Pour moi, être féminine c’est pas forcément une histoire de robes, de talons et de cheveux parfaitement coiffés chaque jour. Mais j’ai toujours eu du mal à trouver ma place, à être en adéquation entre la manière dont je me perçois et l’image que je donne de moi.
Plus Tomboy que Laura Ingalls…
Petite, j’étais déjà un « garçon manqué ». Je préférais jouer au foot, aux chevaliers du Zodiaque ou aux pogs qu’à la marelle ou à l’élastique. Ayant grandi à la campagne, j’avais plus tendance à jouer au milieu des champs et des forêts qu’à aller me promener en ville ou au square.
Je variais mes samedi après-midi entre les cabanes avec mes copains et les nuits chez mes copines, où je découvrais avec elles le maquillage (pas pour moi, je détestais ces ersatz de rouge à lèvres, gluants et puant le fruit), et j’enviais leur pantalons serrés ou leur baskets compensées (oui j’assume, mais bon à 12 ans, le bon goût est très relatif).
J’ai eu très souvent les cheveux courts dans mon enfance (une sombre histoire de cheveux très fragiles, qui s’arrachaient par poignées), et mon côté assez casse-cou m’a rapidement fait préférer une paire de baskets (des Vans de préférence) et un pantalon plein de poches aux collants en résille qui déferlaient ces années-là au collège.
Mon côté fille s’exprimait par ma passion sportive, la GRS. Je trouvais les gymnastes superbes et je rêvais moi aussi d’avoir leur grâce et leur justaucorps. En commençant ce sport, j’ai eu envie d’avoir les cheveux longs, pour pouvoir arrêter de tricher avec un faux chignon à chaque compétition…
Avec le temps, j’ai essayé de devenir un peu plus « fille », j’allais acheter des boucles d’oreilles chez Claire’s, je me suis fait percer le nombril en troisième et je commençais enfin à avoir les cheveux longs. Je me rappelle de la joie de pouvoir me faire mes premières queues de cheval (ne prenez pas cet air lubrique, on parle de cheveux là !).
Tenue vestimentaire et état d’esprit
Le collège a vraiment été un moment horrible à passer, et mon arrivée au lycée a marqué ma période d’affirmation. Je suis devenue une « bab’s ». Même si ce genre se décline en différentes variantes (teuffeurs, hippies, skateurs etc.), disons que pour ma part, ça variait selon les périodes.
Je ne quittais pas mes Vans, Ethnies, DC, Osiris (une paire par an), mes baggys XXL et mes petits t-shirts (qui représentaient selon moi mon côté féminin, en mettant en valeur le début de poitrine que j’espérais avoir).
À cette époque encore, j’étais entourée majoritairement de garçons. Je désespérais d’être en section ES (seulement deux garçons dans la classe en première), entourée de filles habillées de rose de la tête aux pieds (rappelle toi des Timberland roses, cette invention de Satan) et bardées de bijoux Playboy.
Je me jurais de ne jamais ressembler à ces filles que je considérais comme stupides et absolument sans personnalité (quand elles sont 17 à être habillée de la même manière sur une photo de classe, t’as l’impression d’être au pensionnat du mauvais goût)…
Confort et praticité
Un peu bab’s sur les bords, et intégrant avec motivation une section arts du spectacle, mon style a commencé à varier avec le temps mais en gardant une certaine constante : praticité et confort.
Je ne portais rien d’autre que mes baskets, de gros sweats à capuches et une énorme doudoune de snowboard (habitant à la montagne, habituée aux -15 degrés, la doudoune est un élément nécessaire à la survie en hiver). J’ai délaissé mes baggys pour des jeans et des pantalons bootcut, des sarouels et des jupes longues (mais uniquement sur un pantalon). Mais impossible pour moi de porter un jean serré ou des talons, alors que j’enchaîne ateliers pratiques et sorties clownesques avec les amis.
Avec le temps, mon cher et tendre commençait à me faire remarquer qu’il faudrait quand même qu’un jour, je me mette à devenir « une femme », et plus une enfant. Une réflexion qui m’a toujours beaucoup déplu : que devait être « une femme » ? Cela impliquait selon lui une certaine forme de féminité, qui passait par des tenues moins confortables et plus communes, par une paire de talons ou un décolleté.
