Tout a commencé lorsque je me suis mise en couple avec un homme adulte beaucoup plus âgé que moi, et qu’après une existence entière passée en centre-ville, j’ai déménagé avec lui à la campagne.
Du haut de ses 32 ans, il m’a regardé et il a dit à l’adolescente que j’étais encore à l’époque : « Chloé, tu dois passer ton permis de conduire ». Je lui ai répondu que légalement ça n’était pas possible puisque je n’étais même pas majeure.
Il m’a répondu « Arrête ton char, je te rappelle que tu as 31 ans, un enfant et un crédit immobilier sur le dos. Ce n’est pas parce que tu passes tes dimanches soir à regarder des films Pixar en mangeant les cookies de ta fille que ça fait de toi un enfant ». Touché.
J’ai donc capitulé et je me suis inscrite au permis de conduire pensant que ce serait une formalité réglée en un rien de temps. J’ai dû oublier l’espace d’un instant que je ne savais pas distinguer ma gauche de ma droite et qu’une fois, je m’étais perdue dans la cage d’escalier de mon boulot.
Si tu pressens à la lecture de cette dernière phrase que la catastrophe est toute proche, tu ne te trompes absolument pas.
La question de l’examen du code de la route
Ou devrais-je dire l’examen élaboré par des êtres vicieux qui assouvissent en toute impunité leurs fantasmes sadiques sur une population non-consentante mais totalement soumise à leur bon vouloir.
J’aurais pu faire un parallèle avec le cinéma français, mais HEY, on n’est pas là pour faire de la chronique politique alors je vais continuer de ne pas me mêler de ça.
EN BREF l’examen du code de la route consiste à répondre à 30% de questions dont on comprend pourquoi en connaître la réponse peut effectivement s’avérer utile lorsque l’on conduit un véhicule et 70% de questions qui n’ont absolument aucun sens du style « à quel âge un goéland est-il autorisé à voler à plus de 10km/h au-dessus d’une zone aquatique ? ».
La réponse est : une pomme et deux dentiers. Tu vois tout est question de l-o-g-i-q-u-e-.
C’est simple me dit-on ensuite, en avisant mon air éperdu, « tu ne t’embêtes pas et tu apprends tout par cœur comme ça, tu es rodée». C’est une tactique que je me suis empressée d’appliquer.
C’étaient sans compter les examens blancs qui, d’un exemplaire sur l’autre, changent drastiquement d’opinion quant à la même problématique.
Par exemple dans le test numéro 310, ne pas répondre oui quand on te demande si tu peux sauter une vitesse quand tu accélères, compte comme une erreur. Et comme tu n’as le droit qu’à 1/3 d’erreur sur les 500 questions que comporte le test, ce n’est pas le moment de se planter.
Dans l’examen 425, la question revient, tu es content, tu connais la réponse. EH BIEN NON, cette fois la réponse t’indique qu’il ne faut JAMAIS sauter de vitesse.
La question des cours de conduite
Refroidie par des années de scolarité bercées par des : « Cette enfant/adolescente/jeune femme n’a aucune coordination et ne sait pas bien différencier sa droite de sa gauche », j’ai commencé par me dire que c’était mal barré.
Puis, je me suis enorgueillie : combien d’anciens enfants sont ralentis par une réputation jadis bâtie par des adultes malveillants et castrateurs ?
Je me suis donc départie de ces croyances, décidant de contrer ma prophétie auto réalisatrice. Après tout, j’étais peut-être un individu doté d’un sens du repérage dans l’espace et d’une coordination corrects qui n’attendait que la chute de mes barrières mentales pour se révéler.
La suite m’a prouvé que non, notamment quant au bout de 60 heures de conduite, mon instructrice a admis qu’à ce stade de l’histoire j’étais tout de même censée ne plus emboutir le trottoir à chaque virage.
Même si au fond ce n’était pas vraiment ma faute : « Quand on est jeune, on a beaucoup de temps libre, on vit chez ses parents, cela encourage la disponibilité intellectuelle. Lorsqu’on est vieux, c’est différent. » C’est donc ça, à 32 ans, je suis déjà sénile.
Devant mon air contrit, et suite au décès d’un cycliste qui avait eu l’outrecuidance de se trouver sur mon passage, la monitrice m’a expliqué qu’une fois elle avait eu une élève encore pire que moi, qui avait QUARANTE ANS en plus et qui a tout de même réussi à obtenir son permis de conduire.
Combien de litres de sang et de larmes ? Combien de kilos d’espoir et de joie de vivre abandonnés sur la route menant au précieux sésame ? Ça, l’histoire ne le dit pas.
La question de l’examen
Faisant fi du fait que j’omettais régulièrement de passer en première vitesse lorsque j’immobilisais quelques instants mon véhicule, j’ai enclenché la vitesse mauvaise foi (tu l’as ? Je suis désolée).
Au fond, j’étais probablement une excellente conductrice simplement brimée par le perfectionnisme toxique de ma monitrice d’auto-école.
Cette dernière a tout d’abord essayé de m’expliquer que, tout de même, elle n’avait pas rêvé feu ce chien que je venais d’emboutir gaiement, mais je ne me suis pas laissée faire.
Si j’avais écouté les adultes de mon entourage qui essayaient de me décourager, je ne serais pas où j’en suis aujourd’hui… c’est-à-dire… bon… J’aborderais le sujet « Je ne sais toujours pas ce que je trafique avec ma vie » une autre fois.
Au bout d’une centaine d’heures de conduite j’ai quand même fini par me présenter à l’examen du permis de conduire. Après tout, j’ai obtenu mon code de la route du premier coup sans rien comprendre aux priorités, les miracles existent donc bel et bien.
Une fois j’ai d’ailleurs réussi un créneau, même si ça n’était pas intentionnel.
J’étais tellement surprise que j’en ai oublié de freiner en marche arrière. Rip la Twingo derrière moi.
Une fois dans la voiture, l’examinateur livide, égrainant son chapelet et murmurant des choses en latin, a rapidement balayé la moindre once de doute quant à la tournure des événements.
Cet épisode de mon histoire reste douloureux et disons que pour résumer, j’ai oublié de baisser le frein à main lors du démarrage et que ce manquement illustre parfaitement cette séance d’humiliation à 200 euros où j’ai fini par griller des feux rouges parce que je n’en avais plus rien à foutre.
Pour finir, l’instructeur, très gentil, m’a félicité pour ma bonne volonté. Pour le reste, il m’a dit qu’il ne savait pas très bien quoi me conseiller pour m’aider à progresser même si ses yeux hurlaient « vélo, avec des stabilisateurs ».
Si tu es dans ma situation, tu as attendu patiemment la fin de cet article, espérant une bonne nouvelle qui pourrait te redonner un peu de force et de courage.
Malheureusement pour moi, mais très heureusement pour le reste des usagers de la route, et potentiellement des riverains vivant dans les habitations en bord de nationale, je n’ai toujours pas empoché le précieux sésame.
Cette chronique est en quelque sorte un appel au secours où j’implore quiconque lirait ce texte de me donner quelques astuces pour m’améliorer. Toutes suggestions du type : « détend toi » et autres « ne réfléchis pas trop » ne seront pas bien accueillies. Merci.
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