Avez-vous une œuvre doudou ? Celle que vous lisez, re-lisez régulièrement ? Celle qui vous accompagne chaque été ou que vous réservez pour les soirées au froid mordant de l’hiver, lovées chez vous, bien au chaud ?
Celle dont je vais vous parler est la mienne, enfin celle à laquelle mon libraire m’a initiée il n’y a pas si longtemps de cela, et pour qui je ressens à son égard une reconnaissance éternelle.
Aujourd’hui, parlons de l’œuvre immense de l’artiste Bill Watterson : Calvin & Hobbes.
Bill Watterson, l’auteur mystérieux
Il faut savoir que Bill Watterson est un auteur discret. Rares sont ses signes de vie envoyés vers l’extérieur : il vit plutôt reclus au fin fond de l’Amérique.
La dernière fois qu’on a eu affaire à lui, c’est lorsqu’il a été élu président d’honneur du festival d’Angoulême où il avait fourni des originaux de Calvin et Hobbes pour une exposition qui lui était consacrée.
La personnalité secrète de l’auteur participe à mystifier encore plus son œuvre, pour laquelle il refuse d’ailleurs qu’il y ait des produits dérivés. Ne comptez ni sur une peluche Hobbes, ni sur une obscure tentative de dessin animé en 3D.
Calvin & Hobbes est un monument de la bande dessinée, et la détourner d’une manière ou d’une autre risquerait de la ternir. Est-ce excessif ? Rien n’est jamais excessif face à un chef-d’œuvre.
C’est bien beau de répéter que c’est une merveille. Mais qu’est-ce qui est si bien dans cette série ? Allez, installez-vous, que je vous raconte.
L’anti-héros et sa double lecture
Calvin & Hobbes est une série de strips de bande dessinée, qui met en scène un petit garçon blond au poil hirsute et un tigre, plus ou moins en peluche.
Calvin est un sacré garnement, à l’affût de la première bêtise à commettre ou de la première contrariété à susciter chez ses parents. Forcément, cela permet de créer beaucoup plus de situations absurdes que s’il était trop calme et sympa.
Il est une figure d’anti-héros, et semble avoir inspiré bien des lignées de garnements plus ou moins dociles, de Titeuf à l’élève Ducobu, en passant par Cédric ou même, dans un autre style, Mortelle Adèle.
Calvin n’est pas le seul personnage à être digne d’intérêt. Hobbes est aussi une mine d’or !
Il est le tigre doudou qui prend vie, toujours prêt à assister Calvin dans ses bêtises, mais aussi à la rassurer, à le réconforter. Il est parfois d’une grande sagesse, d’autres fois plutôt crétin. En bref, ce duo fait des étincelles !
Ce que je préfère avec cette série, c’est l’hésitation perpétuelle entre l’existence réelle ou imaginaire du tigre dans les histoires. C’est un peu comme dans Toy Story, vous voyez.
Alors on se laisse tantôt croire que les histoires sont celles que se racontent l’enfant mises sur papier, tantôt que ce tigre est bien réel, un vrai tigre domestique. Ce qui permet une lecture des plus riches !
Une œuvre accessible à toutes les générations
Vous savez ce qui est aussi incroyablement formidable (préparez-vous à un champ lexical de l’éloge dans cet article, si ce n’est déjà fait) avec Calvin et Hobbes ? C’est sa faculté à trouver une résonance chez toutes les générations.
Non seulement elle ne vieillit pas et peut être lue avec énormément de plaisir aujourd’hui, mais elle a en plus la virtuosité de pouvoir se lire différemment selon l’âge avec lequel on s’y attaque.
Un jeune lecteur fraîchement converti à la lecture prendra du plaisir à découvrir les aventures fantasques de ce garçonnet impertinent – et un peu neuneu.
Mais les adultes eux aussi seront nourris par toutes les interrogations existentielles et pleines de vie de Calvin, et ne pourront que constater la profondeur infinie de ses paroles philosophiques.
L’art de savourer les petits bonheurs
En parlant de philosophie, il faut aussi que je vous parle de la faculté de l’œuvre à prôner les petits plaisirs. Ceux-ci se trouvent dans la proximité avec l’autre, dans l’amitié, dans la tendresse.
Mais ils sont aussi contemplatifs, que ça soit celui de regarder un ciel étoilé ou de profiter du calme de la nature.
Entre deux vacheries, Calvin sait apprécier avec beaucoup de maturité ce qui l’entoure, au point de devenir un personnage finalement très inspirant, pour les petits comme pour les grands.
Préserver son imagination d’enfant
Calvin et Hobbes, dans sa capacité à entretenir l’hésitation sur l’existence de Hobbes, dans sa célébration des farces de Calvin et sa tendance à faire de sa vie une folle péripétie à chaque instant même futile, tout en se montrant accessible et aussi très adulte dans son propos, est une merveilleuse célébration de l’imaginaire !
Les strips sont comme un refuge quand la vraie vie manque de piquant et de joie. Ils invitent à ne jamais taire l’enfant qui sommeille en chacun de nous, celui qui nous permet de voir la vie d’un autre oeil, qui permet positiver, d’y infuser de l’aventure au point d’en faire une folle épopée !
Lisez, relisez Calvin et Hobbes ! Vive l’imagination débridée et vive les bêtises !
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