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Société

La « femme agressive », un cliché salement tenace

La « femme agressive » est souvent… une femme qui sait s’affirmer, s’écouter et prendre des décisions, tout simplement. Retour sur un mythe sexiste bien collant.

Lorsqu’une femme est sûre d’elle ou qu’elle exprime ses idées d’une façon directe, elle va souvent être jugée comme étant agressive, autoritaire ou condescendante. Cette tendance s’affiche beaucoup dans les médias, où les femmes qui réussissent sont dépeintes comme des personnes froides ou hautaines. Les femmes qui ont des postes à responsabilité, en plus de devoir apprendre à s’imposer dans un univers très souvent masculin, doivent en général faire attention à leur image afin de ne pas paraître « trop ceci » ou « pas assez cela »…

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Claire Underwood, femme de pouvoir parmi les puissants, joue parfaitement de son image selon les situations

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Pour ma part, j’ai souvent entendu qu’il était préférable pour une femme d’être moins drôle, moins ambitieuse ou encore moins extravertie que son compagnon. Mais au-delà des relations amoureuses, une femme qui impose ses idées avec force et vigueur, dans le cadre professionnel, sera souvent vue comme une quelqu’un qui ne maîtrise pas ses émotions. Facile, alors, de se retrouver confrontée à des situations où on hésite entre s’affirmer et rester effacée par peur de paraître trop autoritaire…

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La « femme agressive » dans le monde du travail

Dans une tribune écrite pour le New York Times, Sheryl Sandberg, directrice des opérations de Facebook, et Adam Grant, professeur à l’école des finances de l’université de Pennsylvanie, décrivaient la position parfois compliquée et délicate dans laquelle se retrouvaient les femmes dans leur milieu professionnel :

« Quand une femme parle, elle est sur la corde raide. Soit on ne l’entend presque pas, soit on la juge trop agressive. »

Cette article met le doigt sur la prise de parole des femmes, lors des réunions par exemple. Au travail, les femmes hésitent parfois à s’affirmer face à des hommes qui leur coupent souvent la parole ou terminent leurs phrases afin de se réapproprier leurs idées…

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Dans la sphère médiatique, on a souvent pu constater que lorsqu’une femme osait s’affirmer et n’avait pas honte de sa réussite, il ne fallait pas attendre longtemps avant de voir sa réputation se ternir.

L’actrice Mélanie Laurent, par exemple, jugée égocentrique et prétentieuse à cause de son franc-parler et du fait qu’elle parle sans tabou de ses réussites professionnelles, avait fait les frais d’un acharnement médiatique de plusieurs semaines… Ce « Mélanie Laurent bashing » avait donné naissance à des compilations de phrases de l’actrice en interview, dont la plupart était sorties de leur contexte initial.

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Même si les phrases n’avaient pas été sorties de leur contexte, Mélanie Laurent n’aurait-elle pas de quoi être fière de sa carrière ? Vit-on dans une société ou la fausse modestie est obligatoire ?

Dans un article pour Slate, Thomas Messias dénonçait le sexisme subie par les actrices :

« Placez les mêmes propos dans la bouche de Xavier Dolan, et la moitié de l’auditoire applaudira à tout rompre en louant l’ambition et l’hyperactivité du cinéaste québécois… L’ambition n’est pas réservée aux génies. »

Il rappelle également que Mélanie Laurent n’est pas la seule, ni la dernière, à se faire lyncher par le public à cause d’un comportement qui serait inadapté et d’une ambition jugée trop démesurée. Marion Cotillard, Anne Hathaway ou encore Anna Gunn (qui joue Skyler White dans Breaking Bad), ont elles aussi été les victimes de critiques sexistes de la part du public ou des médias.

Il n’y a pas que dans la sphère cinématographique que les femmes ambitieuses et volontaires sont considérées comme agressives. On se souvient du débat qui opposait Ségolène Royale à Nicolas Sarkozy pour les élections à la présidence de 2007…

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L’ex-président de la République demandait à son adversaire de « se calmer » lors de sa prise de parole. Cette méthode humiliante avait été utilisée par Nicolas Sarkozy pour déstabiliser et surtout décrédibiliser Ségolène Royale en la faisant passer pour une femme qui n’arrive pas à contrôler ses ardeurs en public.

La femme noire en colère

Pendant du stéréotype de la « femme agressive », l’angry black woman (la femme noire en colère) est un cliché véhiculant l’image d’une femme noire agressive ou très autoritaire. Il est très utilisé aux États-Unis où il est poussé à son paroxysme dans les télé-réalités, les films et les séries, prenant souvent la forme d’une femme venant d’un milieu populaire/défavorisé.

Il y a quelques mois, la réalisatrice et scénariste Shonda Rhimes avait été qualifiée de « femme noire en colère » dans un article écrit par la journaliste Alessandra Stanley pour le New York Times.

La journaliste avait déclaré que si la réalisatrice devait écrire une autobiographie, elle devrait s’intituler How to get away with being an angry black woman (Comment s’en sortir en étant une femme noire en colère), en référence à la série How to get away with murder dont elle est productrice. L’article insistait sur le fait que la créatrice des shows Grey’s Anatomy et Scandal n’écrivait que des personnages de « femmes noires en colère ».

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L’héroïne de la série How to get away with murder est une avocate renommée et professeure d’université intransigeante envers ses élèves. Le charisme, la réussite professionnelle et le fort tempérament de ce personnage féminin ambitieux et indépendant ont poussé la journaliste à faire le parallèle avec le stéréotype de la « femme noire en colère ». Même si le papier d’Alessandra Stanley se voulait positif et élogieux envers la carrière de Shonda Rhimes, la journaliste insistait sur le fait que la réalisatrice utilisait souvent des personnages de femmes noires au discours passionné et au tempérament explosif.

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Même s’il y a de plus en plus de rôles positifs montrant des femmes à la tête d’entreprises, ambitieuses ou déterminées, les clichés ramenant la gent féminine à la fragilité et à la docilité ont la vie dure au cinéma comme dans la vie réelle, et il n’est pas toujours facile d’en sortir.

Et vous, vous a-t-on déjà reproché votre agressivité « démesurée », dans la vie et/ou au travail ?


Et si le film que vous alliez voir ce soir était une bouse ? Chaque semaine, Kalindi Ramphul vous offre son avis sur LE film à voir (ou pas) dans l’émission Le seul avis qui compte.

Les Commentaires

27
Avatar de Shinigamylle
23 octobre 2015 à 01h10
Shinigamylle
@Tatsue : Pareil, je n'ai jamais aimé cette femme et ses idées, mais ce "débat" (qui était qu'un gros foutage de gueule sexiste et public) m'avait beaucoup choqué, c'était totalement ridicule et dégueulasse, carrément.
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Voir les 27 commentaires

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