En mai dernier, après y avoir réfléchi pendant plusieurs mois, je me suis lancée sur Instagram.
Au départ, je voulais simplement m’y marrer en publiant des photos de moi assez canon, tout en écrivant des légendes bien débiles, pour faire rire ma petite communauté.
La peur de déranger, un mauvais moteur
Ce passe-temps qui n’occupait que quelques minutes de mes journées s’est vite transformé en activité chronophage.
Je me suis laissée aspirer par l’humour de meufs dont je suis les stories, par les comptes de mes potes artistes qui publient des contenus dingues, et par les influenceuses mode, qui me nourrissent d’idées.
Ma présence sur ce réseau social m’a surtout permis de développer des liens plus ou moins étroits avec vous.
Chaque jour, je reçois des messages, souvent drôles, en réponse à mes stories débiles, qui ouvrent la porte à d’éventuelles conversations.
C’est là, dans mes DM, que quelque chose m’a frappée. Beaucoup d’abonnées commencent leurs messages par :
« Désolée de te déranger Kalindi, tu ne liras probablement pas mon message… »
Ou encore des :
« Pardon pour ma réponse pas très drôle à ta story. »
Et pour finir des :
« Si tu ne réponds jamais, je comprendrai, je me doute que tu as mieux à faire que de répondre à mon message. »
Le manque de confiance en soi des jeunes femmes
Au début, j’écrivais des textes rassurants, pour expliquer à ces meufs qu’elles ne me dérangeaient pas du tout, et qu’au contraire j’étais contente de donner suite à leurs questions.
Mais je ne suis pas sûre que cette méthode au cas par cas soit finalement très efficace.
Je me suis rendue compte, en arrivant chez madmoiZelle, que BEAUCOUP de lectrices souffraient d’ailleurs d’une difficulté à prendre leur place.
Et ça m’inquiète parce que si cette difficulté transparaît sur les réseaux ou le forum, qu’est ce que ça doit être dans la vie ?!
Ces jeunes femmes qui ont peur de déranger en permanence, je les croise partout : au restaurant, au travail et souvent en soirées.
Elles se recroquevillent sur une chaise, une bière à la main, souvent écrasée par les personnalités d’en face, qui beuglent et gesticulent, persuadées d’être les stars de la soirée.
Pas plus tard que la semaine dernière, j’étais chez un couple d’amis dont l’un fêtait ses 28 ans. L’appart avait beau être grand, il était bondé, et surtout de mecs.
Ensemble, ils hurlaient, décidaient de la musique et investissaient la salle de bain pour y faire des photos.
Littéralement ratatinées par la lourdeur des fêtards bruyants, plusieurs meufs restaient dans la cuisine, près de la fenêtre, et discutaient plus doucement…
Quand une femme, légitime sur un sujet, s’efface
L’une d’entre elles, interne en médecine, racontait ses journées à une de ses copines. Moi, j’écoutais d’une oreille distraite en me servant une margarita.
Les mecs sont à ce même moment entrés dans la cuisine et ont entamé une discussion sur les dommages que peuvent causer la drogue sur le système nerveux.
L’alcool étant présent, toute exactitude scientifique était bien sûr absente de leurs échanges. Clara, la fameuse interne, a parlé tout bas pour étayer les propos de VRAIES informations. L’un de ses potes a hurlé :
« T’as dit quoi Clara ? J’ai pas entendu ! »
La jeune femme a répondu d’un discret :
« Ah, rien, on s’en fout ».
Et ça m’a rendue. ZIN. ZIN.
Bon sang, elle avait toutes les cartes en main pour apprendre quelque chose à ses propres potes mais s’est littéralement effacée !
Pourquoi ? Probablement parce qu’il est facile d’être déstabilisée par l’excès de confiance que dégagent certaines personnes…
Il y a des gens comme ça, qui ont des énergies solaires, ou simplement qui parlent très fort et devant lesquels s’écraser semble être la solution la moins éprouvante.
Oser prendre de la place, un travail de longue haleine
Tenir tête, imposer sa place, ça demande de se jeter à l’eau et d’assumer tout haut son savoir, ses opinions. Et c’est dur, j’en conviens.
J’ai moi-même mis du temps à oser montrer que j’existais. Ça m’a demandé des années d’effort,
une thérapie par le théâtre et le soutien de ma chère mère.
La mère en question ♥
Bon sang ce que ce travail a été salvateur.
Parfois, je redeviens timide. Surtout quand je donne mon opinion dans un micro. Mais j’ai transformé ma peur en énergie positive, une sorte de trac utile, qui donne des ailes.
Alors j’ai envie d’aider celles et ceux qui s’excusent encore et toujours d’exister, dans leur vie comme dans des DM Instagram.
Comment prendre sa place ?
Je vais te prodiguer des conseils (certains délivrés par mes profs de théâtre) qui pourront te sembler un peu simplistes, mais qui sont pourtant la base d’une évolution vers notre objectif commun à toutes : trouver une place.
Que ce soit en soirée, au bureau, entre potes, dans ton couple, pour ne plus avoir peur de t’exprimer, il faut…
Prendre conscience de ton unicité
Ça ne veut rien dire ? En fait si, ça veut TOUT dire. Tu ne ressembles à personne d’autre. Tu es unique. Ton point de vue va donc forcément apporter quelque chose à un débat.
