Vous avez peut-être déjà connu ce moment d’égarement devant la retransmission d’une compétition de patinage artistique à la télé. Qu’en avez-vous pensé ? Que c’était kitschouille à mourir ? Lent, mou du slip et ennuyeux ? Sans connaître quelques règles de base et quelques techniques indispensables, il nous arrive souvent de trouver ce sport opaque et incompréhensible ! Cet article va tenter de débroussailler pour vous la jungle du patinage artistique et 2 madmoiZelles pratiquantes vont vous donner envie de vous y intéresser.
En compétition de patinage artistique, il faut distinguer quatre catégories :
- Individuel hommes
- Individuel femmes
- Patinage en couple (sauts, jetés, portés, spirales autorisés)
- Danse sur glace (pas de sauts, de jetés, de spirales, portés interdits au dessus du niveau des épaules du partenaire, grosses distances interdites entre les partenaires)
Pour affiner un peu plus la différence entre les deux dernières catégories : les couples seront beaucoup plus techniques et chercheront la performance dans leurs figures alors que les danseurs miseront davantage sur le rythme de leur musique, la parfaite simultanéité de leurs pas et leur mise en scène.
En compétition, chaque catégorie exécute deux programmes : un programme court (avec figures imposées, temps de 2″50 obligatoire) et un programme libre (ne doit pas dépasser 4″30).
En ce qui concerne les différentes figures réalisables en patinage artistique, il en existe plusieurs sortes :
- Les sauts : il en existe 6, réalisables en simple, double, triple ou même quadruple tours pour certains : le salchow, le boucle piqué, le boucle, le flip, le lutz et l’axel.
- Les pirouettes, à réaliser debout, cambré-e, allongé-e ou assis-e, elles peuvent être « sautées » ou combinées ; la plus célèbre reste la pirouette Biellmann.
- Les pas, il en existe énormément : croisé, chassé, roulé, pivot…
- Les attitudes, comme la fente ou l’arabesque par exemple.
- Pour les couples, il y a les portés et les spirales : les portés sont divisés en groupes selon leur point d’appui (par la taille, par les hanches, sous les aisselles…) et les spirales par difficulté, et portent des noms forts sympathiques (spirale de la mort, spirale de la vie, spirale de l’amour et spirale cosmique).
Les Championnats du Monde 2013 de patinage artistique viennent de se terminer au Canada. Aucun-e Français-e n’a décroché de médaille, mais de bons espoirs sont possibles pour les Jeux Olympiques de Sotchi l’année prochaine !
Qu’en disent les madmoiZelles qui pratiquent ?
Deux patineuses ont bien voulu répondre à mes questions concernant leur discipline : Chloé, 17 ans, 8 ans de pratique à l’OGCA (Olympique Glace Club d’Albertville) et Marion, 21 ans, 17 ans de pratique dont 13 de patinage synchronisé, une discipline d’équipe dérivée du patinage artistique.
Quelles sont selon toi les qualités essentielles à la pratique du patinage artistique ?
– Chloé : « La qualité essentielle pour ce sport est la persévérance (beaucoup, beaucoup de persévérance). Il faut également savoir écouter l’entraîneur et prendre en compte ses remarques, qu’elles soient bonnes ou mauvaises, ces dernières permettent de nous remettre en question. »
– Marion : « Être autonome et un brin perfectionniste. Rares sont ceux qui ont des coachs particuliers, nous n’avons donc pas quelqu’un derrière nous pendant toute l’heure. Il ne faut pas être (trop) timide, puisqu’il y a une grande composante « danse/théâtre », on nous demande de vivre nos programmes et ça m’a souvent fait défaut plus jeune. »
Que recherches-tu dans la pratique du patinage artistique ? Qu’est-ce qui te plaît le plus ? Et au contraire, quelles sont les petites contraintes liées à une pratique régulière ?
