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Féminisme

Mon plan cul m’a parlé féminisme après le sexe et ça m’a fait regretter notre levrette

Cette Madmoizelle a déniché un homme qui physiquement et sexuellement correspondait à tous ses critères. Malheureusement, après l’amour, il a voulu parler féminisme…

Le 8 mars 2021

J’ai quitté mon ex il y a un an. Un déchirement pour lui comme pour moi, mais un déchirement nécessaire, car à presque 30 ans, il était grand temps que j’éprouve les joies du célibat.

Au départ plutôt larguée dans ma vie en solitaire, je trouvai les soirées longues et les nuits interminables. Et puis, comme tout le monde, j’ai pris le pli, je me suis habituée à mes libertés nouvelles, absolument impossibles à concevoir dans un couple monogame exclusif. Autrement dit : j’ai ken un max. 

Mes « conquêtes » n’ont pas toutes été à mon goût, elles n’ont pas non plus toutes rempli mes attentes, mais qu’à cela ne tienne, je me suis globalement éclatée. Sauf avec Jean-Christophe, dont les discussions m’ont filé un mal de crâne de tous les diables et ont donné du fil à retordre à mon sang-froid…

Ma rencontre avec Jean-Christophe

J’ai rencontré ce type comme j’en ai rencontré des dizaines d’autres : sur Tinder. Une appli sur laquelle il y a à boire et à manger mais grâce à laquelle j’ai toujours réussi à mettre quelqu’un dans mon lit rapidement.

Si on a le nez creux, Tinder peut s’avérer une mine d’or. Et jusqu’à ce soir de décembre 2020, je n’étais tombée que sur des mecs adorables, soucieux de bien faire, et surtout intelligents.

Ce dernier critère est en général déterminant pour que j’ai envie de passer la seconde avec un mec : une blague bien sentie, une passion pour un bouquin, ou la recommandation d’un film pointu opèrent sur moi comme des aphrodisiaques.

Mais il faut bien l’avouer, si j’ai commencé à discuter avec Jean-Christophe, ça n’était pas parce que sa description Tinder était brillante ou drôle, mais bien parce qu’il était incroyablement beau. Grand, très baraqué, la mâchoire ultra-dessinée, les yeux immenses, clairs et rieurs, il avait physiquement tout ce dont j’avais envie pour un moment au lit. Par ailleurs, sa description indiquait qu’il était acteur. Un métier intéressant et singulier, donc sexy ! À mes yeux en tout cas.

Nous avons matché, et entamé dans la minute une discussion — c’est lui qui a fait le premier pas, même si je ne rechigne jamais à le faire d’ordinaire.

« Je te trouve très belle et incandescente. J’espère que je suis à ton goût. »

Normalement, ce genre d’accroche premier degré, sans une miette de blague et basée sur mon seul physique, me refroidit sérieusement. Mais j’avoue que j’avais craqué pour le physique de Jean-Christophe et ai donc entamé avec lui une conversation dénuée d’humour (j’apprendrai très vite que JC en est de toute façon totalement privé).

Après quelques banalités sur les jobs de l’un et de l’autre, nous arrivons au sujet qui nous réunit : le sexe. Et c’est moi qui commence à en parler. Je lui lance des perches, lui dis que j’aimerais éprouver la force de ses bras dans l’intimité… joie : il est réceptif !

Je lui apprends que je suis soumise au lit, et cherche des hommes plutôt dominants. Il l’est, ça tombe bien — ça n’augure que du bon pour mes envies du moment, et les siennes sans doute. Nous convenons donc d’un rendez-vous le surlendemain.

Mes premiers ébats avec Jean-Christophe

Lorsqu’il sonne chez moi, je suis déjà excitée. J’ouvre la porte et bonne surprise : il est conforme en tous points à ses photos, si ce n’est qu’il est plus petit que dans mon imagination, mais ça n’a pas vraiment d’importance.

JC rentre les bras chargés d’un dessert venant d’une grande maison pâtissière que j’adore. Quant à moi, j’ai préparé des petits fours et ouvert une bonne bouteille de vin, qui respire dans une carafe. Tout est réuni pour que la soirée soit agréable.

À peine arrivé chez moi, JC me flatte :

« Tu es encore plus belle qu’en photo. »

Je sens ses yeux sur moi, lis son désir dans chacune de ses phrases, rêve ses fantasmes dans chacun de ses gestes. La tension sexuelle se cristallise immédiatement. C’est la première fois que je ressens une telle attraction depuis que je suis célibataire. 