Même si ton opinion est la même que celle de ton voisin, tu ne l’exprimeras jamais de la même manière. Tu pourras donc convaincre mieux que lui, ou moins bien. Dans ce second cas, ça n’est pas grave.
C’est le jeu.
Rester fidèle à tes idées
Ne pas se laisser influencer par l’avis des autres, c’est une vraie force qui t’aidera à approfondir la conscience de ton unicité. Par ailleurs, les autres sauront noter cette force, et même t’admirer pour elle !
Ne pas te laisser abattre par une sensation d’embarras
— Bordel, j’ai voulu faire une vanne et j’ai fait un four… — J’ai bégayé. — J’ai postillonné devant tout le monde en expliquant mon idée. — J’ai perdu le fil de mes pensées en déroulant ma théorie.
Toutes ces situations semblent hyper gênantes de prime abord.
Mais rassure-toi, elles sont probablement déjà arrivées à… tout le monde. Et ces situations d’embarras vont disparaître petit à petit.
Faire un bide, par exemple, quand on essaye l’humour, ça fait aussi partie du jeu, et de l’apprentissage. Il paraît que pour une bonne vanne, il y a 4 ou 5 ratés.
Bégayer, ça traduit du stress, et ça arrive même aux professionnels des symposiums. Crois-moi, j’ai eu des cours de conférence pendant mes études supérieures, et même les plus talentueux font des écarts de diction !
Petit à petit, tu verras que la sensation d’embarras s’amenuise, que ces petits ratés t’atteignent moins. Ils ne seront, avec le temps, plus un facteur bloquant, et te feront même marrer.
N’aie pas peur de déranger
Il ne faut d’après moi JAMAIS avoir peur de déranger quelqu’un.
L’expérience m’a appris qu’une demande est bien mieux prise en compte si l’on formule une requête claire, exempte de : « Je sais que vous avez mieux à faire que de me répondre, mais… ».
Ce type de phrases peut te décrédibiliser. Au contraire, croire en toi et à la force de ta demande engage souvent un interlocuteur à t’écouter avec attention.
Crois en toi, et les autres croiront en toi aussi. Je ne dis pas que c’est systématique, mais ça marche plutôt bien.
Ne te décourage pas toi-même
« Oh, inutile que je postule à cet emploi. De toute façon ça ne marchera pas, j’ai même pas un bac +18. »
Non, ce qui est inutile, c’est de toi-même te descendre.
Pars plutôt avec une énergie positive et postule, même si tu ne colles pas à 100% avec l’annonce. Parfois, c’est une personnalité qui fait la différence. Alors lance-toi !
Au mieux, ton audace sera récompensée par une entrevue et/ou une embauche, au pire tu auras essayé. C’est déjà ça.
Connais tes qualités
Je sais, parfois on pense qu’on en a aucune. Mais une personne sans qualité, guess what, ÇA N’EXISTE PAS.
Munis-toi d’un cahier et note dedans toutes tes réussites dans une colonne. Même les plus petites. Dans une seconde colonne, écris les qualités qui t’ont permis d’accéder à ces réussites.
Sur une autre page, inscris en gros caractères ces mêmes qualités. Cette page leur sera entièrement dédiée. Et appuie-toi sur ce contenu pour oser prendre ta place !
Voilà douce lectrice, avec ces quelques conseils, peut-être arriveras-tu davantage à t’imposer.
Et j’espère que la prochaine fois, dans mes DM, j’aurai davantage de messages de type :
« Salut Kalindi, j’ai une question à te poser ! »
Ou encore des :
« Hello, je viens de voir que tu cherches une stagiaire ciné/séries. Je t’écris pour candidater ! »
Allez, on arrête de s’excuser d’être là, et on a le courage de ses opinions, ok ? Je crois en toi !
À lire aussi : Je suis extravertie, ça ne veut pas dire que j’ai confiance en moi
Écoutez Laisse-moi kiffer, le podcast de recommandations culturelles de Madmoizelle.
Les Commentaires
Quand on y pense, il y a tellement de personnes qui rabaissent à des moments où on se construit en tant que personne, en tant que femme, qu'après sa brise notre confiance en soi. Quand j'ai lu dans l'article le passage sur les internes en médecine, je me suis reconnue. Finalement à être écrasée par d'autres, j'ose plus ouvrir ma bouche. Un jour en étant ado, j'avais dit à mon ex avec qui je suis restée 7 ans, autant vous dire que c'est long 7 ans sans ouvrir la bouche, je suis "culturée". Oui oui j'avais dit "culturée" au lieu de cultivée. Bref à cause de ça, dès que j'ouvrais la bouche on me disait de me taire parce que j'étais "culturée" ! Donc au final j'ai passé 7 ans à m'excuser de parler !
Et après ça, libération, le célibat c'est ouvert à moi et là j'ai pu m'affirmer, dire ce que je voulais, comme je voulais sans m'excuser. A dire que si on m'aime pas ou si on me trouve débile je m'en fous, l'important c'est de savoir qui on est et de s'affirmer !