C’est un cadeau de Noël précoce et empoisonné que fait Le Monde aux grands noms du porno français. Dans une enquête tentaculaire en quatre parties, Lorraine de Foucher, Nicolas Chapuis et Samuel Laurent font tomber des têtes.
L’investigation fait suite à la mise en examen pour viol de quatre acteurs porno de la plateforme French Bukkake et à la menace du CSA de bloquer cinq sites pour adultes s’ils n’agissent pas pour empêcher les mineurs d’accéder à leur contenu.
J’ai lu, non sans remontées gastriques face aux détails sordides de l’affaire, le premier épisode de la série : Le réseau, les recruteurs et les proies. En voici un résumé. Gros trigger warning violences sexuelles et viols, malheureusement.
Une enquête colossale sur le porno français
Cette semaine, Le Monde publie une enquête en quatre volets sur l’affaire de violences sexuelles dans le porno français. À partir de ce jour, un épisode sera mis en ligne chaque jour jusqu’au samedi 18 décembre.
Un travail gigantesque qui s’appuie sur deux années d’investigation menées par les gendarmes, avec les témoignages des 53 victimes identifiées à ce jour, l’arrestation de huit producteurs et acteurs mis en examen pour viols en réunion, traite d’êtres humains, diffusion de l’enregistrement d’images relatives à la commission d’une atteinte volontaire à l’intégrité de la personne et proxénétisme, et des « milliers de procès-verbaux ».
L’affaire qui avait été révélée par Le Parisien secoue toute l’industrie du porno en France et a pour objectif de « sortir pour la première fois la pornographie du flou juridique qui l’entoure en envisageant de la traiter comme du proxénétisme, c’est-à-dire le fait de s’enrichir en exploitant des rapports sexuels tarifés. »
Dans ce premier volet, l’enquête fait la lumière sur le recrutement des actrices pour tourner des vidéos présentées, à tort, comme étant du porno amateur et anonyme.
D’après Le Monde, plus de 500 hommes qui auraient participé à des bukkake, scènes dans lesquelles plusieurs hommes éjaculent sur le visage d’une femme, ont été identifiés et « pourraient faire l’objet de poursuites ».
« Des viols déguisés sous prétexte de vidéos »
L’enquête commence par le détail de l’infiltration d’une plateforme pornographique spécialisée dans le bukkake par la police. En mars 2020, 33 hommes seraient venus tourner une scène après avoir reçu cet email :
« BUKKAKE le dimanche 8 mars 13 heures, 11 avenue Léon-Bollée, 75013 Paris. 2 grosses éjacs + 1 semaine d’abonnement chez french-bukakke. Impératif : cagoule + carte d’identité. »
Problème, la victime censée tourner avec eux n’était pas du tout d’accord. Malgré ses plaintes et son refus de jouer la scène, elle a tout de même dû s’y plier sous la pression de l’équipe qui lui aurait simplement répondu : « tu vas le faire, tu vas être souriante, tu n’as pas le choix. » Glaçant.
L’un des membres du réseau mis en cause témoigne d’ailleurs :
« C’étaient des viols déguisés sous prétexte de vidéos. Acteurs et producteurs avaient toutes les libertés. »
Le plus effrayant étant que ce témoignage n’est celui que d’une victime parmi une cinquantaine identifiées à ce jour…
Un réseau de prédateurs bien ficelé
La première partie de l’enquête révèle dans les détails les techniques qu’utilisent les recruteurs pour appâter des jeunes femmes fragiles, ayant 23 ans en moyenne, souvent en situation de précarité, et « sexuellement inexpérimentées ».
L’investigation retrace les méthodes utilisées par Julien D., un père de famille qui sévit sous un faux profil de mannequin nommée Axelle. Derrière sa fausse identité, il cible « des centaines de jeunes femmes » vulnérables, devient leur amie, collecte des informations et s’immisce dans leurs failles à la manière d’un dangereux criminel.
Puis au bout de quelques mois, il leur propose une solution toute faite : le métier d’escort. Après s’être présenté à elles comme un client sous son vrai visage, il les viole et les arnaque, si bien qu’elles ne voient jamais la couleur de l’argent promis. Et ce n’est pas terminé : une fois traumatisées, les victimes se tournent de nouveau vers leur amie virtuelle Axelle, qui n’est autre que… leur bourreau.
Julien D. les encourage alors à tourner des vidéos porno prétendument anonymes et privées pour se faire de l’argent.
Le recruteur met ensuite ses victimes en contact avec un producteur. C’est là qu’intervient Pascal Ollitrault, dit Pascal OP dans le milieu, patron, réalisateur et acteur de sa plateforme French Bukkake connu pour sa misogynie, son racisme et son homophobie. Un homme charmant, en somme.
Si Julien D. nie les viols, il admet avoir arnaqué les jeunes femmes recrutées. L’enquête a par la suite révélé qu’il « demandait que les vidéos soient toujours plus “hard” pour les victimes. ».
L’enquête de la police portant également sur les agissements d’un certain Matthieu L., dit Matt Hadix, producteur de films pour Jacquie et Michel, il est fort à parier que son nom risque d’apparaître dans les prochains épisodes.
Découvrez le premier volet dans son intégralité sur le site du Monde et le résumé du deuxième épisode, La mécanique des larmes et de la violence. Tout un programme.
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Crédits photos : Junior Teixeira et Kindel Media (Pexels)
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