La Daronne est la reine des conseils pas si cons enrobés d’une louche d’humour plus ou moins subtil. La voici de retour pour voler au secours d’une lectrice !
La question de la semaine
Chère Daronne, mon mec et moi sommes en couple depuis 4 ans mais je n’ai jamais rencontré ses parents. Il les voit assez rarement et quand il leur rend visite, il y va seul. Je lui ai proposé de l’accompagner de nombreuses fois mais il trouve toujours des excuses pour esquiver. Quand je le confronte et lui demande quand je pourrai enfin les rencontrer, il me promet qu’il me les présentera bientôt mais j’attends encore. Il a honte de moi ou quoi ?
Maria
La réponse de la Daronne
Mon petit hachis parmentier végétarien,
Pour avoir moi-même assisté à des altercations d’une violence inouïe entre le Daron et mes aïeux, je ne peux pas te dire que je sois totalement opposé à l’idée d’une existence composée de petits compartiments parfaitement étanches.
Une belle-famille, c’est comme une boîte de chocolats, tu ne sais jamais sur quoi tu vas tomber. Tu espères que tu vas piocher le fourrage caramel au beurre salé éclats de noisettes, mais la vie est une chienne donc bien sûr, tu te coltines la liqueur à la fraise. À CHAQUE FOIS.
On peut très bien vivre une existence épanouie sans l’interférence d’un beau-père qui ne manquera jamais une occasion de nous rappeler que de son temps les femmes ne regardaient pas le football, ce qui leur permettait de gérer la cuisson des pizzas les soirs de match.
Le problème, ce n’est pas que tu doives vivre sans ces deux individus qui auraient forcément fini par te casser les pieds un jour, car ainsi va l’humanité, on sait toujours comment ça se finit quand on fréquente des gens trop longtemps. Le problème, c’est le message véhiculé par ce cloisonnement existentiel, que je trouve effectivement un peu étrange. Cela dit, comme le terme étrange définit l’intégralité des relations parents-enfants depuis la nuit des temps, il peut y avoir plein de raisons qui expliquent le fait que tu n’aies pas encore rencontré sa famille. En voici quelques-unes (mais pas toutes, je n’ai pas une semaine et 30 000 mots devant moi) :
Avoir honte d’où l’on vient
Le fait que ton homme ne te présente pas ses parents ne signifie pas forcément qu’il a honte de toi. Il peut très bien avoir honte de sa famille et par extension honte de lui. On les connaît les transfuges qui sont nés dans le fin fond du massif central et qui s’entraînent à gouailler parisien comme personne en jurant les grands dieux qu’ils sont nés dans le 11e arrondissement. Je me moque, mais je ne me moque pas. Les complexes sociaux et le poids d’un héritage souvent vécu par ses propres parents comme embarrassant peuvent vraiment gâcher une vie entière.
Sans compter que si ça se trouve, ses parents sont véritablement des individus affreux, xénophobes, misogynes et j’en passe. Même si tu serais prête à donner ta vie pour lui, le regarderais-tu encore de la même façon après avoir passé un week-end en compagnie de ces infâmes personnages ? Il n’en est pas certain. Et je le comprends.
Trahir ses parents
Dans le même ordre d’idées et parce que je me sens l’âme psychologue aujourd’hui, on peut explorer la piste d’un conflit de loyauté. Ce truc inconscient qui colle aux basques de beaucoup d’entre nous et qui a tendance à nous gâcher un tantinet le plaisir, dès lors qu’on s’écarte du schéma familial pré-établi.
Il arrive que la pomme de l’amuuuur fou tombe très loin de l’arbre familial, et on se demande ce que papa et maman vont penser. On n’assume pas trop. Et tout le monde en chie des ronds de chapeau. Les parents qui sont tenus à distance de la vie de leur enfant, l’enfant qui est écartelé, et le partenaire de l’ombre qui se demande quelle infirmité intellectuelle il peut bien présenter pour qu’on le cache de la sorte.
La famille traditionnelle et la future épouse
Et puis, il y a l’option qui fait le plus mal : ton mec est du genre traditionnel et le jour où il présentera une femme à ses parents, ce sera la femme qu’il épousera, la mère de ses enfants. Passons sur ce que cette définition comporte de problématique et concentrons-nous sur la douloureuse vérité : il est possible qu’il n’envisage pas de futur à avec toi malgré un investissement de façade.
Personnellement, je trouve cette dernière option assez affligeante et digne des plus grands goujats. J’espère donc que ce jeune homme a été clair sur ses intentions dès le départ et ne te laisse pas miroiter de futur heureux alors qu’il prévoit de se barrer à moyen terme.
Être fixée une bonne fois pour toute
Malheureusement, si je suis fine analyste, je ne suis pas devin et je ne sais pas laquelle de mes hypothèses correspond à ta situation, mais si tu veux mon conseil, arrête de lui demander quand tu rencontreras ses parents. Cette question est trop facile à éluder avec de vagues « la prochaine fois, promis », puis quand arrive enfin cette fameuse prochaine fois un hamster tombe malade, une amie se fait recaler au casting de The Voice, bref, tu comprends, c’est la crise et ce n’est vraiment pas le moment.
Si tu veux avoir une réponse claire, coince-le dans un coin et assène-lui : « Tant que tu ne m’auras pas dit POURQUOI je ne rencontre pas tes parents, je ne te laisse pas sortir de la buanderie » et le tour est joué. Enfin normalement. Et s’il sent que sa relation parentale est trop compliquée pour oser rajouter une variante partenaire au milieu, un vrai thérapeute –pas comme moi, donc – pourra l’aider à y voir plus clair.
Je te laisse, j’ai repas chez mes beaux-parents et j’échangerais bien ma place contre la tienne.
La bise,
Ta daronne
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Image en une © Andrik Langfield
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Les Commentaires
Elle l'a peut-être dit un peu maladroitement, mais son passage sur " l'estime de soi " de la part des femmes, je l'ai plus interprété dans le sens " beaucoup de femmes ne sont pas assez exigeantes dans leurs relations avec leurs copains, par manque d'estime d'elles-mêmes ". Et avec les notions de syndrome de l'infirmière, de charge mentale et j'en passe, je suis quand même assez d'accord.
Ce n'est pas le cas de toutes les femmes, heureusement, mais combien de femmes ont vécu des relations toxiques/décevantes parce qu'elles acceptaient trop de choses, parce qu'elles n'avaient pas assez confiance en elles pour s'affirmer/poser des limites ?
L'idée n'est évidemment pas de faire porter la responsabilité d'une relation toxique sur la victime. Plutôt de dire que, à cause des schémas patriarcaux, de l'éducation genrée, les femmes peuvent être prédisposées à être trop exigentes envers elles-mêmes, et pas assez envers leurs partenaires masculins.
Et dans ce sens-là, au final j'ai trouvé ça pertinent. La forme était peut-être un peu maladroite, mais le fond se tient.