J’ai de la chance, côté santé : la nature m’a dotée d’un système immunitaire à l’épreuve de la barre du métro et des ongles rongés. À vrai dire, je dois être en constant contact avec les microbes et parfois, j’avoue, je ne me lave pas les mains en sortant des toilettes. Pourtant, je suis encore là à te parler donc j’en déduis que je n’ai pas besoin de dépenser un quart de mon salaire en lotion hydro-alcoolique.
Mais le fait est que je suis tombée malade il y a environ un mois. Ça a commencé comme l’éternel combo amygdales bouffies et nez croûteux, sauf que ma gorge s’est rapidement transformée en snowpark : blanche comme neige et vallonnée comme une montagne.
D’une simple rhino-pharyngite, je suis passé au stade de l’angine blanche, noire, verte et tout un tas de couleurs indéfinissables jusqu’à ce que le verdict du médecin tombe : j’avais la mononucléose.
Alors oui, ça fait peur. C’est ce genre de mot qui jette un froid dans l’assemblée, un peu comme « lundi matin » ou « Maître Gims ». Pourtant, j’étais loin d’être à l’article de la mort, car si la mononucléose infectieuse est un nom de maladie qui fleure bon la chrysanthème, elle est généralement bénigne.
Aussi appelée la « maladie du baiser », la mononucléose est souvent transmise par la salive et appartient à la même famille que l’herpès. Elle peut se loger sur les mains, dans un verre ou sur une canette de Coca. Comme je n’ai l’habitude ni de lécher les murs, ni d’échanger mes flux buccaux avec des étrangers, le mystère reste entier.
Quelques semaines plus tard, je reprenais forme humaine… ou presque. Le problème, avec ce genre de maladie un peu nulle, c’est qu’elle se traduit par une très forte fatigue. Le genre de fatigue qui se colle à toi comme une moule à son rocher pour une décennie au moins. Et ça, crois-moi, c’est vachement plus chiant qu’une épine dans le pied.
La « mémérisation » en avance
Être fatiguée à longueur de journée n’est pas simple. Ce n’est pas assez embêtant pour t’empêcher de travailler, mais ça l’est assez pour que tu ne sois pas bien productive. À treize heures, tes paupières se font lourdes et tu sais que si tu te lances dans une sieste réparatrice, tu finiras encore plus défoncée. Tes jambes sont de foutues statues en plomb et tu rentres chez toi avec l’impression d’avoir passé ta journée à t’enfiler des shots de whisky.
Du coup, tu chéris le seul moment où tu peux vraiment te reposer : affalée sur ton canapé dans une reproduction quasi-parfaite de Jabba le Hutt. Ne pense même pas à sortir de chez toi après vingt heures, ton corps criera à la mutinerie. Tu peux tirer un trait sur toutes les sorties qui t’imposent de faire autre chose que rester dans ton coin en papillonnant des yeux. Eh oui : tu es une grand-mère de vingt ans. Prends-toi ça dans la tronche.
En ce moment, j’envie cruellement les gens qui arrivent à se coucher après minuit. C’est fou quand même : j’ai beau faire des nuits de neuf heures minimum, le matin j’ai l’impression d’avoir autant couru dans mes rêves que dans mon lit, et que le monde tourne deux fois plus vite que moi. Je n’ai toujours pas trouvé le temps de regarder le dernier épisode de Game Of Thrones
: c’est dire l’étendue de la tragédie.
Côté culbute, ce n’est pas mieux : la fatigue me donne une libido de limace et la prestance d’un pachyderme. Le soir, le comble du fantasme, c’est un massage de crâne. Ajoute à ça un lait-fraise sous les douces effluves d’un roll-on « nuit tranquille » sur mes tempes et je crois que je jouis.
Grosse ambiance.
Fatigue du corps, fatigue de l’esprit
Certes, être fatiguée c’est avoir l’impression de se traîner un double paresseux qui n’a pas du tout envie de mettre un pied devant l’autre, mais pas seulement. Si ton corps n’a plus assez de ressources, ton mental n’est pas vraiment plus vaillant.
Être flagada, c’est comme faire une sorte de revival de son soi de seize ans. Tu n’es pas si loin de cette époque où tu pouvais épuiser ton stock de larmes sur un morceau d’Alesana ou pendant la tragique mort d’Artax. Fatiguée, tu es à fleur de peau, et un rien peut te faire perdre les pédales. Tu as oublié de mettre un sucre dans ton thé ou de racheter du papier toilette ? C’est la fin du monde.
Quand tu es crevée, tu as beaucoup plus de mal a réfléchir. Ton attention se porte toujours sur des trucs sans intérêt et chaque mot arrivant à tes oreilles semble rebondir dans ton crâne comme une boule de bowling. Tu dois faire des efforts considérables pour te concentrer, si bien que ta tête, elle aussi, a besoin de lâcher un peu de lest.
« Chéri, j’suis rentrée ! »
J’ai remarqué que la télé-réalité était une aide recevable. Comme je n’ai pas la force de me jeter dans un replay de Des racines et des ailes, je préfère lâcher les vannes devant ces bonnes vieilles émissions génératrices de hashtags improbables. Le Bachelor, créateur de contenu délassant (et de #MartikaEnLarmes, aussi), je te salue.
Courage, ça va passer (il paraît)
Normalement, la fatigue n’est pas éternelle (même si j’ai l’impression que ce n’est pas demain que mon corps pourra de nouveau faire la roue dignement). Le problème, c’est qu’il est facile de se complaire dans un mode de vie mou et passif. Pas facile de se mettre un coup de pied aux fesses quand on a la sensation d’être une Clio au milieu d’un désert…
Pourtant, je n’ai pas l’impression que passer des semaines cloîtrée dans ma chambre soit franchement bénéfique. Souviens-toi des longues vacances d’été placées sous le signe de la flemme, où on est de plus en plus fatiguées à force de ne rien foutre… C’est un peu pareil.
Les vitamines ne font de mal à personne, mais il faut surtout apprendre à connaître ses limites. Rien ne sert de se tuer à une tâche qu’on sait irréalisable. Assumer le fait d’être sur les rotules ne devrait pas être si mal vu, car la fatigue, ce n’est pas seulement pour les feignasses en quête d’excuses faciles pour rester sous les draps. La fatigue, c’est une vraie crasse, crois-moi.
Je pense que je vais arrêter de me fouetter pour avoir envie de pioncer alors que la seconde partie du programme télé n’a pas encore débuté. Je ne vais pas non plus m’empêcher de dire « non » aux gentilles personnes qui me proposent de sortir boire un verre.
Et surtout, je ne m’en voudrai pas d’écouter mon corps. Parce que c’est comme ça qu’il marche, et comme ça qu’il a besoin d’être traité. Tant pis si je vois le clip de Pharrell deux heures après tout le monde, ma culture ne va pas se dissoudre entre-temps !
Sur ce je te laisse, mon mec m’emmène chez Nature & Découvertes et ses sièges massants, je ne voudrais pas louper ça.
Pour témoigner sur Madmoizelle, écrivez-nous à :
[email protected]
On a hâte de vous lire !
Ajoutez Madmoizelle à vos favoris sur Google News pour ne rater aucun de nos articles !
Les Commentaires