« N’oubliez jamais qu’il suffira d’une crise politique, économique ou religieuse pour que les droits des femmes soient remis en question. Ces droits ne sont jamais acquis. Vous devrez rester vigilantes votre vie durant. »
Cette citation de Simone de Beauvoir nous revient en tête face aux résultats de l’étude publiée par l’organisation britannique Theirworld, engagée pour l’accès à l’éducation des enfants.
S’ils illustrent si bien ce célèbre avertissement, c’est parce qu’ils montrent l’impact de la crise sanitaire sur nos comportements et surtout à quel point les filles et les jeunes femmes se retrouvent désormais à assurer la majeure partie des corvées à la maison : 66% des filles et jeunes femmes entre 14 et 24 ans affirment passer plus de temps à cuisiner pour leur famille en raison de la pandémie, en comparaison aux garçons du même âge, qui ne sont que 31%. Et ce même écart est visible pour d’autres tâches ménagères : les courses, le ménage, ou le fait de s’occuper d’autres membres de la famille.
Un retour en arrière global
« Les découvertes de cette étude montre que quand les filles sont coincées hors de l’école, elles peuvent facilement se retrouver piégées dans des rôles traditionnels qui peuvent mettre leur éducation en danger » estime Sarah Brown
de l’organisation Theirworld.
Ces données font écho à d’autres : à l’automne dernier, ONU Femmes a alerté sur le fait que les progrès acquis en matière d’égalité femmes-hommes ces 25 dernières années pourraient être balayés par la pandémie mondiale. Différentes enquêtes ont montré que ce sont toujours les femmes qui exécutent la majeure partie du travail non rémunéré lié à la vie du foyer.
En 2015, une étude menée en France montrait déjà que sur la même tranche d’âge des ados et jeunes adultes, l’écart entre l’implication des filles et celle des garçons au sujet des corvées était déjà important : largement plus de temps libre pour ces messieurs, tandis que les jeunes femmes consacraient 44 minutes de plus qu’eux aux tâches ménagères.
Le contexte actuel n’aide clairement pas à inverser la tendance — pire, on dirait plutôt qu’il l’aggrave…
Le fait que les adolescentes d’aujourd’hui aient déjà pris le pli de la gestion du foyer et de la charge mentale au sein de leur propre famille, souvent au détriment de leur avenir, devrait nous inquiéter sur notre capacité à laisser se réinstaller des normes qu’on croyait révolues.
À lire aussi : La charge mentale concernant les tâches ménagères
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Les Commentaires
Pour moi, c'était vraiment un retour en arrière niveau égalité, à tous les niveaux. L'école à distance, c'est pas la même chose si tu as tes parents pour t'aider ou non, si tu dois partager un unique PC avec toute ta famille, si tu as ta propre chambre pour être au calme ou si tu la partage etc.
Il y a quelques années, j'ai travaillé en CDI de collège REP+ et j'ai pas mal repensé à mes anciens élèves lors de cette période. Pour certains, je doute qu'ils avaient un PC ou même un smartphone connecté dans leur famille... (souvent ils venaient au CDI justement parce que c'était leur seul accès à un PC). Je me demande vraiment comment ils ont fait même si je ne doute pas de l'investissement des profs, ce ne sont pas des magiciens...
Et quelle surprise que les filles soient plus touchées... sachant qu'on a encore malheureusement tendance à penser que les études des petites filles sont moins importantes que celles des garçons et qu'on leur demande plus de participer aux tâches ménagères que leurs frères en moyenne... c'était inévitable dans ce contexte.