Normalement, les mecs, une fois chez moi, se comportent de manière assez timide : il leur faut des heures de discussions avant de m’embrasser ou de me caresser la joue. C’est d’ailleurs souvent moi qui prends les choses en main. Je sais que ma personnalité peut effrayer, étant de nature un peu grande gueule et ayant un vocabulaire fleuri.

Mais JC n’a pas peur et pour la première fois, je me retrouve à califourchon sur un mec au bout de 10 minutes.

Nous avons parlé la veille de nos envies, et il a l’air d’avoir bien écouté : dans un murmure, il me soulève de terre, m’emmène dans la chambre, débarrasse d’un geste mon bureau et me prend dessus sans aucun préliminaire (à ma demande), les yeux dans les miens, sa main large autour de ma gorge. Il me détaille tout bas ce qu’il compte me faire cette nuit. Tout est puissant, précis, bestial sans être violent.

Nous nous lançons après dans des pratiques anales et dans des gestes plus extrêmes. JC est à l’écoute de la moindre demande, respecte tout changement d’avis. Pendant une heure, il réalise chacun des fantasmes que j’avais énoncés la veille. J’ose à peine y croire, tant il est l’amant dont j’avais rêvé !

Après ces premiers ébats, nous restons au lit. Je l’invite à rester toute la nuit, il accepte. Lui et moi avons envie de remettre ça, et potentiellement de ne pas fermer l’œil.

Et là, c’est le drame…

Alors que le sexe était brutal selon mes propres demandes, JC se révèle ensuite très doux. Il me prend dans ses bras, m’embrasse, me caresse. Plutôt agréable. D’autant que je n’ai aucun problème à passer des moments tendres avec des inconnus.

Et puis mon partenaire, dont j’avais pressenti la capacité à être ultra-bavard par téléphone et quelques minutes avant le sexe, me dit :

« Au fait, tu bosses pour une asso féministe. Mais est-ce que tu te considères comme VRAIMENT féministe ? »

Eh merde, ça y est. Parce qu’il a été se renseigner sur mon job, il va vouloir absolument aborder des sujets sociaux avec moi… Mais pour y être confrontée TOUTE LA JOURNÉE au taf, j’avoue qu’au lit j’ai envie de parler de tout sauf de mes idées ou celles de mes collègues.

— T’as vraiment envie de parler de ça ? — Oui, parce que je me considère comme très féministe mais je ne sais pas à quel point toi tu l’es. Et j’aimerais savoir ! Par exemple : que penses-tu des femmes voilées ?

Voilà, j’en étais sûre, il voulait s’infiltrer dans la brèche et forcer le débat. 

Je réponds quelques banalités, et essaie de changer de sujet. Je vais chercher une autre bouteille de vin, la ramène au lit et nous sers deux verres. Nous refaisons l’amour.

Mais il remet le couvert.

« Tu sais, j’adore les femmes. C’est pour ça que j’ai envie de les protéger. Et tu vois, tout à l’heure quand je suis arrivé, tu avais cette mini-robe décolletée et pas de soutien-gorge. Pour moi ça a été dur de me retenir de pas te sauter dessus et te prendre tout de suite. Mais tous les mecs sont pas comme moi tu sais. Donc j’aimerais pas qu’il t’arrive malheur. »

Wow. Wow. Wow. En une minute, il me sort l’un des arguments piliers de la culture du viol, et sous couvert de son prétendu féminisme en plus !

Je crois rêver et lui explique à quel point ses propos sont ceux d’un violeur en puissance. Il réfute, ne comprend pas, se vexe. Je me ressers du vin et m’interroge : ai-je envie de continuer le débat avec cet homme juste pour pouvoir refaire l’amour avec lui ? À quel point ma libido est-elle plus forte que mes convictions ?

Le féminisme et Jean-Christophe, une antithèse dans le texte

Je décide alors d’éduquer Jean-Christophe. Je lui explique ce qu’est la culture du viol, et à quel point la réflexion qu’il vient de faire joue dans le camp du patriarcat.

Il semble comprendre, opine du chef, réfléchit.

