La musique, c’est ta vie. Depuis tes premières Pampers, tu rêves de gloire et de chansonnettes, en regardant d’un oeil énamouré les rediffusions de « Popstars » ou de la « Star Academy ». Oui, la musique coule dans tes veines, et ton coeur bat au rythme des pulsations du dernier Matt Pokora.
Problème : tu aimes la musique, mais la musique ne t’aime pas.
Pourtant, tu as tout essayé. Le solfège à l’âge de six ans, avec une prof qui sentait tant la naphtaline qu’elle t’en faisait perdre tes croches. Le piano, un an plus tard, à la MJC de ton quartier. Manque de chance, en arrêtant au bout de deux mois, tu as déçu les rêves de ta môman qui te voyait déjà concertiste internationale. Puis tu as poussé la chansonnette, à la fête de Troucherasse-lès-Kévignons. Las, le succès n’était encore pas de mise. Vint enfin ce jour ensoleillé de septembre où, pour ton entrée en sixième, tu achetas une flûte à bec Maped à 3 euros et 99 centimes.
Peut-être n’apprécies-tu point le doux bruissement d’un peu glorieux « Au Clair de la Lune » soufflés par trente-cinq lamas asthmatiques
pré-ados. Peut-être même as-tu été traumatisée, durant tes années collège, par ce vibrant appel à l’auto-mutilation des tympans. Chère lectrice à l’oreille martyrisée, laisse-moi te présenter le Dixième Art de notre XXIème siècle décadent : la nasoflûte.
La nasoflûte est l’avenir de la musique. Pratique, légère, transportable, simple d’apprentissage, peu onéreuse, originale, elle réunit tant de qualités qu’il ne m’étonnerait pas qu’elle devienne la guitare du XXIème siècle. Imagine les choses en grand : dans un jardin public, un doux soir d’été, un petit groupe de jeunes se rassemble autour d’un arbre pour refaire le monde… et entre deux propos marxo-léninistes, l’un d’eux extirpe de sa barbe une nasoflûtette et entame l’air de Bonne nuit les petits. Grisant, n’est-il pas ?
Tu ne le sais pas encore, mais la nasoflûte va changer ta vie.
Prenons un exemple simple, qui pourrait arriver à n’importe qui, oui, même à toi. Tu t’appelles Céladon-Eglantin, et ta dulcinée, Eugénie-Philippine, souffre d’une maladie orpheline : l’exclusophlutophilie. Ce maux lui interdit d’écouter quelque autre son que celui de la flûte à bec. Que faire, donc, pour l’embrasser tout en lui sussurant à l’oreille des mots d’amour ? Se servir de ses quenottes pour le baiser et de ses naseaux pour la bande-son. Eh ouais.
Bon, comme le diraient ma grand-mère Alfrédette (qui existe vraiment, sisijvousjure), et une sympathique famille de chats, dans la vie, il faut apprendre ses gammes et ses arpèges pour jouer de ravissants accords : ceci vaut pour les déclinaisons latines, le kama-sutra, l’apprentissage du Papou ancien, entre autres savoirs très utiles à la vie en société. Rassure-toi, chère lectrice désireuse de représenter la nasoflûte sur le plateau d’Incroyables Talents 2013, cet apprentissage est simple, et rapide.
Premièrement, déloge ta flûte à bec de l’étui dans lequel elle reposait depuis les années 2000. Ôte l’épaisse couche de poussière ou la famille de termites qui s’y est installée, puis porte-là à tes narines. Puis souffle, avec toute la force de ton amour pour la musique. Au bout de quelques heures d’entraînement, et de remémoration des doigtés, tu devrais pouvoir jouer sans peine toutes les chansons de Lady Gaga. Et si la nature t’a doté d’un nez Cyranéen, bénie sois-tu entre toutes les femmes ! Tu pourras même t’essayer à la nasoflûte alto.
Voilà ! Tu es maintenant une nasoflûtiste de renom. Tu n’as plus qu’à poster tes oeuvres sur Youtube, et à animer de ton gai instrument toutes les grandes occasions de ce bas monde : G20, enterrement, fête villageoise aveyronnaise, accouchement de licorne au clair de lune, ou que sais-je encore.
(Et comme je vous aime vraiment très très fort, chers lecteurs/lectrices, voici la vidéo de mes dernières pérégrinations nasoflûtesques en date.)
http://www.youtube.com/watch?v=iexkOtLrS2c
PS : si le froid vous a terrassée et que les chutes du Niagara coulent de votre nez, il va sans dire que remettre cet apprentissage à plus tard est… conseillé.
Alors, heureuses ?
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Les Commentaires
Alfrédette, you rock!!