Après avoir lu le témoignage d’une Rockie qui avait laissé la garde de sa fille à son père, j’ai eu envie d’écrire sur mon mode de garde : le nesting.
Comme cette lectrice, je suis séparée du père de mes deux enfants. Au moment de notre séparation, ils avaient 11 et 7 ans, et vivaient avec moi à Paris depuis deux ans. Mon ex-conjoint vivait au Luxembourg, et voyageait pour nous retrouver.
Après avoir pris la décision de nous séparer, il a fallu que nous nous entendions sur la garde.
Le choix délicat du type de garde après la séparation
Plusieurs choix s’offraient à nous :
– Les enfants restaient avec moi, et je les mettais dans un TGV en direction de Luxembourg un week-end sur deux ;
– Les enfants repartaient vivre à Luxembourg, et leur père les mettait dans un train en direction de Paris un week-end sur deux ;
– On gardait l’appartement familial, et on ne changeait presque rien. Ils étaient avec moi la semaine, et je déménageais le vendredi soir pour laisser la place à leur père.
La troisième solution nous a semblé être la meilleure, pour plusieurs raisons : notre aîné rentrait au collège, notre cadette allait changer d’école pour la troisième rentrée consécutive, et nous estimions qu’ils étaient encore très jeunes pour ces aller-retours seuls en train. Et surtout, c’est cette option qui impliquait le moins de changements pour eux. Ce mode de garde, courant aux États-Unis, s’appelle le « nesting » et vient du mot nest, le nid. C’est ce nid familial que cet arrangement essaie de préserver.
Le nesting : un agencement compliqué pour les parents
Si la mise en place a été rapide pour les enfants, elle a été un peu plus laborieuse pour moi. Je travaillais comme indépendante, et mes clients se trouvaient à l’étranger. Dans ces circonstances, il m’était impossible de trouver un appartement en location, et j’ai donc dû acheter assez rapidement un appartement, mini en taille vu les prix du mètre carré à Paris.
Tout mettre en place et enfin retrouver un vrai chez moi pour le week-end m’a pris environ un trimestre. En attendant, j’ai squatté à gauche ou à droite
, et je me suis offerte quelques nuits dans des hôtels.
Cohabiter après la séparation
Je pensais que le plus dur était fait, mais non ! Partager un appartement, même si nous n’y sommes jamais ensemble, c’est un peu tous les inconvénients du mariage sans les avantages.
Je continue à gérer toute la logistique : les courses, le ménage (je me fais aider), le rangement, la scolarité… Bref, tout le quotidien.
Ce n’est pas que du bonheur quand vous rentrez le lundi matin pour retrouver l’appartement en chantier, et sans café. Mais on s’habitue, on laisse glisser. Parfois, j’envoie encore un mail incendiaire, mais cela arrive de moins en moins souvent. Et puis les enfants ont grandi : en six ans maintenant à vivre avec moi cinq jours sur sept, ils ont appris à respecter mes règles pour la maison.
Pour Sabrina de Dinechin, médiatrice familiale et autrice de Parents séparés : mode d’emploi, si ce mode de garde permet une vraie stabilité pour les enfants, il peut être difficile à mettre en place pour les parents.
« Pour les parents, ce mode de vie peut être coûteux. En premier lieu, il nécessite d’avoir trois lieux de vie, mais ce n’est pas tout. Il demande aussi une organisation au sein de l’appartement extrêmement cadrée et claire : qui nettoie ? Qui fait les courses ? Cette situation peut faire perdurer des conflits que l’on croyait terminés au moment de la séparation. Et souvent, ce sont les détails qui peuvent fâcher. »
L’appart des enfants de divorcés
Et les enfants dans tout ça ? Ils vont très bien. Ils sont chez eux, ils n’ont pas de problème logistique comme des cahiers ou des cours oubliés chez l’un ou chez l’autre, et ils semblent heureux. Ils m’ont d’ailleurs dit au détour d’une conversation qu’ils se sentaient aujourd’hui bien mieux qu’à la fin de ma relation avec leur père, et que la « maison » était devenue beaucoup plus calme.
Quand je pars, ils me disent souvent « Tu vas chez toi ? », ils adorent mon mini-appartement et s’en disputent déjà l’appropriation !
Bien sûr, ce sont des enfants de parents séparés, mais je ne pense pas qu’à l’heure actuelle cela pose problème dans leur vie sociale : bien que séparés, nous communiquons énormément, nous partageons les décisions en ce qui concerne les enfants, comme tous les parents et comme tous les parents nous ne sommes pas toujours d’accord.
Des hauts, des bas… Et le regard des autres
Quand j’explique mon mode de garde, j’ai souvent deux types de réactions très différentes. Dans le premier cas, les gens trouvent ça génial, novateur et sont impressionnés par ma gestion de la logistique et de l’agenda.
Dans le second, ils crient au scandale : ils disent que cela ne peut pas durer, et que nous ne pourrons jamais (nous, les adultes) refaire nos vies dans ces conditions. Ils s’inquiètent aussi du coût financier de cet arrangement.
Je leur réponds que cela fait six ans que cela dure avec des hauts et des bas et que nos enfants vont bien. Ils quitteront le nid d’ici peu.
De notre côté, nous avons chacun eu des relations, sur lesquelles cette organisation n’a pas eu de conséquences : en prenant le temps de l’expliquer à nos partenaires, ils ont compris.
Côté financier, je vois mes économies fondre, mais ça en vaut la peine ! Bien sûr, si cette solution nous convient, ce n’est peut-être pas forcément la bonne pour vous. À chacun sa façon de vivre et d’être, après tout… Tous les parents bien intentionnés essaient tous de faire au mieux pour leurs enfants. Le plus important est de trouver son équilibre, idéalement sans être jugé…
Aux parents qui souhaiteraient tenter l’expérience, Sabrina de Dedinechin donne les conseils suivants :
« Pour que tout se passe au mieux, il est important de poser le cadre de cette cohabitation : les détails du quotidien, la présence ou non des nouveaux partenaires des parents, la gestion du temps de garde de l’un ou de l’autre… Il ne faut pas hésiter à mettre ces arrangements par écrit, ou à faire appel à un médiateur neutre et impartial. Par ailleurs, il est capital de savoir si ce mode de vie correspond au tempérament des enfants. Pour savoir s’il peut leur convenir, l’âge ou leur scolarité ne sont pas les seuls critères à prendre en compte : c’est avant tout une question de personnalité. »
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