Comme beaucoup de filles, j’adore danser.
Ah, l’ivresse et la joie de se tortiller sur une piste de danse, dans un mariage, en boîte de nuit, ou même au milieu de son salon ou sous la douche ! Laisser parler son corps et s’abandonner à la musique, juste la musique, seulement la musique…
Malheureusement, comme beaucoup de filles, je danse comme un pied
(Un pied bot de paysan du Larzac, il va s’en dire… pas un pied cubain).
Ah, l’immense moment de solitude que celui où, alors que tu es toute entière à ton rythme, un homme s’élance vers toi en s’écriant : « laissez moi passer, je suis docteur ! Je crois qu’elle fait une crise d’épilepsie ! ».
Ne rie pas, j’exagère à peine.
La seule solution pour pouvoir continuer à danser dans un lieu public sans déclencher de fou rire ou de mouvement de panique : prendre des cours. Et apprendre à se tortiller en rythme, enfin.
Il se trouve justement que j’ai en ma possession un atout non négligeable pour qui veut se lancer dans l’apprentissage d’une danse, quelqu’elle soit : un chéri qui aime danser, aussi.
Autrement dit, quelqu’un qui pourra m’accompagner au cours et derrière lequel je pourrai éventuellement me cacher. Ca a son importance. Je suis une fille prévoyante.
Rendez-vous est donc pris pour un premier cours de danse.
Nous avons jeté notre dévolu sur la salsa car, rusée et maligne comme le teckel à poil ras, il me semble que c’est là une danse des plus intuitives, et son apprentissage ne devrait donc pas être extrêmement technique.
(Nous reparlerons plus tard du QI effectif du teckel à poil ras)
La salle est petite, parquet en bois et grand miroir sur tout un pan de mur.
La prof est petite, tenue noire moulante et longue queue de cheval qui s’agite au moindre déhanché.
Les autres élèves sont timides, agglutinés en couple ou recroquevillés en solo dans leur coin. Premier point positif : ici, peut-être que pour une fois je ne serai pas la plus quiche, mes compagnons d’infortune ont bien l’air d’avoir eux aussi deux pieds bots (gauches).
Pour commencer, l’échauffement
Tous face au miroir, nous essayons de reproduire les pas de la prof. Ok, mais elle a combien de pieds pour arriver à faire ça elle ? Et c’est par où la sortie ? Et y’a pas moyen de mettre une musique moins rapide ? Genre slow ? Non ?
On passe enfin aux choses sérieuses
On se met en couple et on apprend les premiers pas de bases. Sur un rythme 1-2-3, 5-6-7 (oui il n’y a pas de 4 en salsa, ne me demande pas pourquoi), pied droit arrière, pied gauche avant, on réapprend à marcher. Rien de bien sorcier, la confiance remonte.
Mais si, comme leur nom l’indique, les pas de base sont basiques, les autres enchainements, en revanche, le sont beaucoup moins.
Et ça, tu auras tous les cours suivants pour le découvrir.
Aïe-ouille-les-adducteurs
Au bout de 3 mois de cours assidus, voilà les premières conclusions que l’on peut tirer de cette expérience :
1 – Prendre un cours de salsa n’ôte aucun complexe
D’abord, il y a la prof, une bombe latine qui a le rythme dans le sang et les reins cambrés au bon endroit. Ensuite, il y a tous ceux (enfin, toutes celles) qui n’étaient pas plus douées que toi au commencement, mais qui ont l’air d’avoir maintenant beaucoup plus d’aisance. C’est trop injuste, braillais-je tel un Caliméro éliminé de la finale de PopStar. C’est comme ça, me répond la prof, le sens du rythme, on l’a ou on l’a pas.
2 – Pour danser la salsa, le principal c’est le planté de bâton déhanché.
En fait, c’est même ce qui fait toute la beauté de cette danse. Ce qui fait qu’un danseur de salsa est bandant – ou pas. En gros, c’est ce qu’on cherche à apprendre en prenant des cours de salsa, parce que ta jugeotte de teckel te souffle qu’une fois que tu maîtriseras ça, tu seras la reine du monde dancefloor.
Sauf que… ce déhanché se fait à l’inverse d’un déhanché naturel. Un peu dur à expliquer (je ne suis d’ailleurs pas sûre d’avoir tout compris), mais en gros : quand on pratique, plus ça te paraît contre-nature, plus y’a des chances que tu tiennes le bon mouvement.
Petit hic : si la nature a fait en sorte que notre hanche remonte quand on tend la jambe, et non pas quand on la plie, c’est qu’il doit y avoir une bonne raison. Plusieurs bonnes raisons même, qui s’appellent : lumbago, luxure de hanche, tour de rein, ou encore torture des lombaires.
Voilà en somme ce dont tu souffriras en sortant du cours. A quatre pattes, bien sûr.
3 – Malgré tout, on apprend
Et alors qu’on aurait pas cru pouvoir se souvenir de tous ces pas, les enchaînements finissent par se faire sans difficulté (à défaut d’avoir le déhanché du guépard, j’ai une mémoire d’éléphant… On fait avec ce qu’on a !)
4 – Un cours de salsa n’est pas un speed dating
Est-ce la nature de cette danse, ce cours en particulier, ma ville en générale, toujours est-il qu’à ce cours, nous somme environ 10 filles et… 6 garçons. Oui, tu l’as bien compris, pour une fille célibataire, s’inscrire à un cours de salsa pour rencontrer l’âme sœur s’avèrera être un très mauvais calcul. Surtout que les concurrentes n’ont absolument rien du vilain petit canard. Une fois la glace brisée et les premiers pas maîtrisés, on serait même plutôt dans le trip belettes sous acides. La grâce du cougar, l’élégance du papillon, l’appétit de la chatte en chaleur. Quant aux 6 mecs en face, inutile de préciser que la grande majorité d’entres eux sont là juste parce qu’ils ont pigés le truc, et sont passablement mort-de-faim. Reste donc environ… un mec normal et potable. Le mien.
5 – D’où la terrible et ultime conclusion : pour une fille maquée, s’inscrire avec son chéri à un cours de salsa n’est pas forcément la meilleure idée qui soit…
D’autant qu’au vu de cette inégale répartition des sexes, et sachant que la salsa se danse en couple, les cavaliers tournent, fatalement. Et regarder son chéri danser collé-serré avec une bombasse déchaînée pendant que tu attends sagement sur le bord de la piste est… comment dire… une expérience enrichissante. De celles qui te font penser « là, j’aurais p’tet pas dû », avant de te souvenir qu’en plus, tu as payé, pour ça.
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