Le 7 janvier 2022
« Ne me pesez pas à moins que cela soit réellement nécessaire d’un point de vue médical ».
C’est ce qu’on peut lire sur ces petites cartes créées par More-Love.org, une organisation américaine d’aide aux parents dont les enfants ont des difficultés avec leurs corps ou souffrent de troubles alimentaires.
Cet outil est un moyen de reprendre le contrôle lorsque l’on est soi-même en surpoids et que l’on consulte un médecin, comme l’explique sa créatrice Ginny Jones.
« Parce que nous vivons dans une société grossophobe, être pesée, parler de son poids entraîne un sentiment de stress et de honte pour beaucoup de personnes. Beaucoup de gens ressentent de l’anxiété en allant chez le docteur, et éviteront de consulter pour éviter la balance. »
À l’arrière de la carte, on peut lire ces quelques mots :
« Pourquoi ? Parce que :
La plupart des situations de santé peuvent être abordées sans savoir le poids.
Quand on se concentre sur mon poids, cela crée du stress (et ce n’est pas sain)
Me peser chaque fois que je viens pour un rendez-vous et parler de mon poids comme si c’était un problème perpétue de la honte autour du poids (un risque sanitaire connu et sérieux).
J’adopte des comportements sains peu importe mon statut pondéral. »
Une réponse à la grossophobie en milieu médical
Des témoignages de grossophobie en milieu médical, on en retrouve souvent sur les réseaux sociaux, de la part de patients et de patientes qui racontent comment des professionnels de santé ont mis leur poids au centre d’un disgnostic, alors que ce n’était pas l’objet de la consultation.
Dans un récent post sur son blog, Olga Volfson, journaliste et militant.e de la lutte anti-grossophobie, montre que la question du poids et de l’IMC – une mesure obsolète et limitée pour mesurer la bonne santé d’une personne – est encore centrale dans la perception de beaucoup de professionnels de santé.
L’outil proposé par More-Love.org lui parait intéressant :
« Je me suis déjà posé.e la question d’avoir un outil de ce genre-là en allant en consultation. Aujourd’hui, j’adopte une autre stratégie : sauf urgence absolue, je ne passe que par des listes de médecins safe, ou alors je lance un appel sur Twitter à mes adelphes [un mot signifiant “frères et sœurs”, ndlr] du gras. »
Les listes, le bouche-à-oreille, autant de moyens de trouver un médecin qui ne va pas faire une fixation sur le poids et qui ne va pas établir son diagnostic en fonction.
Malgré cela, Olga Volfson préfère jouer la sécurité et a une petite astuce pour jouer carte sur table :
« Je fais ceinture et bretelles : quand j’arrive et que le ou la médecin me demande “Pourquoi vous êtes là ?”, je réponds que je l’ai trouvé via une liste parce que je cherchais une personne non grossophobe. Je le dis dès le début de l’entretien, parfois ils sont contents, parfois ils peuvent être aussi un peu gênés. »
Une façon de leur couper l’herbe sous le pied. Néanmoins, malgré toutes les précautions possibles, il n’y a pas de garantie de ne pas tomber sur un ou une professionnelle de santé ayant des a priori grossophobes.
« Le risque, c’est que ça énerve le ou la soignante et qu’il ou elle soit encore moins sympa. C’est à double-tranchant. »
La lente et difficile remise en question du corps médical
Il reste difficile de contester l’autorité et la toute-puissance du médecin, déplore Olga Volfson : « Le monde médical tient à son pouvoir. »
Certains dans la profession appelle à une prise de conscience des soignants et des soignantes, afin de respecter l’intégrité physique et morale de tous les patients, comme le médecin et auteur Baptiste Beaulieu dans cette enquête signée France Info sur la grossophobie médicale :
« Il y a un problème de la part du corps médical à aborder ce sujet sans culpabiliser les patients, or notre intervention doit déboucher sur des bénéfices, pas des risques. »
Car à force de se focaliser sur le poids des patients et patientes grosses, ces derniers préfèrent parfois fuir les cabinets et retarder une consultation, au risque de mettre en péril leur santé.
Avoir une carte pour demander à son médecin de ne pas monter sur la balance, ou bien avoir avec soi un petit document comme le Petit Précis de Grossophobie conçu par l’association Gras Politique, cela peut être un moyen d’ouvrir au moins la conversation.
Il suffit parfois même de le laisser à l’entrée, ou bien dans la salle d’attente. « J’ai toujours une petite amertume » reconnait malgré tout Olga Volfson :
« En tant que personne grosse, on doit toujours bricoler des choses, mettre en place des stratégies. Ce qui nous aiderait vraiment, ce serait une vraie remise en question globale de la grossophobie dans le milieu médical. Là, c’est un pansement sur une plaie qui nécessite des points de suture. »
S’il permet d’aborder le sujet de la grossophobie, un outil seul ne pourra déconstruire toute une profession pétrie d’idées reçues et qui considère qu’un corps gros ne peut être un corps en bonne santé.
À lire aussi : « Sans libération des corps gros, il n’y aura pas de libération des corps tout court »
Crédit photo : More-love.org
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Les Commentaires
Les changements de poids rapides (dans un sens ou dans l'autre) c'est très souvent hormonal et/ou psychologique, c'est vraiment un truc à surveiller parce que ça peut-être des trucs graves, la santé mental c'est hyper important et niveau hormone ça peut être beaucoup de choses aussi qui nécessitent un vrai suivi.