Quand j’ai quitté Lille pour emménager à Paris, je ne me suis pas contentée d’emmener dans mes valises la recette du welsch, quelques Goudales, une photo souvenir des Merveilleux de chez Fred et un début de nostalgie pour le poulet rôti du marché de Wazemmes. J’ai également emporté quelques mots et expressions que mes nouveaux compères parisiens allaient utiliser pour se moquer de moi.
Mais quoi, Paris n’est pas la seule capitale de notre pays ! Par exemple, Lille est aussi la capitale des Flandres, et où que vous viviez, vous, lecteurs, je suis certaine que vous citerez sans problème des beautés de terroir et merveilles métropolitaines que Paris n’a pas. À commencer par… les mots.
Voici 5 objets qui prennent des dénominations différentes de part et d’autre de notre hexagone.
1. La viennoiserie constituée de pâte levée feuilletée, rectangulaire et enroulée sur deux barres de chocolat
À Toulouse, on l’appelle chocolatine, à Paris on lui préfère l’appellation plus simple de « pain au chocolat » pendant qu’à Lille, on n’hésite pas à dire « petit pain ».
Pour couper court au débat récurrent consistant à décider du meilleur de ces noms, vous pouvez mettre d’accord l’ensemble de vos interlocuteurs sur la certitude qui suit : cette viennoiserie devrait être inscrite au Panthéon des goûts intemporellement synonyme de « Paradis sur Terre ». Vous pourrez ensuite débattre du peu de confiance que l’on doit accorder aux gens qui détestent en manger (pour ensuite concéder que ceux qui apprécient le Nutella tartiné dans les croissants ne peuvent pas être foncièrement mauvais).
2. Le correcteur liquide
Du temps où j’utilisais encore du correcteur liquide (ne me demandez pas en quelle année, ça risquerait de tous nous faire réaliser qu’on a bien vieilli), certaines de mes copines s’en servaient comme vernis à ongles. Heureusement, depuis, du dissolvant a coulé sous les ponts du mauvais goût, et OPI a sorti ça. Le côté « couleur craquelée » est même devenu un idéal esthétique en matière de manucure. Ouf.
À Lille, on appelle ça « du blanco », mais à Paris, on dit « du Tipp-Exx ». Vous savez quoi ? Je préfère employer la première dénomination qui sonne « nom de général déchu » que la seconde qui fait un peu « médicament pour la gastro ».
– J’ai la diarrhée, je sais pas si c’est les raviolis de ce midi, mais dans le doute, passe moi la boîte de Thypaix. – En comprimés ou en suppo ?
Vous voyez ?
3. L’instrument d’écriture et de dessin
C’est amusant : même sur un des objets les plus basiques de nos anciennes trousses d’écolier, il y a divergence dans nos appellations régionales. Ainsi, dans le nord et l’ouest de la France, on peut dire « crayon gris » ou « crayon de bois », alors que dans l’est, on va préférer « crayon à papier » ou « crayon de mine ».
Un de mes cousins qui a grandi à Paris (aujourd’hui je l’adore mais à l’époque, qu’est-ce qu’il était con) avait utilisé cet argument dans une de nos disputes à La Bonne Paye : « de toute façon, tu peux pas avoir raison, déjà à Lille vous dites « crayon gris » mais ça veut rien dire, le crayon à papier il peut être peint en rouge ! Y’a que la mine qui est grise ! Et quand vous dites « crayon de bois », ben ça fait homme préhistorique ! »
Saleté de parigot en herbe.
4. L’assemblage de feuilles en matière plastique qui reste ouvert à une extrémité pour accueillir un contenu
Moi je dis un sachet. Mes potes du Sud disent « poche ». À Paris, j’ai appris à dire « sac plastique ». Et dans l’ouest du pays, on dit plutôt « pochon ».
La dénomination qui me fait le plus marrer reste « poche ». Quand j’entends « Est-ce que je peux avoir une poche, s’il-vous-plaît ? », j’imagine toujours la caissière sortir une poche de jean décousue : « Tenez ! Vous pourrez toujours y ranger le petit paquet de chewing-gum que vous venez d’acheter, pour vos boîtes de conserve et le kilo de tomates, démerdez vous ! »
Edit : en Franche-Comté et en Lorraine, on dit « cornet », en Bretagne on dit « pochon » et à Marseille, on parle de « nylon » tandis qu’en Roussillon on parle de « bourse ». Youpi !
5. Le morceau de toile grossière et résistante, de forme plus ou moins régulière et d’environ 50 cm de côté, servant à laver les sols à l’eau savonneuse
Bon, moi j’ai toujours dit serpillière, même quand j’ai grandi dans le Nord. Mais à bien y réfléchir, je me souviens bien de la rengaine de ma voisine « c’est toujours moi qui passe la wasssssingue, lô ! »
Apparemment, on peut aussi dire « la since » (dans le grand ouest) et la panosse (en Suisse romande).
« Wassingue » remporte de loin la meilleure dénomination. Peut-être parce que j’associe depuis quelques années ce nom à une danse. En effet, un copain m’avait raconté qu’un de ses amis dansait de façon tellement étrange (le haut du corps fixe, il n’y avait que ses jambes qui bougeaient) qu’il arrivait souvent à leur bande de potes de crier en boîte « hé regardez y’a Rémi qui passe la wassiiiingue ! »
Voilà. Si vous voulez d’autres anecdotes pourries, vous pouvez me contacter jour et nuit en appelant le standard de madmoiZelle et en prononçant distinctement les mots « histoires nulles ».
Et vous, connaissez-vous d’autres mots qui ne se disent pas partout ?
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C'est ainsi que débuta la troisième guerre mondiale.