– Chloé : « Ce qui me plaît le plus, c’est le fait que ce soit un sport varié et complet qui fasse appel à plusieurs « qualités » : les sauts demandent de la puissance, les figures plus artistiques requièrent de la souplesse, la chorégraphie demande de la grâce, du rythme et une maîtrise de l’expression corporelle… Ce qui peut être un peu contraignant et paradoxal, c’est le fait que les heures d’entraînement se ressemblent toutes en période de compétition : si on n’a qu’une heure de glace, on a juste le temps de s’échauffer, de répéter les éléments et de faire son programme en musique. Ça peut être fatiguant et lassant à la longue, mais c’est ce qu’il faut pour tout réussir le jour de la compétition. »
– Marion : « Je ne saurais pas dire ce que je recherche vraiment, je n’ai toujours fait que ça, c’est sur la glace et avec mon équipe que j’ai appris à sortir de ma coquille et à m’affirmer. Aujourd’hui je crois que ce que j’aime le plus, c’est quand on est en période de montage de programme, on essaye plein de figures, de nouvelles séquences de pas, les idées fusent de partout. Quand aux contraintes, ne nous leurrons pas : c’est cher et ça prends du temps. On a pas toujours des horaires faciles, c’est souvent tôt le matin ou tard le soir. Tout le monde connait l’excuse « Je ne peux pas, j’ai poney » ? Moi je ne compte plus les fois où j’ai répondu « Je ne peux pas, j’ai patin » mais quelque part on l’a choisi, on le sait et on aime ça. »
Chloé en pleine chorégraphie
En ce qui concerne l’équipement, lames et tenues pour les compétitions sont obligatoires : est-ce un gros investissement ?
– Chloé : « Pour débuter le patinage, un gros investissement n’est pas nécessaire, on peut trouver des patins pour 60€, mais mieux vaut privilégier les « vrais » patins à ceux que l’on trouve dans des grandes enseignes de sport. Certains clubs proposent une location à la saison. Pour la tenue, des gants, un leggings et une polaire sont suffisants. En revanche, dès que l’on commence la compétition, les frais deviennent plus importants. Les patins et les lames s’achètent séparément et coûtent un petit pactole. La tunique, en rapport avec la musique et le thème du programme, peut s’acheter sur Internet, ou sur mesure dans des boutiques spécialisées, ainsi on peut en trouver des basiques dès 50€, les tuniques sur mesure pouvant aller jusqu’à 250-300€. »
Quelles sont les figures techniques les plus compliquées à assimiler ? Faut-il une base de gymnastique ou de danse pour pouvoir plus facilement évoluer ?
– Chloé : « Chacun ayant des qualités et des aptitudes différentes, certaines figures seront plus difficiles à assimiler pour les uns que pour les autres. Au début, le plus difficile sera de trouver son équilibre et de le garder en avant, en arrière, en tournant, en sautant… Après, je pense que ce sont les sauts qui sont les plus durs à assimiler. Maîtriser chacun des 6 sauts demande à chaque fois des dizaines, voire des centaines d’essais. Et une fois qu’ils sont maîtrisés en simple, on « recommence à zéro » avec les doubles etc. »
– Marion : « À moins d’être vraiment totalement raide, aucune base n’est nécessaire et la souplesse s’acquiert. Ce n’est pas un frein à tout le travail de pas et de technique, c’est sûr que ça peut aider sur certaines figures mais c’est surtout l’équilibre et le placement du corps le plus important. Et des abdos, beaucoup d’abdos ! »
Le patinage artistique est bien trop souvent considéré comme un sport très kitsch et passé de mode aux yeux du grand public : qu’est-ce qui pourrait casser cette image ? Des médias plus ouverts à la pratique de ce sport ? Des patineurs capables d’adapter leurs choix musicaux à l’air du temps ? Des choix de costumes moins « classiques » ?
