Bien qu’émus par son engagement précoce sur la cause animale et pas peu fiers de sa volonté sans faille, vous voilà légèrement soucieux : un enfant en pleine croissance peut-il se passer de viande sans risque ? Devez-vous l’encourager dans sa démarche militante ou au contraire tenter de l’en dissuader ?
« Nous voyons de plus en plus de parents inquiets défiler dans le service » constate le Professeur Tounian, chef du service de nutrition pédiatrique de l’Hôpital Trousseau, qui fait un lien évident entre l’éco-anxiété qui explose chez les ados et l’augmentation du végétarisme. « Mais le rejet de la viande est également fréquent chez les plus petits, vers 6-7 ans, lorsqu’ils commencent à faire le lien entre le petit veau bien vivant dans la prairie et le morceau de steak dans son assiette » ajoute ce dernier.
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Si aucune étude chiffrée ne donne aujourd’hui de chiffres fiables sur le végétarisme chez les enfants français, un sondage réalisé aux États-Unis par le VRG chez 1 002 jeunes de 8 à 17 ans observe 5 % de végétariens et 2 % de végétaliens : ce qui est loin d’être anecdotique.
L’importance d’une alimentation équilibrée pour la croissance et le développement cérébral n’étant plus un secret pour personne, la question des carences et de leurs conséquences se pose forcément pour les plus jeunes. « Oui, les risques de carences existent, et nécessitent une certaine vigilance » confirme le chef de service… mais pas forcément là où nous les imaginons.
Aucun risque de carence en protéine
La peur numéro un des parents de jeunes végétariens est clairement la carence protéique. Ce nutriment constitué d’acides aminés essentiels est, dans le sens commun, directement associé à la croissance, puisqu’indispensable à la construction des tissus — qu’ils soient osseux, musculaires ou nerveux. Pourtant : « Il n’y a aucun risque de carence en protéines pour les enfants qui refusent la viande », certifie l’expert. Les besoins protéiques des humains sont relativement bas, et ils sont généralement largement dépassés dans les pays occidentaux.
« Entre les céréales, les légumineuses et les produits laitiers : les enfants végétariens couvrent facilement leurs besoins en protéines » rassure donc le Professeur Tounian.
Attention au fer !
Contrairement à ce que Popeye essaye de nous faire croire, le fer est l’apanage de la viande, et non pas des épinards ! Même s’il est présent dans de nombreux végétaux, ce minéral n’est jamais aussi bien absorbé par l’organisme que lorsqu’il est dit héminique, à savoir lié l’hème — donc au sang — donc aux animaux. « Le fer contenu dans les légumes est 8 fois moins bien absorbé que celui présent dans la viande » insiste le Pr Tounian.
« Si quelques enfants végétariens ont une tendance naturelle à sur-absorber le fer des végétaux pour pallier leurs besoins, la majorité d’entre eux finissent par être carencés » souligne notre expert. Les risques ? Troubles cognitifs, retard de croissance et de développement, capacités de concentration diminuées pouvant affecter les capacités d’apprentissage. Dans les cas les plus sévères, l’anémie ferriprive est par ailleurs responsable à plus ou moins court terme d’une altération du développement cérébral pouvant être irréversible chez les plus jeunes.
« De récentes études ont également fait le lien entre la carence en fer et certains troubles psychiques : dépression, TDAH, troubles du spectre autistique et anxiété… heureusement réversibles dès la réintroduction du fer » ajoute le Pr Tounian, qui recommande donc vivement une supplémentation en fer pour les jeunes végétariens.
En l’absence de poisson : vigilance sur les oméga 3
Deuxième risque de carence, chez les enfants et ado qui boudent non seulement la viande, mais aussi le poisson : l’acide docosahexaénoïque, ou DHA de son petit nom. Ces acides gras poly-insaturés à longue chaine qui appartiennent à la famille des oméga 3 sont très importants pour le fonctionnement cérébral. « Aucun examen n’existe pour identifier une carence en DHA qui se manifeste essentiellement par une diminution des performances cognitives. Une supplémentation chez les enfants et ado végétariens qui ne mangent pas de poisson est donc également recommandée » assure le spécialiste.
Quant aux enfants et adolescents végans, qui rejettent tout aliment d’origine animale, les risques de carences sont plus nombreux : des supplémentations en calcium, vitamines D et B12 sont alors nécessaires. « S’il n’est pas possible ni souhaitable de forcer un enfant ou un adolescent à manger de la viande contre son gré, il est en revanche important de lui rappeler pourquoi elle est importante tant qu’il n’a pas terminé sa croissance » insiste le chef de service.
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Les Commentaires
Végétalisme: une déviance alimentaire mortifère selon le Pr Tounian | Dur à Avaler
Ensuite il est connu pour avoir pondu des articles aux titres nauséabonds tels que "mode vegan: pourquoi faut-il épargner les enfants?" et "végétalisme: une déviance alimentaire mortifère" (rien que ça...).
Il semble maintenant s'essayer au politiquement correct.
Quelques précisions:
- faire attention au fer oui, c'est une carence très commune chez les enfants et les femmes, végé ou pas
- la supplémentation en B12 (les animaux d'élevages sont eux même supplémentés en B12), très conseillée, pour ne pas dire obligatoire, végé ou végan
- la supplémentation en calcium non: les besoins en calcium sont moindres si on ne consomme ni produits carnés ni produits laitiers et le calcium se retrouve simplement dans l'eau et les légumes, les céréales...
- vitamine D oui comme tout le monde
- DHA conseillé pour tout le monde sauf ceux qui mangent une grande quantité de poisson (ce qui est déconseillé de toute façon chez les bébés et les enfants, à cause des PCB et du mercure)