Pour l’automne-hiver 2012-2013, Mulberry, la marque de prêt-à-porter anglaise qui fait saigner d’envie le nez des modeuses, se fait son cinéma au poil. Emma Hill tient les rênes, et c’est le mannequin Lindsay Wixson qui a le premier rôle devant l’objectif de Tim Walker, abonné aux chats multicolores et aux robes qui dansent dans les arbres. Ces deux-là se sont donné rendez-vous dans la forêt de Blackdeath dans le Surrey en Angleterre. Essayons de capter les couleurs de l’air du vent de cette ambiance qui assume totalement d’avoir tout plagié sur Max et les Maximonstres (Where The Wild Things Are).
1. Le décor
Bienvenue dans les bois, ambiance Pocahontas au Groenland, Blanche-Neige les jours d’euphorie, et Robin des Bois sans Robin. Au programme du paysage Mulberry : de la terre en friche, des arbres dénudés à perte de vue, et pas un seul signe de la civilisation immobilière. Nous pourrions donc nous trouver dans n’importe quel endroit du globe déserté par l’humain, y compris au pays du Seigneur des Anneaux, ce qui est terriblement rassurant lorsqu’on sait que ce monsieur laisse traîner des hobbits partout. L’atmosphère serait donc plus à la déprime automnale qu’au conte de fée, sauf si tu prêtes attention au soleil qui poudroie sur la bouillasse et baigne le tout d’une jolie lumière dorée, qui ne doit pas être suffisante pour réchauffer la température.
2. La bébête de droite
Attention, il ne s’agit pas ici d’une forêt enchantée version Barbie avec des papillons et des grenouilles qui se changent en boîte de fond de teint. Dans les bois de Tim Walker, il n’y a pas de loup ni de chaperon concon, mais des peluches encore plus grosses que les collectors de Disney store. J’en veux pour preuve la masse poilue et indéterminée qui se dissimule derrière un tronc d’arbre sur la droite de l’image. Oui, la « masse » parce que cette bébête dont l’ADN est croisé avec l’ours polaire et le yéti ne ressemble à rien de connu. Toujours est-il que la charmante créature se tient debout derrière un arbre qu’elle enlace, voire qu’elle embrasse. Comme le principe d’une affiche, c’est de couper le son, je ne peux pas te dire si la bête est en train de danser un slow sur du George Michael avec la nature ou pas.
Je suppose donc qu’il s’agit d’une tentative de se planquer du regard des passants, et notamment de Lindsay ici présente (dont nous allons reparler). La question est donc : s’agit-il d’un animal empaillé, d’un jeu de cache-cache, d’une tentative de bouffer toute crue l’humaine sans passer par la case barbecue, ou d’une timidité maladive de la part d’une brave bestiole ?
Les paris sont ouverts sur ce sujet, ainsi que sur la composition chimique de la moumoute.
3. La bébête de gauche
La grosse peluche de gauche ressemble fortement à son acolyte de droite, à deux exceptions près : son poil un peu plus albinos et semble-t-il plus soyeux, et sa position assise telle un ours en peluche désarticulé. Cette dernière nous permet d’admirer amplement la plante des pieds du monstre, mais toujours pas de voir ses yeux. La bébête a en effet la tête appuyée contre un arbre qu’elle tient dans ses bras. Eliminons l’hypothèse du cache-cache précédemment évoquée.
À moins d’avoir développé un amour fou et éconduit pour l’écorce du bouleau, tu peux en déduire que la bestiole est écolo et essaye de replanter un arbre dans le sol. Ou bien le monstre est tout simplement affligé par se qui se trame dans la forêt, et n’ayant pas trouvé de mur (je veux bien qu’on est dans un conte mais faut pas abuser non plus), il a décidé de se taper la tête contre un arbre jusqu’à ce que mort s’en suive.
4. La jeune fille blonde
Comme les deux boules de poils, la seule représentante de l’espèce humaine présente sur cette image semble éprouver un amour profond pour les arbres, et n’avoir pas du tout pigé les règles du cache-cache puisqu’elle se trouve devant le tronc, jambes grandes écartées, comme si elle tentait elle aussi de s’enraciner. Notons tout d’abord que Lindsay a pris soin d’enfiler sa tenue de camouflage forestier a.k.a la veste en fausse fourrure, attribut qui peut également signifier qu’elle aussi est une meuf sauvage qui n’a pas peur des méchants poilus. Lindsay porte également un sac imitation autruche et une jupe en plumes : quelqu’un a dû oublier de lui dire que le shooting n’aurait pas lieu dans une volière . À moins qu’il s’agisse d’un acte militant contre le gavage des oies.
Mais le plus remarquable dans cette image, c’est l’attitude de Lindsay. Petit rappel : la meuf est coincée dans une forêt au milieu de nulle part avec deux monstres à poils qui font trois fois sa taille dans le dos. Et que fait-elle ? Elle regarde le sol, main sur le front, cheveux au vent et duckface en avant. Première hypothèse : Lindsay s’est paumée dans les bois après sa séance shopping et cherche son chemin. Elle s’aperçoit avec stupeur que son GPS ne capte pas et ne fait absolument pas gaffe à ce qu’il se passe dans son dos. Lindsay a donc un sens de l’orientation pourri ET un problème de perception de son environnement.
Autre proposition : imaginons un instant que Lindsay parle aux animaux (elle n’est pas folle vous savez) et soit en réalité la bonne potesse des deux bébêtes. La nana s’appuie donc sur l’arbre pour compter jusqu’à dix pendant que les deux autres se planquent, ce qui est totalement improbable vu leur taille. Conclusion : Lindsay est bonne joueuse et/ou myope. Troisième supposition : Lindsay a vécu toute sa vie en ermite comme Mowgli en fabriquant des sacs Mulberry avec les dents. Elle vient de tomber nez à nez avec un ventilateur en plein milieu des bois, ce qui justifie son air surpris et le mouvement de sa masse capillaire.
Conclusion
Le message divulgué par cette pub me laisse perplexe : tu peux presque penser qu’il s’agit d’un truc animal-friendly du genre « allez viens mon p’tit ourson, je m’habille avec ta toison et on va courir dans les bois parce que je suis une femme libre ». Sauf que dans cette histoire, nous avons deux monstres qui se cachent et une nana un peu à l’ouest. Il est donc difficile de dire qui a peur de qui : les bébêtes sont-elles terrorisées à l’idée de se prendre la mèche rebelle de Lindsay ? Ou bien sont-elles de terribles monstres (fictifs ou non) qui tourmentent ses pensées ? C’est en tout cas cette hypothèse qu’a retenu le dirlo artistique Ronnie Cooke Newhouse, qui affirme que la pub joue sur « l’interprétation des rêves et des peurs ». Et Roonie conclue que tout ça est « très Mulberry » : « toujours iconique, ironique, et un peu méchant. » Voilà, c’était une chouette blague.
Et si tu es déjà rasée du soleil et des cocktails d’été et que tu préfères un look de gentil mammouth pour aller cocooner pépère, voilà de quoi te satisfaire :
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