Le Nouvel An, c’est une question de division du temps et de calendrier. C’est un jour qui marque un renouveau, a une origine millénaire, et possède différentes significations et rites selon les cultures qui le célèbrent. Je souhaite revenir avec vous sur l’histoire du Nouvel An et sur certaines des traditions auxquelles ces célébrations ont donné lieu, mais loin loin loin dans le temps : pendant l’Antiquité !
Babylone
On pense que les premiers à vraiment fêter le premier de l’an étaient les Babyloniens, il y a à peu près 4000 ans. L’année commençait avec la première nouvelle Lune suivant le solstice de printemps : c’était une fête agraire et religieuse car on célébrait le dieu Mardouk, protecteur des récoltes. La fête à Babylone, c’était carrément mieux qu’à Ibiza : ça durait onze jours et c’était LA plus importante de toutes les célébrations dans cette culture !
On lit parfois que les Babyloniens s’adonnaient à des fêtes type orgiaques-sessouelles (c’était avant les campagnes de prévention contre les MST).Beaucoup ont fantasmé sur les rites sexuels que ces populations auraient pratiqué à tout va : il n’est pas dit que cela ne soit pas exagéré, mais si la fête est la célébration des semailles, on imagine que ça rentrait dans le thème de la fertilité…
Reconstitution de la porte d’Ishtar et la voie processionnelle de Babylone par Pierre Bardin (1936) (Source)
Et puis de nos jours, il suffit de compter neuf mois après le 31 décembre, et bizarrement on tombe aux alentours du 20-25 septembre… la période de grand pics de naissances ! Si t’es né•e un 23 septembre, il y a de grandes chances pour que tu sois un bébé champagne conçu dans la joie et l’allégresse. Alors imagine ces rigolos à Babylone…
L’Égypte
En Égypte antique, le jour de l’An est le premier jour du calendrier, qui correspond au premier jour du premier mois de la saison de l’inondation des cultures par le Nil. C’est une date importante car la crue du Nil est vitale pour les Égyptiens, qui en dépendent pour l’agriculture. Cette date est donc mobile, elle n’est pas fixée exactement, et elle donne lieu à de grandes fêtes religieuses.
On fait des offrandes aux défunts et aux dieux, dont Rê, car c’est son anniversaire de naissance. Des processions sont organisées, avec des vases remplis de « l’eau nouvelle » du Nil fertile. On célèbre les divinités et le pharaon fait zizir à ses copains (ses favoris), en leur offrant des cadeaux magnifiques afin de s’assurer leur fidélité et de bien montrer qui a la plus grosse bourse.
Ramses III fait des offrandes au Nil en crue, parce que cey la feyte. (Source).
La Perse
La Perse et Babylone sont en rapport étroit puisque cette dernière a été conquise par les Perses et intégrée au sein d’un immense empire multiculturel qui s’étendait de l’Indus à la Méditerranée, avec pour épicentre la Syrie.
La fête du Nouvel An, chez les Perses, c’est « Norouz » ou « le jour nouveau », célébré depuis… au moins 3000 ans. Norouz est une fête religieuse du Zoroastrisme (à ne pas confondre avec Zorro qui a une cape et une épée), une religion monothéiste dans laquelle le dieu Ahura Mazdâ est le seul créateur du ciel et de la Terre, après avoir ordonné le « chaos initial » (la Création, quoi).
Si tu prends une carte de l’Empire Perse à son apogée et que tu regardes les pays actuels, tu y trouveras ceux qui fêtent encore Norouz, même sans l’implication religieuse !
Représentation du dieu Ahura Mazdâ à Persépolis. (Source).
Aujourd’hui, cette fête est célébrée dans les pays qui ont été conquis et/ou très fortement influencés par l’Empire Perse, en Asie Mineure et au Moyen-Orient : on trouve bien sûr l’Iran (les Iraniens encore très attachés à leur culture descendant du Zoroastrisme et des Perses ; même sils ne pratiquent majoritairement plus cette religion ils ont gardé beaucoup de fêtes ancestrales toujours célébrées aujourd’hui), mais aussi l’Irak, l’Afghanistan, le Tadjikistan, l’Ouzbékistan, l’Azerbaïdjan, le Kazakhstan, et le Kyrgyzstan.
Norouz est aussi célébrée par les Parsis zoroastriens d’Inde et de Turquie. Les Parsis sont une communauté éclatée qui se concentre principalement dans la ville de Mumbai : ce sont les derniers pratiquants du zoroastrisme et cette population ne cesse de diminuer. Norouz a lieu le 21 mars (ou le 20 ou le 22, suivant le calendrier) — le jour du solstice.