« Tu as peut-être raison. Tu sais, je suis philosophe, j’aimerais d’ailleurs écrire de la philosophie pour les enfants. Je vais donc réfléchir à ce que tu m’as dit et me remettre en question ».

Réaction surprenante, qui a l’avantage de me dérouter sérieusement.

Après tout, les hommes aussi sont les victimes d’une société patriarcale qui leur a mis dans la tête 1000 conneries, les poussant à être paternaliste, dangereux, et parfois les deux. Sa remise en question est une preuve de volonté de progresser, à mes yeux en tout cas ! Ainsi, je me détends, et nous refaisons l’amour.

Vers 3h du matin, je verse les reliquats du liquide épais de la bouteille de Chianti dans nos deux verres à pieds quand Jean-Christophe remet ses idées sur le tapis.

« Tu sais, il y a un truc que je comprends pas avec toute la vague #MeToo. »

Putaiiiiiiiiiin.

Il poursuit : « Les femmes violées viennent à la télé pour raconter ce qu’elles ont vécu. Parfois elles pleurent, parfois elles protestent dans la rue. » Je lui réponds : « Et donc ? » ; il marque une pause.

« Bah, en réalité, on peut décider de ne pas être traumatisé par une agression. C’est ça la force de la psyché humaine. Par exemple, moi, ça m’arrive dans mon métier de me prendre des mains au cul. Bon bah, je décide que si cet acte n’a aucun impact sur moi, c’est moi qui ai gagné. Les femmes peuvent très bien décider de ne pas être traumatisées par un viol. C’est comme ça qu’elles auront pris l’ascendant sur leur agresseur. Pas la peine de rentrer en guerre avec les hommes. Il suffit de bien le vivre. »

Dans mon lit, mon verre de vin désormais tiède entre mes paumes, je reste coite.

Un peu plus en colère (allez, beaucoup plus) que plus tôt dans la soirée, je lui explique que là encore, ses propos sont flippants, qu’ils sont non seulement, une nouvelle fois, symptomatiques de la culture du viol, et qu’en plus, il n’avait pas à « mecspliquer » la manière qu’ont les femmes de militer ou de vivre un traumatisme !

Jean-Christophe et moi : l’incompréhension

Il me répond que c’est simplement son avis, et qu’il est inutile de m’énerver. Que « c’est le problème avec le féminisme : tout le monde est un peu zinzin » — étonnant pour lui qui s’était vendu comme partisan de cette cause quelques heures auparavant !

Ulcérée, je poursuis (comme une idiote) cette conversation jusqu’à 6h du matin. Deux heures après, je dois bosser, et je suis en train de cramer les cartouches de ma matière grise vainement avec cet homme.

Après des heures d’une discussion (hallucinante) lors de laquelle nous ne tombons évidemment jamais d’accord, Jean-Christophe part travailler. Il a un tournage, et moi je dois aller au bureau.

Une fois la matinée entamée, je reçois un message :

« Je suis désolée si j’ai dit des conneries. Je suis maladroit mais je veux tester les limites de la réflexion parfois. En tout cas, j’ai beaucoup appris avec toi et vais remettre en question mes pensées. »

Bon au moins, le gars veut progresser. Ou en tout cas c’est ce qu’il prétend. Mais ça ne l’aidera pas à revenir dans mon lit, ça c’est certain…

J’ai pour ma part beaucoup réfléchi après cette nuit là. Qu’étais-je capable de supporter comme conneries potentiellement dangereuses pour m’envoyer en l’air avec un gars qui correspond à mes fantasmes ? Me faudra-t-il éduquer chaque homme aux idées archaïques qui croisent ma route, même le temps d’une soirée ?

Je n’ai pas encore de réponse à mes questions, mais une chose est sûre : je n’ai pas revu Jean-Christophe et n’ai plus répondu à ses messages. Désormais, j’ai un mec, que j’ai choisi déconstruit et brillant en plus d’être adorable et à l’écoute. Un mec qui embrasse les idées de son époque et ne me « mecsplique » jamais la vie.

Certes, il n’a pas la poigne de JC au lit, mais finalement, j’ai choisi mon camp.

À lire aussi : « Pékin Express » filme deux candidates de l’émission sous la douche et nous, on en a marre du male gaze

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Les Commentaires

7
Avatar de Nancy Drew
14 mars 2021 à 15h03
Nancy Drew
Cesse de geindre! hahahaha!
1
Voir les 7 commentaires

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