Aller se baigner au onsen : une expérience franchement incontournable au Japon tellement les locaux en sont friands… et que j’attendais avec un peu de crainte par-dessus mon excitation. Le principe est simple : des sources d’eau chaude exploitées en thermes, ouvertes à tous, à un prix d’entrée variable. La visite requiert peu de matériel puisque la tenue… c’est qu’il n’y a pas de tenue !
Les onsens, une tradition tenace
Les Japonais s’immergent dans de l’eau chaude depuis toujours : les sources d’eau chaude sont très nombreuses, du fait de l’origine volcanique de l’archipel. D’abord associé au culte shinto, où la notion de purification est très importante, le bain est aujourd’hui un moment de détente et de relaxation. On recense plus de 3000 établissements thermaux au Japon, sans compter naturellement les onsens factices, appelés « sentos », qui sont alimentés en eau du robinet.
Une eau à plus de 25° (parfois beaucoup, beaucoup plus) et des minéraux : voilà les deux critères pour être classé en onsen. Certaines eaux sont chargées en chlorure de sodium ou en soufre (celles- là, on les sent arriver de loin, si vous voyez ce que je veux dire) ; on leur prête des vertus thérapeutiques. Heureusement, pas besoin de souffrir de rhumatisme pour en profiter : les onsens, c’est de la médecine douce pour tout le monde !
Les ambiances des onsens sont très variables selon les lieux, donc je ne serais pas exhaustive. En extérieur ou dans un hôtel, le passage dans un bain japonais sera très différent. À Jigokudani par exemple, les singes des neiges ont l’habitude l’hiver de se réchauffer dans les bassins extérieurs… avec ceux dont l’eau est dopée avec un léger courant électrique, c’est ce qui me semble le plus farfelu. Généralement, les onsens misent sur des vues magnifiques – paysage de montagne ou de bord de mer. Les ryokans, auberges traditionnelles, proposent des bains privatifs à leur clientèle – un service apprécié mais onéreux. À l’opposé de l’échelle tarifaire, certains onsens font office de bains publics. Car dans un onsen, on se lave !
Onsen, mode d’emploi
« Interdit aux personnes tatouées », c’est ce qu’on lit parfois à l’entrée d’un bain. La direction n’en veut pas spécialement à l’étoile sur votre omoplate : elle essaie simplement d’éviter la présence de yakuzas, reconnaissables à leurs tatouages-fresques. C’est mauvais pour la réputation ! Depuis la fin du 19ème siècle, les onsens ne sont plus mixtes pour la plupart ; les jeunes enfants peuvent aller indifféremment du côté hommes ou femmes.
La première chose que l’on retire dans un onsen, ce sont ses chaussures. À la place, de délicieuses pantoufles « open-toe » taille unique sont fournies pour se traîner jusqu’à l’entrée du vestiaire femmes : ensuite, pieds nus jusqu’aux casiers ou paniers. Une fois arrivé là, les choses sont simples : à poil et que ça saute, comme tout le monde. On a droit à une petite serviette, pour vaguement masquer son sexe… mais la pudeur n’est pas bien vue. Il faudra de toute façon l’abandonner car l’étape n°1 du bain à la japonaise veut qu’on se lave à fond avant toute chose.
À la maison, c’est pareil. Les salles de bains comportent douche et baignoire, et on ne rentre jamais dans la seconde sans s’être récuré dans la première. L’eau du bain sert à toute la famille ; elle est ensuite dirigée vers le lave-linge. Pas de gaspillage.
Du savon et du calme
L’espace douche n’est pas situé dans le vestiaire mais dans l’espace des bains : un mur équipé de miroirs, pomme de douche, tabourets en plastique et seaux. On se lave assis : les ancien-ne-s se rincent au seau, mais vous ne commettrez pas d’impair en utilisant la douche. La petite serviette sert à se frotter la peau, pour un lavage énergique ! Ça n’est qu’une fois bien propre qu’on mérite de se plonger dans l’eau chaude.
On ne nage pas dans un onsen : on s’assoit dans le fond de la piscine ou sur une marche selon qu’on trouve l’eau brûlante ou très brûlante, on discute à voix basse, on profite du paysage. Trop chaud ? Une douche et c’est reparti. Le bonheur de ne rien faire !
Lectrice, je ne vais pas te mentir. Si déjà, dans la rue, les gens t’observent du coin de l’œil, ça n’est pas en tenue d’Ève que ça va s’arranger. On te surveillera plus ou moins discrètement pour s’assurer que tu respectes les usages… et pour confirmer que les Américaines (au Japon, les Occidentaux passent tous pour des citoyens des US) sont faites comme les asiatiques.
Toutes sortes de gens se croisent au onsen. Les jeunes enfants, les pré-ados, les jeunes adultes, les personnes âgées, ceux qui sont venus en jogging et ceux qui sortent du boulot, les salarymen dans le cadre d’un séminaire, des familles, qui cohabitent dans une nudité tranquille. L’Europe du Nord connaît ça avec les saunas, où le maillot de bain n’a pas sa place. Quant à moi, me baigner à poil avec des inconnus, ça va, avec des proches, c’est autre chose ! Je suis malgré tout convaincue que mon adolescence aurait été plus facile si j’avais pu constater que sous les vêtements, les corps sont osseux ou gras, musclés ou pas, la peau tachée ou lisse, les seins ronds, plats, fermes, écartés, pendouillant, absents ou généreux… une vision plus saine que le fessier sans cellulite des abribus et des vitrines de pharmacie.
Et toi, as-tu fait l’expérience de ce type de bains publics ? Es-tu à l’aise avec la nudité ?
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