Il paraît que, statistiquement, le pire mois du monde, c’est celui de janvier. Je n’en crois rien. Janvier a le mérite de donner une impression de renouveau : souvent, on vient tout juste d’avoir des vacances et tout le monde est reposé. On a des bonnes résolutions et on se moque de celles des autres. Et puis très vite, on abandonne l’idée d’en avoir avec un plaisir non dissimulé : abandonner mes résolutions m’évoque la même sensation que quand je décide d’éteindre le réveil que j’avais mis tôt un dimanche matin pour travailler. C’est un sentiment aussi douillet et honteux que celui de procrastiner, en fait.
Novembre par contre, ça craint. Ça craint vraiment. Les vacances sont encore loin, il fait nuit de plus en plus tôt et les décorations de Noël ne viennent même pas réchauffer notre coeur meurtri par le ciel gris. Sérieusement, si novembre était une odeur, ce serait celle d’une andouillette à la sauce roquefort.
Voici quelques raisons un peu moins évidentes qui prouvent que le mois de novembre mériterait bien qu’on lui jette de l’acide à la tronche (ce que l’on s’empresserait probablement toutes de faire s’il en avait une, de tronche).
Ça commence un lendemain de soirée
Récapitulons ensemble les caractéristiques communes au lendemain de soirée :
- On a la tête dans un pâté de type compact rapport aux trop petit nombre d’heures pendant lesquelles on a dormi,
- Éventuellement, on souffre d’inconfort intestinal,
- Si on a abusé de l’alcool, on peut en plus de ça souffrir de l’effet dépressif de ces substances et d’un mal de crâne dû à la déshydratation,
- On a les cheveux gras à cause de la fumée et de tout ce qu’on a pu se prendre dessus.
Je vais t’ouvrir les yeux sur un truc que j’ai mis du temps à comprendre : novembre commence le premier novembre (bon alors oui, ça je le savais avant). Le premier novembre suit le 31 octobre. Le 31 octobre, c’est Halloween. Et à Halloween, souvent, on participe voire organise des soirées plus ou moins réussies.
Résultat : selon un sondage totalement hypothétique réalisé sur absolument personne, un français sur trois commence donc le mois avec ces symptômes peu agréables. Est-ce qu’il existe plus mauvais présage pour passer les trente jours qui suivent dans un semi-coma ? Je ne crois pas.
Notons que, pour le coup, c’est la même chose pour janvier, mais en pas pareil.
Même les jours feriés sont nuls
Aux Etats-Unis, ils ont Thanksgiving. Ne l’ayant jamais fêtée, cette fête m’apparaît comme auréolée d’un mystère fascinant. Moi aussi, j’ai envie de manger de la dinde et du pain de viande à côté de la cheminée avec la famille, les amis et les voisins. Moi aussi, j’ai envie de porter des pulls avec des rennes dessus et de regarder des épisodes de La Petite Maison dans la Prairie sous un plaid plein de poils*. Pour l’occasion, je te remets un petit coup de Nicole Westbrook :
Malheureusement, en France, nous n’avons rien de tel. Mais relativisons : le mois de novembre a son lot de festivités.
Le premier, on fête les Saints. Pour les non pratiquants et les non catholiques, ça revient surtout, la plupart du temps à ne pas avoir cours ou à ne pas aller au travail. Plus parlant encore, le lendemain on enchaîne avec la fête des morts. Si tu habites pas loin de là où sont enterrés tes proches décédés, tu as probablement déjà accompagné tes parents au cimetière pour y déposer quelques fleurs. Aller au cimetière en famille un jour de pluie, en voilà une activité sympathique ! Surtout si on finit la journée en jouant à des Chiffres et des Lettres dans la pénombre.
Et alors en plus dans les cimetières, j’ai jamais croisé Buffy. Les boules.
Et quand c’est terminé, on a à peine le temps de souffler après avoir célébré les décédés qu’on a droit à une nouvelle source de joie avec l’armistice le 11 du mois : fêter la fin d’une guerre et rendre hommage aux millions de morts qu’elle a engendrés. Ça fait partie de notre Histoire mais sur l’échelle du funk, c’est du Hélène Segara.
Tout ça pour dire que bordel, en novembre, on sait déconner.
*Cette description de Thanksgiving vous a été proposée par l’Amical du Cliché.
Novembre coûte un rein
Le mois maudit marque le début de l’hiver. Officiellement, bien sûr, on est toujours en automne, mais la partie joyeuse de la saison est déjà finie. On commence clairement à avoir froid, à sentir nos vestes se gorger d’eau chaque fois qu’on sort, à remarquer que nos écharpes de mi-saison ne sont plus suffisamment efficaces. Alors on prend une décision importante : garnir notre armoire de vêtements un peu plus chauds pour éviter de choper une trentième crève à éternuements massifs.
Et comme à chaque changement de saison, s’habiller ne revient plus à faire l’acquisition d’un t-shirt ou d’un jean de temps en temps : c’est carrément une refonte quasi-totale de ta penderie, ce qui représente un certain coût.
C’est par ailleurs à la fin d’un mois de novembre que j’ai connu pour la première fois les joies du découvert et de l’appel inquiet du banquier. Et, ce jour précis, novembre est devenu, pour moi, le croquemitaine du calendrier, le Sylvain Mirouf du magicien, la Vitaa de la pop.
Parce que le Beaujolais nouveau
Alors qu’en décembre, c’est la fête du Champagne et du lait de poule, alors que l’été est la saison du rosé et des citronnades, novembre, lui, nous propose de goûter à la nouvelle cuvée de Beaujolais Nouveau.
Tous les ans, je me mets au défi de trouver quelqu’un qui l’a aimé. Tous les ans, je fais chou blanc. Mais j’en profite également pour essayer de trouver des gens qui ne sont pas allés le déguster dans un bar bondé : parmi les majeurs dont je suis proche, il n’y en a aucun.
Pourquoi s’inflige-t-on donc ça ? Pourquoi sortons-nous, dans le froid et la pluie, pour aller tremper nos nez dans des verres pleins d’un liquide qu’on sait à l’avance qu’on n’aimera pas ? J’ai ma petite hypothèse sur la question : le réflexe d’autodestruction positive. On passe un mois pourri, alors on essaie de toucher le fond pour mieux rebondir ensuite. Je ne vois que ça.
James Van der Beek mimant la dégustation de Beaujolais Nouveau. Actors Studio.
Car oui, il faut bien garder en tête que ce calvaire se terminera bientôt, et que plus vite qu’on ne le croit, on se roulera de joie sous un sapin de Noël. Mais en attendant, viens donc nous dire quelles sont les petites choses qui te pourrissent novembre.
Écoutez Laisse-moi kiffer, le podcast de recommandations culturelles de Madmoizelle.
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