitca[at]madmoizelle.com en indiquant en objet « Règlement de comptes » et en vous présentant en quelques lignes.
Crédit photo : Daniel Sorokin / Unsplash
Et si le film que vous alliez voir ce soir était une bouse ? Chaque semaine, Kalindi Ramphul vous offre son avis sur LE film à voir (ou pas) dans l’émission Le seul avis qui compte.
Les Commentaires