– Chloé : « Le patinage mérite une revalorisation au sein des médias et donc une meilleure information du spectateur. C’est un sport qui est de plus en plus ouvert, la nouvelle génération s’attache à le moderniser, et ça il faut le souligner ! »
– Marion : « Actuellement on trouve de tout : aux Championnats du Monde il y aura toujours au moins un couple russe ultra classique et un autre avec un thème hyper travaillé. Ceci dit, on ne peut pas occulter le côté danse et spectacle ; on ne peut pas patiner sur n’importe quoi n’importe comment. Et puis il faut plaire aux juges, trop de changement d’un coup ça ne passe pas forcement (je pense au couple français Blanc/Bouquet, séparés aujourd’hui mais qui patinait sur Grand Corps Malade à une époque, pour beaucoup de monde c’était trop étrange). »
http://youtu.be/L5BoRdZffbE
Quel(le)s sont les patineurs(euses) français(es) et internationaux(ales) que tu admires le plus et pourquoi ?
– Chloé : « J’aime beaucoup Sacha Cohen, qui, quand j’étais petite, me faisait rêver avec ses arabesques en grand écart. Aujourd’hui, j’apprécie le style fluide et léger de Jeremy Abbott qui a patiné sur Exogenesis de Muse l’année dernière, magnifique ! Anaïs Ventard possède quant à elle des pirouettes et des pas sensationnels. »
– Marion : « En France, je suis totalement fan de Péchalat/Bourzat en danse, dans la continuité de Delobel/Schoenfolder, ils ont toujours des thèmes très originaux et une technique irréprochable. En danse toujours, les Canadiens Virtue/Moir (jeunes champions Olympiques en titre) me font rêver avec leurs portés toujours en mouvement et totalement innovants. »
De nombreux français ont marqué l’histoire du patinage artistique (Candeloro, Bonaly, Joubert, Peizerat-Anissina…) ; est-ce que le patinage artistique français est une bonne école ? A-t-il des caractéristiques particulières ? Peut-on avoir de sérieuses chances de médailles à Sotchi en 2014 ?
– Chloé : « Florent Amodio, Brian Joubert et les danseurs Nathalie Péchalat/Fabien Bourzat ont le potentiel pour décrocher une médaille. Ces derniers sont d’ailleurs champions d’Europe depuis 2 ans et ont fini 3èmes aux Championnats du Monde 2012. Ils ont toutes les qualités requises pour monter sur la plus haute marche du podium en 2014 ! La nouvelle génération de patineurs (Romain Ponsart, Chafik Besseiguier, Anais Ventard, Maé-Berenice Meité, Lénaelle Gilleron-Gory) est énergique et même si certains sont encore trop jeunes ou pas assez expérimentés pour Sotchi, je suis sûre qu’ils ont de l’avenir et que nous en entendrons parler très vite ! »
http://youtu.be/BWzqnl8BzwI
– Marion : « Chez les hommes et en danse, c’est sûr que l’école française a sa petite réputation à l’international. Mais je ne saurais pas dire exactement ce qui la caractérise, peut-être juste le fait que les numéros 2 et 3 français se battent, dès les plus petites compétitions, contre les numéros 1 mondiaux… Personnellement, je trouve que les patineurs français sont plus originaux que les Russes et plus « vivants » que les Américains ! »
Liens
- Fédération Française des Sports de Glace
- Liste des clubs de patinage artistique partout en France
- Site des derniers Championnats du monde au Canada
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Les Commentaires
Mais ça arrive assez souvent qu'en tombant par hasard dessus à la télé, ou sur Youtube, je puisse passer des heures à regarder les sportifs patiner. J'adore ça, c'est esthétique, et fascinant.
Je n'ai jamais aimer "glisser", que ce soit en roller, en ski (quoique le ski passe mieux) ou en patin. D'ailleurs, je n'ai essayé qu'une seule fois le patin à glaces, et c'était atroce ='( Je n'y arrive pas, j'ai une trouille pas possible et comme je n'étais qu'avec des gens (les correspondants italiens en fait) qui savaient parfaitement patiner, bah je me suis prodigieusement ennuyée.