Article initialement publié le 29 mars 2018
Le viol conjugal. Pendant longtemps, je me suis sentie très éloignée de ce sujet. Je savais que ça existait, je le voyais dans les films, dans les séries.
Puis un jour, j’ai entendu une histoire dans mon entourage proche. Puis une autre. Et encore une autre. Et j’ai réalisé à quel point le viol conjugal est présent tout autour de moi et terriblement banal.
Le viol conjugal, c’est quoi ?
Aux yeux de la loi, le viol au sein du couple fait partie des violences conjugales mais elles sont punies par loi en tant que telles seulement si les personnes ont vécu ensemble.
Sur le site du service public, on peut lire :
« La victime et l’auteur peuvent être mariés, concubins ou pacsés. Les faits sont également punis même si le couple est divorcé, séparé ou a rompu son Pacs.
Mais si la victime et l’auteur n’ont jamais vécu ensemble, les faits sont considérés comme des violences classiques et non comme des violences conjugales. »
Le viol conjugal expliqué simplement
Mais si la violence conjugale dans un couple non-marié n’est pas reconnue comme telle dans la loi, elle n’en reste pas moins une véritable violence.
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Donc, pour mettre à plat, le viol conjugal concerne tous les couples : les personnes mariées, fiancées, ensemble depuis deux semaines ou deux ans, les relations homosexuelles ou hétérosexuelles, et ainsi de suite.
Et c’est le sujet qu’a choisi d’illustrer Marine Spaak, de Dans Mon Tiroir, pour le magazine en ligne belge Femmes Plurielles. Partagée sur Facebook le 27 mars dernier, la BD s’intitule « Passer à la casserole » – Et si on parlait du viol au sein du couple ?.
Elle explique avec calme et pédagogie tous les phénomènes qui accompagnent le viol conjugal : le « devoir conjugal », le sentiment de culpabilité, les conséquences psychologiques d’un viol…
La dessinatrice apporte également des chiffres et des citations issues de sources soigneusement présentées, qui permettent de se renseigner plus en détails (et de faire taire les personnes de mauvaise foi, si vous voulez mon avis).
La bande-dessinée se base en grande partie sur une analyse du viol dans le couple menée par une chercheuse et psychologue, Amandine Michez, et publiée en décembre 2017.
Si tu veux y jeter un coup d’œil, c’est par ici.
« Passer à la casserole », ça veut dire quoi ?
L’illustratrice Dans Mon Tiroir débute son premier strip avec l’expression « passer à la casserole ». Si tu as lu en entier l’album, tu as sûrement compris que cet idiome qualifie un viol.
J’ai été un peu surprise d’abord. J’avoue que je n’y avais jamais vraiment réfléchi et que j’ai dû entendre cette expression que de rares fois, dans un contexte pas forcément négatif.
Exemple : ma pote m’a déjà balancé un truc dans le genre, « dis donc, j’en connais une qui va passer à la casserole » mais dans le sens « tu vas pécho ! trop bien meuf ! ».
Évidemment, j’ai toujours senti que « passer à la casserole » n’avait rien d’une expression bienveillante surtout envers les femmes.
J’ai d’ailleurs demandé autour de moi et les réponses ont été assez unanimes : cette expression est beauf, un peu angoissante, et sous-entend un rapport forcé.
Pour être certaine de la définition, j’ai consulté le mot « casserole » sur le site du Larousse, et voici ce qui j’y ai trouvé :
Passer à la casserole — expression : être tué, être soumis à une dure épreuve ou, en parlant d’une femme, être obligée d’accomplir l’acte sexuel.
Pour rappel : être obligée d’accomplir un acte sexuel c’est un viol.
En poussant mes recherches, j’ai appris que la formulation était aussi employée pour qualifier le tout premier rapport sexuel d’une femme.
« Passer à la casserole », la culture du viol dans le langage
Bon. Moi qui pensais que c’était une expression normale quoiqu’un peu sale et dégueu, qu’on utilisait dans la langage courant sans souci, j’avais tout faux. Enfin presque.
Parce que « passer à la casserole » reste une formulation utilisée pour exprimer un viol que la victime essaye de cacher un peu, honteusement.
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Et la bande dessinée l’exprime très bien : l’autrice parle d’acte subi désagréable, certes,
mais normal, et le compare comme un détartrage chez le dentiste, ou une déclaration d’impôts (des activités peu réjouissantes mais qui font partie du quotidien).
Sauf que le viol conjugal n’a rien de normal et peut même, dans certain cas, avoir des répercussions dangereuses chez les victimes.
Je pense que cette expression fait partie tout simplement de la culture du viol. Le crime est minimisé, peut apparaître comme un malentendu ou un accident et qui est facilement excusé par la société (d’un point du vue juridique, social ou moral…).
Et quand certain·es utilisent « passer à la casserole » pour parler de la première fois sexuelle d’une femme, l’image est extrêmement violente.
Cela implique une pression quelque soit (physique ou psychologique) dans le premier rapport sexuel. Pour débuter sa sexualité, je ne suis pas sûre que ce soit l’idéal.
Personnellement, je n’utilisais déjà pas cette expression, et je ne pense pas l’avoir entendue récemment. Mais je n’y prêtais peut-être pas attention.
Alors maintenant, je pense que je ferais un peu plus attention dans mes conversations à l’avenir.
Et toi, que t’inspire l’expression « passer à la casserole » ? L’as-tu déjà entendue auparavant ?
À lire aussi : Je veux comprendre… la culture du viol
Écoutez Laisse-moi kiffer, le podcast de recommandations culturelles de Madmoizelle.
Les Commentaires
Un ex insistait pour dire qu’il allait « me faire l’amour » , même quand j’essayais de lui expliquer que non, ON va faire l’amour, tous les 2, et que ça a un sens différent. Je comprends mieux pourquoi ça m’agacait à chaque fois !