En partenariat avec Agora Films (notre Manifeste)
L’hiver de mes 7 ans, j’ai chopé une gastro carabinée.
J’ai bien sûr été autorisée à ne pas aller à l’école ce jour là, et ma mère m’a emmenée chez un médecin pour me faire ausculter et obtenir un arrêt scolaire.
Le plaisir féminin, un sujet tabou
Dans la salle d’attente du médecin, je m’en souviens très bien, il y avait une dizaine de chaises qui formaient un U autour d’une table en Formica recouverte de magazines de santé.
Collée contre le mur gauche, reposait également une desserte plutôt haute sur laquelle un grand bocal transparent trônait fièrement.
Ennuyée par la grosse demi-heure d’attente, je me rappelle m’être levée pour mettre le nez dans ce bocal, contenant des morceaux de plastique carrés et colorés.
Sur un petit post-it était écrit : « Préservatifs féminins. Servez-vous ! »
Je me suis alors retournée vers ma mère en brandissant un joli carré de plastique turquoise et j’ai demandé :
« Maman, c’est quoi un préservatif féminin ? »
Ma mère, rouge de honte, m’a demandé de venir m’asseoir et de me tenir tranquille. Je sus immédiatement, à son air gêné qu’il devait s’agir de quelque chose qui avait trait à la sexualité, car c’était le seul sujet qui la mettait dans l’embarras.
Une fois rentrées chez nous, elle m’expliqua en riant que c’était le genre de questions qui n’étaient que peu admises en société, puis elle me fit un cours sur le préservatif, au terme duquel c’est moi qui piquai un fard.
La sexualité et le plaisir des filles, je compris donc vite que c’était un tabou, quelque chose de gênant qu’on expédiait, sans vouloir aucunement s’y attarder, et surtout pas en société.
Ainsi, jeune, j’ai développé plein de tabous dans ce domaine précis, là où je n’en avais jamais eus ailleurs.
La gêne relative à notre plaisir et à notre sexualité féminines peut naître de toute part : de parents mal à l’aise, de profs évasifs, de camarades mal renseignés, de partenaires ignorants…
Heureusement, depuis quelques années, plusieurs créations audiovisuelles ont eu à cœur de fournir une meilleure éducation sexuelle aux ados mais aussi aux adultes mal informés.
Notamment l’excellente série Sex Education, qui se veut pédagogue et décomplexée, ainsi que Mon nom est clitoris, un documentaire absolument nécessaire, qui sort ce 22 juin.
Mon nom est clitoris, qu’est-ce que c’est ?
Mon nom est clitoris a été réalisé par Daphné Leblond et Lisa Billuart Monet, qui ont eu à cœur de faire s’exprimer des femmes sur l’exploration et la pluralité de leurs désirs.
Les deux jeunes femmes se sont rencontrées à l’école de cinéma, à Bruxelles et m’ont confié lors d’une Interview être devenues très amies lors de leur première année.
« On était toutes les deux féministes mais ça n’est pas ça qui nous a forcément liées au début et puis à un moment donné le sujet de la sexualité est venu sur le tapis, c’était pendant la visite d’un musée qu’on a faite toutes les deux. On a commencé à parler de ça et on était innarêtables. Ça s’est conclu par : on est en école de cinéma, on est deux, on a du matériel, et si on faisait un film ? »
Le docu donne alors la parole à une douzaine de jeunes meufs âgées de 20 à 25 ans qui racontent leur première rencontre avec l’excitation et la masturbation.
Ces jeunes femmes se confient dans leur chambre, antre de l’intimité, en travaillant sur leurs souvenirs personnels.
J’ai rapidement eu l’impression d’être moi aussi présente dans ces chambres, avec les intervenantes et les réalisatrices, et de partager pour de vrai ces jolies histoires, toutes différentes et similaires à la fois.
J’ai donc demandé à Lisa et Daphné comment elles avaient casté ces jeunes femmes.
« On a commencé par des amies, en se disant : personne ne va accepter ! Personne ne va vouloir témoigner. Après on a demandé à ces personnes si des amies à elles seraient partantes et on a été assez étonnées du fait qu’il y avait pas mal de filles motivées par l’idée que les générations suivantes ne vivent pas ce qu’elles ont vécu. Ensuite, on a fini par des annonces sur les réseaux-sociaux, mais on a fait de fil en aiguille. »
Mon nom est clitoris, un documentaire didactique
Il est toujours curieux de constater que même adulte, notre connaissance de la sexualité peut demeurer incomplète.
Aussi, le titre du documentaire se focalise sur le clitoris, un organe bien plus complexe qu’on ne le croit, et trop rarement abordé à l’école.
Nombreuses sont les femmes à ne pas connaitre cet organe dans son entièreté, le réduisant souvent à son simple gland.
Mon nom est clitoris tend donc également à supprimer tout mystère autour de ce sacro-saint organe du plaisir, qui mérite bien plus d’attention qu’on ne lui prête souvent lors d’un rapport sexuel (solitaire ou partagé), par méconnaissance de ses fonctionnalités et de sa puissance.
Mon nom est clitoris célèbre la sexualité féminine en inspectant plusieurs de ses aspects via des témoignages pluriels, et en prenant grand soin de déconstruire les tabous et les clichés qui l’entourent.
Ce film (qui a reçu le Magritte du meilleur documentaire) devrait être diffusé dans toutes les écoles.
D’ailleurs, j’ai demandé à Daphné et Lisa si ce projet allait être utilisé comme outil pédagogique.
« En Belgique, on était en contact avec un planning familial avec lequel on a écrit tout un dossier pédagogique qui sert de support à des animateurs dans des écoles. Le film est vraiment devenu un outil pédagogique grâce à ça, et ce dossier est accessible sur Internet. Pour nous c’était ça l’objectif du film, en faire quelque chose de pédagogique. »
Et c’est réussi !
Je te conseille alors vivement, douce lectrice, de lui consacrer un morceau de ton temps, dans les salle
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Les Commentaires
Ce film avait été l’entrée en matière d’un projet très intéressant fait avec ma classe qui s’appellait Jouir ouiouioui alors certes c’est un cas à part école d’art toussa toussa mais c’est aussi un beau début les artistes st svt précurseurs sur les questions qui fachent non? Et qui sait les ecoles catholiques si mettront peut etre un jour? 2040? Je suis trop optimiste ?