Entre envie et déguisement…
Même si j’ai toujours été un « garçon manqué », une petite partie de moi a toujours eu envie d’être un peu plus féminine
, de ne pas avoir l’impression d’être déguisée quand je porte une robe et des talons (que je mettais principalement pour des représentations théâtrales).
Le problème est que même si je craque devant une paire de bottine à talons et que je me l’achète, il y a une chance sur deux pour que je ne la porte que très rarement. Chaque fois que je tente de prendre soin de moi, que je met une jupe ou des talons, j’ai droit à des réflexions type « c’est mieux comme ça » , ou encore « je pensais pas que tu pouvais être aussi bien » (ça veut dire quoi, ça, que je suis un cas désespéré d’habitude ?!).
Du coup, j’ai toujours l’impression que ce genre de tenue ne me correspond pas : même si j’adore porter ma jupe en jean avec mes bottes motardes, j’ai l’impression que cela ne représente pas ma personnalité, que je suis dans un rôle et que je renvoie une fausse image de moi.
La féminité et moi
Il faut dire que j’ai toujours eu des passe-temps assez peu « féminins ». Motarde, joueuse de paintball et toujours motivée pour un sport de combat, je passe mon temps libre entourée de garçons. J’ai donc souvent besoin d’un certain côté pratique dans mes vêtements (du style veste à capuche pour avoir chaud en moto).
Du coup, les réflexions restent les mêmes : « si tu étais un peu plus féminine… », « tu vas pas toujours t’habiller comme ça…. ». Je suis désolée mais je préfère avoir le style de Jenifer Lawrence, plutôt que celui de Paris Hilton !
À 25 ans, je commence à peine à mettre correctement un trait de crayon sur ma paupière supérieure (une grande victoire, jalonnée de nombreuses têtes moitié-Cléopâtre moitié-panda), je me sens plus à l’aise dans un slim que dans mes jeans bootcut, et j’ai découvert avec joie certains produits de beauté grâce à une amie qui m’a fait cadeau d’un abonnement de six mois à une fameuse « beauté box ».
Je porte toujours des baskets au quotidien, même si je me laisse de plus en plus aller à mettre des bottes ou bottines, et je commence à me sentir plus à l’aise lorsque je sors habillée d’une robe en été.
Il y a quelques temps, une personne que j’estimais a émis des critiques très dures à mon égard, remettant en cause toute l’image que j’avais pu me construire, et mettant à mal ma féminité (« hybride », c’est un terme sympa non ? On aime tellement entendre ça). À cette occasion, un ami m’a dit la plus belle chose que je pouvais entendre à ce moment là :
« Je sais que tu le sais, que je te l’ai déjà dit, mais je peux pas faire autrement que te le redire clairement. À mes yeux, tu es LA définition même d’une femme. Une vraie, pas une création de la télé ou de la société.
Une femme, forte, indépendante et interdépendante, intelligente, bienveillante, violente, complexe et potentiel berceau de la vie, de tes formes parfaites jusqu’à ton coeur. »
Booyah.
Ces quelques mots m’ont confortée dans mon idée que certes, je ne serai peut-être jamais « féminine » au sens où la majorité des gens l’entendent. Je continuerai à rêver de porter des talons sans me sentir mal à l’aise, et je continuerai à préférer les baskets et les jeans aux talons aiguilles et tailleurs.
Mais, incroyable : je ne suis peut-être pas féminine, je n’en reste pas moins une femme !
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Les Commentaires
Depuis petite, j'ai toujours été comme ça. J'étais la seule fille à avoir choisi rugby au lieu de danse, j'avais les cheveux courts, je m'entendais plus avec des garçons que des filles, que je trouvais insupportables.
Maintenant j'ai bien grandi, mais je n'ai pas changé pour autant : j'ai un goût prononcé pour le métal et le hard rock (:rockon, je n'ai jamais mis de maquillage, je déteste les talons et je le vis bien. Étant en 3ème, c'est plutôt chaud de s'affirmer comme ça, étant donné que même les 6èmes commencent à se mettre du maquillage...
Je suis bien en jean, en sweat et en Converses et je n'échangerais ma place pour rien au monde et oui, je reste une adolescente (et bientôt une femme) pour autant.
(Petit PS pour toi maman, qui n'aime pas mon sweat Iron Maiden : le plus important est que je me plaise, MOI. Je me fiche totalement des avis des autres. edo