Monumenta est un rendez-vous annuel permettant de mettre à l’honneur un artiste contemporain, dans la somptueuse verrière du Grand Palais. Au total : les 13 500 m² de la Nef du Grand Palais, qui culmine à 45 mètres de hauteur, se font l’hôte d’une oeuvre inédite et ouverte au grand public.
Après avoir reçu Anish Kapoor et son Léviathan en 2011, Monumenta accueille en ce moment et jusqu’au 21 juin, l’artiste français Daniel Buren.
Qui est Daniel Buren ?
Une oeuvre naît de l’espace dans lequel elle se situe : Daniel Buren, né à Boulogne-Billancourt en 1938, en est convaincu. C’est ce que l’artiste appelle « travailler in situ ».
Ses interventions in situ, Daniel Buren les présente comme un jeu sur les points de vue, les espaces, les couleurs, la lumière, le mouvement, l’environnement, la découpe ou la projection. Tour à tour décorative et transformant radicalement la perception qu’a le visiteur d’un lieu, l’oeuvre se vit autant qu’elle s’impose.
En 1986, Daniel Buren réalise sa commande publique la plus controversée, Les Deux Plateaux, pour la Cour d’honneur de Palais Royal à Paris. C’est également l’année où il représente la France à la Biennale de Venise et remporte le Lion d’Or.
En 2007, Daniel Buren a reçu le Praemium Impériale remis par l’Empereur du Japon, distinction considérée comme le prix Nobel pour les Arts Visuels.
Son oeuvre
« Ce bâtiment est l’un des lieux les plus difficiles qui soient pour y faire une exposition : par sa taille, par sa beauté, par son histoire. Ensuite, davantage encore que l’architecture, l’aspect vraiment frappant de ce lieu c’est l’atmosphère qui y règne, sa légèreté, cette impression que l’on ressent d’être dehors alors qu’on est dedans. » [Daniel Buren]
Très attaché à la couleur, l’artiste profite ici de la lumière naturelle qui émane très généreusement de la Nef pour jouer avec les nuances.
« J’utilise la couleur en ayant conscience qu’il s’agit d’un élément fondamental des arts visuels. C’est l’un des rares éléments que les artistes peuvent aborder et toucher et qui est d’une certaine façon de la pensée pure. C’est impossible de la transcrire ni en musique, ni en parole, ni en philosophie, en rien ! C’est brut ! »
Rouge, vert, bleu, orange : les couleurs choisies ont-elles été le fruit d’une longue réflexion ? Daniel Buren explique que son envie initiale a été de « colorer la lumière naturelle« :
« La meilleure solution était de tendre un film plastique, matériau léger, flexible et transparent, sur des châssis circulaires en acier, réalisés tout spécialement. Or, ce film n’existe qu’en quatre couleurs basiques qui sont un bleu, un jaune, un rouge orangé et un vert. J’utilise donc ces quatre couleurs sans avoir d’autre choix possible. Voilà donc mon matériau coloré de base, auquel viennent s’ajouter le blanc et le noir. »
Daniel Buren oppose au point de vue « monoculaire, univoque et dictatorial » des tableaux utilisant la perspective linéaire de la Renaissance, par exemple, une « perspective réelle« , mise en jeu à chaque instant par un spectateur actif.
« Il y a non plus un ou deux points de vue fixés d’avance, mais une multitude, sans hiérarchie et sans commandement, qui se répondent, interfèrent, s’induisent les uns les autres, s’enrichissent, se contredisent. Chaque point de vue a un sens propre qui ne réduit pas les autres à néant. »
Au fur et à mesure qu’on se balade dans l’installation, des voix (celle de Buren, qui lit des textes) s’échappent de hauts-parleurs disposés de part et d’autres de la Nef. Le son ajoute une autre dimension à l’oeuvre, ce qui n’est pas sans contredire le concept in situ
de Buren. L’oeuvre se vit donc avec les 5 sens, et le son présente l’avantage de pouvoir intriguer et attirer le visiteur vers un coin ou un autre, explique l’artiste.
Si vous connaissez un peu le travail de Buren, vous n’êtes pas sans savoir que le monsieur a une certaine fascination pour les bandes alternées (NDLR : attention, 3 liens se cachent dans la phrase précédente).
«? Ce dessin a deux avantages?: d’abord se montrer et ne pas être confondu avec un fond neutre?; et aussi pouvoir servir de guide à ce qui va s’inscrire sur la toile.? »
Véritable signature de son art (Buren les a souvent utilisé en peinture), ces bandes sont ici signifiées par les poteaux qui soutiennent l’oeuvre.
Enfin, au centre de la Nef, Daniel Buren a disposé une série de miroirs circulaires (sur lesquels les visiteurs sont invités à marcher), qui reflètent parfaitement le dôme du Grand Palais.
Mais au fait, pourquoi tant de cercles ?
« Le déclic se fit lorsque je m’aperçus, enfin, que toute cette architecture de fer et de verre était fondée sur le cercle et que tout le bâtiment était dessiné en utilisant un compas pour outil principal ! »
Pour terminer, je ne peux que vous inviter à vous rendre sur place, puisque, vous l’aurez compris, l’essence de la manifestation Monumenta veut que les oeuvres se vivent et se découvrent par les visiteurs eux-mêmes.
D’ailleurs, si vous souhaitez passer une fête de la musique originale, sachez que le 21 juin prochain, la We Love investit Monumenta pour une soirée au line-up ma foi assez formidable :
Comme l’an passé (Richie Hawtin avait joué devant le Léviathan d’Anish Kapoor), on risque fort de bien s’y amuser. Tentez de décrocher votre place par ici…
… et on se rejoindra sous un cercle vert, si vous le voulez bien. Il paraît que ça me va bien au teint.
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