J’aime les comédies romantiques. J’aime les comédies romantiques bien faites, j’entends. Celles qui font rêver mais s’inscrivent quand même dans la vraie vie, celles avec des personnages relativement attachants et auxquels on peut s’identifier, celles qui ne donnent pas envie de rentrer dans l’écran pour défoncer la gueule du héros ou de l’héroïne, écrit-e pour qu’on veuille attenter à sa vie à coups d’asperge.
Même quand elles font dans le cliché, j’aime ce genre, tant qu’il n’est pas perclus de clichés sexistes ou racistes parce que c’est beaucoup trop lourd pour attirer ma sympathie. J’aime les images de retrouvailles, les réconciliations, les battements de cils, les toucher rectaux, l’amour naissant et le gonflement du coeur au moment où le générique de fin apparaît à l’écran.
Ce qui m’embête un peu plus, c’est que j’ai toujours besoin de pouvoir me projeter dans les séries ou les films que je regarde. J’ai ENVIE de me projeter à la place des personnages, de pouvoir imaginer comment je réagirais dans les situations improbablement romantiques qu’on nous balance dans les yeux. Et il faut bien que je me l’avoue : je ne serai jamais crédible en personnage de film, et voici pourquoi.
Raison #1 : j’ai aucune endurance
Grand cliché des comédies romantiques : les courses-poursuites pour empêcher l’être aimé d’aller prendre l’avion, pour lui faire comprendre qu’il a mal compris les intentions de sa moitié, ou parce que, tout simplement, l’envie de lui avouer ses sentiments est tellement forte qu’il faut le faire LÀ MAINTENANT, TOUT DE SUITE, AVANT QU’IL OU ELLE NE MONTE DANS CE TAXI (cette pression, rien qu’à l’écrire, ça m’épuise). Car oui, l’amour, c’est un peu comme une poussée d’acné, ça prend d’un coup, parfois.
Oui mais voilà : courir, c’est pas donné à tout le monde. Il y a d’un côté ceux et celles qui ont honte de leur façon de courir — et qui, si je puis me permettre, ne devraient pas, parce qu’après tout, qu’on se tienne droit en soufflant en rythme ou penchée croupe en arrière, c’est plutôt classe, de courir. C’est surtout à ceux qui, comme moi, ont une endurance proche de zéro que ça pose problème. Personnellement, à part si la personne est encore en bas de chez moi au moment où je pars la rattraper, je finis par faire une attaque sur le trottoir, foudroyée par le manque de souffle.
Et la comédie romantique de se transformer en drame qui fait pleurer dans les chaumières. La force des sentiments ne peut rien face aux incapacités physiques, voilà.
En plus après, on te récompense avec un cahier.
Raison #2 : j’éternue sous la pluie
Rien n’est plus beau qu’une scène où les protagonistes se retrouvent et s’avouent leur amour sous la pluie, finissant par s’embrasser pendant de longues minutes fougueusement, en dépit du coup de froid qu’ils vont choper après et de l’eau qui coule dans leurs bouches.
Bien sûr, je pourrais vous dire que j’ai une tête de bite avec les cheveux mouillés (une verge à poil raide), mais c’est une évidence. C’est pas un problème, surtout que ça a tendance à me faire marrer quand je croise mon reflet dans le miroir vu que j’ai les oreilles légèrement décollées et qu’elles dépassent de ma chevelure imbibée. Ça me donne un côté cartoon et, après tout, si on peut plus se faire rire soi-même alors on peut compter sur qui ?
Dis, avant qu’on se lèche la glotte, t’as des Dolirhume chez toi ?
Non le souci, c’est que j’éternue quand l’air est trop humide. J’y peux rien, c’est comme ça, et les éternuements c’est quand même le truc le plus incontrôlable de la Terre. Quel que soit le degré d’excitation de mon partenaire fictif (ou de ma partenaire fictive, dites, c’est pas parce que j’ai décidé de ne manger que de la viande que je refuse dans le cadre d’une fiction de passer au poisson), je suis pas sûre qu’il resterait à mes côtés après avoir reçu ma morve dans la face.
Raison #3 : je peux pas ET parler, ET pleurer
Moi aussi ça m’agace, les personnages de films capables de rester beaux alors qu’ils pleurent. Les joues à peine humides, les yeux à peine rougis, ils regardent le vague en soupirant de tristesse, dignes. Dignes et séduisants.
Mais surtout, ils s’expriment correctement, et articulent à peine moins que pendant le reste de l’oeuvre. Ils restent compréhensibles et ma morve au nez quand je pleure n’est rien en comparaison de mon envie d’avoir la même diction parfaite qu’eux.
Moi, quand je chiale, je me contente pas d’être un peu vilaine. Il me suffit d’une minuscule variation des émotions pour avoir le combo du bafouillage, de la voix stridente qui part dans tous les sens (et passe en deux syllabes de la tessiture de Josiane Balasko à celle de Oui-Oui), et du manque d’articulation. Imagine un peu la gueule des dialogues du film de ma vie :
– Bah pourquoi tu pleures ? – Il m’a quittée. – Bah mange du pâté si t’as envie de pâté, qu’est-ce que tu veux que je te dise, moi ?
Raison #4 : je suis rancunière
C’est un grand classique de bon nombre de films sentimentaux : les deux personnages principaux, qui vont finir par se passer la bague au doigt, commencent par s’en foutre plein la tronche. Ils se haïssent littéralement, et se le font savoir sans vergogne.
[Spoiler old à crever mais on sait jamais] C’est par exemple le cas de Meg Ryan et Tom Hanks dans Vous avez un mess@ge (ne déconnons pas avec l’arobase) ou Meg Ryan et Billy Crystal dans Quand Harry rencontre Sally. [/Spoiler old à crever mais on sait jamais]
Oui, dans l’idée, c’est complètement romantique : partir d’un sentiment de haine et de rejet pour, au fur et à mesure, séduire l’autre et se laisser séduire par l’autre, c’est beau. Ça veut dire (dans le film en tout cas) qu’au-delà des conflits de la première rencontre, c’est la personnalité qui plaît. Ça veut dire que la relation sera à la fois jolie et piquante, qu’il n’y aura pas de non-dit, mais de la sincérité, qu’ils n’auront pas peur des disputes parce qu’après tout, si ça ne les a pas empêchés de s’aimer, pourquoi ça les empêcherait de continuer à s’aimer ?
– Je peux te mettre un doigt ? – Va te faire foutre, Billy. (Quand à peu près Harry rencontre à peu près Sally)
Ok, pourquoi pas. Mais de mon côté, rancunière comme je suis, quelqu’un avec qui je m’engueule et qui m’aboie dessus restera toujours quelqu’un avec qui je m’engueule et qui m’aboie dessus. Et à partir du moment où on a provoqué en moi un agacement qui a fait s’emballer mon coeur, l’image du/de la coupable y sera toujours suffisamment associée pour que je sois incapable de ressentir de l’affection, voire de l’amour, pour cette personne. Peut-être que j’ai raté des trucs du coup, je sais pas, mais on sait toutes que ça se serait terminé en coup de boule pendant l’acte cette histoire.
En fait, je suis médisante avec moi-même. Bien sûr que j’aurais pu être un personnage de films romantiques : la fille là-bas, qui trébuche à l’arrêt de bus et qu’on voit à l’écran de loin, pendant trois secondes et demi.
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