Gingermind nous parlait il n’y a pas si longtemps de ces objets qui prennent un malin plaisir à nous troller. Aujourd’hui, je veux aller plus loin dans la dénonciation. Je veux parler de ces trucs en lesquels l’âme de Chucky la poupée qui tue s’est installée, de ces choses qui veulent notre peau. Un peu comme la boîte en haut de l’armoire que vous allez fatalement vous prendre en travers du minois.
Je dis « notre peau », même si je parle de mon combat personnel, parce que je sais qu’au fond, même les plus rationnel-le-s d’entre vous se sentent menacé-e-s. Non, ne le niez pas, je le sais : vous la sentez, cette ombre sinistre qui accompagne vos mouvements, ces ondes hostiles qui vous transpercent.
Oui, ce pied de table sur lequel vous venez de cogner votre orteil voulait votre peau.
De toute façon, c’est ça ou accepter le fait que nous sommes des boulets. Comme personnellement, le choix est vite fait, voici la liste des objets qui vont finir dans mon death note à force de me faire passer pour une andouille.
La glu
Ah ! La glu ! Cumulonimbus devant mon soleil, mouche sur mon clafoutis ! Comment un outil peut-il à ce point être à côté de la plaque et faire tout le contraire de ce qu’on lui demande ? Mais enfin ! C’est ce morceau de porcelaine que je t’ai demandé de coller sur le vase, pas mes doigts !
Une fois que la glu vous l’a mis dans le c… vous a eu-e, rien ne sert de se débattre. Parce qu’essayer de vous délivrer du fluide maléfique que le tube vous a fourbement craché dessus, c’est comme paniquer dans des sables mouvants : vous ne ferez qu’empirer les choses.
Ainsi, des cinq doigts fixés à un vase, c’est avec tout le contenu de votre chambre en passant par la litière du chat collé sur votre petit corps malingre que vous vous résoudrez à vous passer sous l’eau chaude pour cesser de ressembler à une tapette à mouche.
Vous vous en sortirez avec seulement quelques brûlures cette fois, mais la glu finira par vous avoir.
- Solution de secours : rachetez un putain de vase.
La chasse d’eau qui se tire toute seule
Les chasses d’eau sont inoffensives à partir du moment où on n’y met pas la tête. Cependant, je les soupçonne de ne rêver que d’une chose : noyer notre fragile postérieur
dans l’eau froide pleine de germes et de matière fécale qui les compose. Ce rêve se réalise malheureusement pour les chasses d’eau nouvelle génération. Je veux bien sûr parler des chasses d’eau automatiques qui se tirent toute seules.
Dès que l’on donne une liberté de mouvement aux chasses d’eau, c’en est fini de la pause pipi détente. Bien sûr, les génies à l’origine de cette « amélioration » partaient d’une bonne intention : celle de pallier l’étourderie de celles et ceux qui vont déposer un cadeau dans les toilettes et oublient de tirer la chasse.
Mais dans leur candeur, ce sont eux qui ont oublié à quel point les chasses d’eau sont mauvaises, et se foutent bien d’attendre que vous ayez terminé votre affaire. Elles, elles en veulent à notre partie tendre et sensible. Elles en veulent à nos fesses.
Alors imaginez un peu si elles parlaient.
– Iiihh mais j’avais pas fini ! – Le temps qui vous était imparti est écoulé. – Mais enfin je… – C’est fini. – Mais je faisais pipi ! – Avant l’heure, c’est pas l’heure, après l’heure, c’est plus l’heure. – … Et si je reviens faire caca ? – Je vous renvoie votre pêche d’où elle vient aussi sec. Si j’ose dire. – …
- Solution de secours : le pisse-debout. Pour la grosse commission, désolée, c’est foutu.
L’imprimante
Dans le cas de l’imprimante, j’accepte de nuancer mes propos. Peut-être que c’est juste la mienne qui était un aristocrate dans une autre vie, et qu’elle s’étouffe dans ses feuilles à l’idée d’être à mon service. Gratuitement. Tenez, je la vois baver de rage dans son encre. Tsss.
Pourtant je ne lui demande pas grand-chose. Juste de reconnaître que je l’ai déjà connectée en wifi cinquante-six fois dans la même semaine, et que ce n’est pas parce qu’elle se déconnecte l’air de rien que je vais oublier. Alors quand, au bout de deux heures de combat et de débat acharnés, elle daigne enfin commencer à me sortir la page que je lui avais demandée, je me jette dessus, tel le félin gracile.
J’t’aurai putain.
Tout ça pour, toujours tel le félin gracile, me ramasser sur le bord du bureau parce que c’était une feinte. Mon imprimante mène un combat long et difficile, mais elle finira par avoir ma peau et mes nerfs avec.
- Solution de secours : balancer l’imprimante par la fenêtre.
Les râpes à fromage
Il n’est nullement question ici des râpes à fromage électriques qui s’attaquent d’elles-mêmes à la pâte tendre pour le confort du petit bourgeois. Je vous parle des râpes à l’ancienne, les vraies râpes de guerrier-e-s, pour celles et ceux qui n’ont pas froid aux mains. Les vrai-e-s savent : un seul moment d’inattention, et votre jolie peau finit entre les crocs de la bête.
Elle n’attend que ça, la sauvage, l’indomptable ! Que vous tendiez la main dans le tiroir sans regarder, que vous l’attrapiez un peu maladroitement, ou que le fromage que vous lui frottez dessus s’amenuise jusqu’à anéantir la distance entre sa soif de sang et vos doigts…
Elle ne vous aura peut-être pas à tous les coups, mais à force de vous demander trop de concentration à chaque instant, vous finirez par oublier le plus important. Et vous frotterez votre râpe à fromage dans le mauvais sens pour la nettoyer, jusqu’à réaliser, mais trop tard, qu’elle se délecte à nouveau de votre savoureuse hémoglobine.
Ceci est mon sang. Bien dessiné.
- Solution de secours : les paquets de gruyère déjà râpé (ou alors : être moins con).
Il y a aussi les portes automatiques, dont je vous avais déjà parlé et qui finiront par dominer le monde. Et vous, pour faire dans le doux euphémisme, par quel(s) objet(s) vous sentez-vous menacé-e-s ?
Et si le film que vous alliez voir ce soir était une bouse ? Chaque semaine, Kalindi Ramphul vous offre son avis sur LE film à voir (ou pas) dans l’émission Le seul avis qui compte.
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