Si TikTok est le fief des tendances douteuses, c’est aussi une excellente plateforme de sensibilisation pour les plus jeunes. Car entre deux chorégraphies virales et pranks grossièrement mis en scène, on y trouve aussi des contenus plus sérieux — autour de l’appropriation culturelle, de l’homophobie ou encore des violences sexuelles et conjugales.
Mi-septembre, Carolyn postait une vidéo sur son compte TikTok démontant avec sarcasme chacune des règles que son ex petit-ami lui avait envoyé avant qu’elle ne parte étudier à l’université.
La vidéo accumule près de 3 millions de vues et une centaine de commentaires de soutien ou autres messages de victimes se reconnaissant dans ce type de directives abusives.
« Pas de fêtes », «Ne bois pas »..
« Pas de crop tops ou de vêtements moulants », « sois dans ton dortoir à 21 heures tous les soirs »… Non, ce ne sont pas les nouvelles directives du ministre Jean-Michel Blanquer concernant la « tenue républicaine » des écolières, ni un nouveau couvre-feu imposé par Macron.
Ces règles strictes sont celles de l’ex-compagnon de la jeune tiktokeuse Carolyn, qui, après avoir quitté son copain abusif, a décidé de partager les consignes auxquelles il voulait la soumettre en les démontant une par une avec humour.
« Je suppose que je ne peux plus me rendre en cours avec des garçons ou des professeurs masculins alors… Ok, j’arrête l’université. »
Malgré l’humour dont fait preuve Carolyn, le message de son ancien petit-ami n’a rien de comique et dénote de comportements abusifs et de violences psychologiques : « N’éteins jamais la localisation de ton iPhone », « ne bois pas », « ne t’approche pas d’un garçon à moins de 10 mètres »…
Bien consciente du caractère excessif, infondé et dangereux de telles instructions, la tiktokeuse consacre désormais sa page à la sensibilisation autour des violences conjugales.
En France, selon une enquête sur la cyberviolence, neuf victimes de violences conjugales sur dix disent avoir déjà été cybersurveillées, c’est-à-dire avoir subi de l’espionnage par leur partenaire sur leur téléphone ou en ligne, comme Carolyn.
Même si elles restent verbales, les violences conjugales témoignent elles aussi de rapports de domination et instaurent un climat de contrôle. Non seulement elles peuvent causer des traumatismes profonds chez la victime qui perd confiance en elle en même temps que le contrôle de sa vie, mais elles sont bien souvent les prémices de violences physiques.
« Les violences psychologiques sont une arme très efficace pour soumettre, dominer, asservir et elles ont pour but d’imposer une domination pour avoir l’autre à disposition et pour l’instrumentaliser à loisir », rappele la plateforme Mémoire Traumatique.
« Protégez-vous »
Si Carolyn a décidé de témoigner avec humour, c’est pour donner un message clair et accessible aux jeunes femmes qui tomberaient sur son témoignage en scrolling sur TikTok.
« Je l’ai bloqué absolument partout. Je ne tolère pas que quelqu’un soit abusé mentalement ou physiquement… Ce n’est jamais acceptable », explique-t-elle dans ses vidéos. Elle poursuit :
« Il y a tellement de ressources disponibles, s’il vous plaît, ne restez pas dans une situation dans laquelle vous ne voulez pas être, dans laquelle vous ne devriez pas être, vous méritez toutes et tous tellement mieux que cela… il y a tellement de ressources disponibles, s’il vous plaît, utilisez-les. »
La créatrice de contenus profite d’ailleurs de sa récente notoriété pour partager des ressources d’aide à destination des victimes qui seraient prisonnières d’une telle relation ou sous l’emprise d’un compagnon abusif.
En France, si vous êtes victimes de violences conjugales, d’injures ou d’humiliation, vous pouvez contacter le 3919 24h/24 ou alerter la Police ou la Gendarmerie en cas de danger immédiat. Il existe également un outil, le violentomètre, pour repérer les comportements violents allant du chantage et de la jalousie au viol et aux coups.
Gardez l’oeil ouvert, entourez-vous et protégez-vous !
À lire aussi : 210.000 femmes victimes de violences conjugales pour 33.000 auteurs poursuivis, y’a un souci non ?
Crédits photos : ccarollynn sur TikTok
Si vous ou quelqu’un que vous connaissez est victime de violences conjugales, ou si vous voulez tout simplement vous informer davantage sur le sujet :
- Le 3919 et le site gouvernemental Arrêtons les violences
- Notre article pratique Mon copain m’a frappée : comment réagir, que faire quand on est victime de violences dans son couple ?
- L’association En avant toute(s) et son tchat d’aide disponible sur Comment on s’aime ?
Écoutez Laisse-moi kiffer, le podcast de recommandations culturelles de Madmoizelle.
Les Commentaires
J'étais heureusement déjà "vaccinée " contre les hommes et leurs comportements toxiques ( non sans douleurs) et je l'ai clairement envoyé chier.
Je me souviens encore qu'il voulait m'interdire d'écouter certains groupes/chanteurs de peur que je puisse fantasmer dessus.
C'est très bien qu'elle ait réagi comme ça et qu'elle s'en serve pour donner des ressources aux jeunes. Parce que oui dans la tête des gens le mot "conjugale " renvoie forcément à un couple marié (et souvent hétéro)