Rome
En 46 av. J.-C., Jules César établit le calendrier julien. Le 1er janvier, jour des calendes, représente alors le jour du Nouvel An : c’est le solstice d’hiver romain, qui marque un passage à la nouvelle année et celui de l’obscurité à la lumière.
Pourtant, à l’origine, le Nouvel An était en mars, aux Ides (de mars), à l’occasion de l’équinoxe de printemps. On célébrait la déesse Anna Perenna (Année Pérenne).
Fêtes de Vénus selon les Fastes d’Ovide par Pierre-Paul Rubens (1637) (source).
Plusieurs théories s’affrontent à ce sujet, car si il est communément admis que c’est à l’initiative de Jules César que la date du Nouvel An est le premier janvier, d’autres historiens pensent que cette modification a eu lieu en 450 avant J.-C., lorsque le calendrier républicain a été adopté. Cependant, les Romains ne cessèrent jamais d’honorer Anna Perenna le 15 mars, et comme ils aimaient vachement faire la fête, ça ne dérangeait personne ! En témoigne ce texte d’Ovide qui décrit la joie et l’allégresse du jour de l’an dans l’antiquité :
« Le jour des Ides se célèbre la joyeuse fête d’Anna Perenna, non loin de tes rives, ô Tibre qui viens de l’étranger. Le peuple arrive et se répand parmi les herbes vertes ; et l’on boit, chacun s’étendant avec sa chacune. La fête se prolonge à ciel ouvert, quelques-uns dressent des tentes ; il en est qui font des cabanes de feuillage et de branches ; d’autres ont monté des roseaux rigides en guise de colonnes, ils déplient leurs toges et les étendent par dessus. Cependant, échauffés par le soleil et le vin, ils se souhaitent autant d’années que les coupes qu’ils écluseront, et ils les comptent en buvant. Tu trouveras là celui qui pourrait avaler les années de Nestor, celle que les coupes ingurgitées transformeraient en Sibylle. Là aussi, les gens chantent ce qu’ils ont appris dans les théâtres, et règlent sur leurs paroles les battements de leurs mains ; autour d’un cratère posé sur le sol, ils mènent des chœurs grossiers ; toute parée, une fille danse, les cheveux dénoués. Au retour, ils titubent, se donnant en spectacle à la foule, qui, en les croisant, les appelle « bienheureux ». Récemment, j’ai rencontré ce cortège : une vieille femme ivre traînait un vieillard ivre lui aussi. » (Ovide, Fastes, III – 523.)
Ça picole vachement, dites donc.
À Rome, le jour de l’an est dédié au dieu Janus (Janvier-Janus). Celui-ci est dit bicéphale car il avait deux faces (et non pas deux fesses hihi), l’une tournée vers l’avant, qui représente le futur, l’autre vers l’arrière, qui figure le passé. Il est associé parfois au chaos primitif, à la création : il est le dieu de tout acte qui commence, du passage d’un état à un autre, de la transition et du double (vie-mort ; est-ouest ; passé-futur). Cette phrase de G. Dumézil englobe tout à fait cette fonction de Janus :
« Tout passage suppose deux lieux, deux états, celui qu’on quitte, celui où l’on pénètre. »
Il est aussi dit « dieu des portes » ou « du seuil » : il préside à la fermeture et à l’ouverture de tout ce qui existe dans l’univers. Il est celui qui initie la paix ou la guerre et surveille les portes des cieux ainsi que l’ensemble de l’univers.
Concrètement, le nouvel an à Rome c’est l’ouverture des temples (normalement fermés), ainsi que l’échange de vœux de prospérité et de paix. On fait offrandes et sacrifices, des processions parcourent les rues, on se fait des cadeaux comme des dattes et du miel, puis une pièce de monnaie en bronze (les étrennes toussa toussa).
Point final de cet article : petite pensée émue pour la moi qui révisait ses partiels d’histoire sur l’Empire Perse, les cultes à Rome, et tous ces cours qui me passionnaient mais me faisaient souffrir… et qui me servent maintenant pour illuminer lanternes et cœurs du savoir historique ! Joie et connaissance au pays des licornes, bonsoir. Et bonne année !
Les sources
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Ailleurs sur le Web :
- Le Nouvel An à Rome
- Généralités sur le Nouvel An dont j’ai dû retracer les sources un peu aléatoires mais qui tombe en premier dans les recherches.
- Sur Babylone
- Zoroastrisme
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