L’enfant développe très tôt un sens du style que je qualifierais de… très personnel et de difficile d’accès. J’ai répertorié pour vous ses 4 principales caractéristiques.
Le petit enfant se joue de la météo
Le vêtement a été créé pour entraver l’enfant et son rapport au monde. Du moins, si on en croit l’enfant en question. Bien sûr, elle ne formule pas la chose aussi clairement et l’échange se résume à un :
« – Met ton manteau ma puce chérie, il fait froid, tu vas ENCORE tomber malade…
–NAAAAAAAAAAAAAAAAANNNNNNNN.
– Je te préviens si tu ne mets pas ton manteau je … Je quoi ? Aucune idée. De toutes façons je n’ai pas le temps de finir ma phrase que le NAAAAAAANNNNNNN reprend de plus belle.
– J’ai pas froid, m’informe la mini-créature bleue qui claque des dents et qui décidément ne correspond pas à l’idée qu’on se fait de quelqu’un qui n’a pas froid. »
Comme j’ai déjà passé beaucoup trop d’heures de ma vie à patienter aux urgences en compagnie de ma mini-spécialiste ès bronchiolites, je ne plie pas.
6 heures plus tard, je suis enfin prête à quitter le domicile, accompagnée d’une enfant qui a consenti à enfiler deux manteaux l’un sur l’autre et des bottes dont on peut penser qu’elles composent la même paire à condition de ne pas les regarder de trop près.
Le petit enfant a des goûts chelous
Bien sûr, l’enfant préférerait passer sa vie à poil mais si j’insiste, elle accepte de porter des habits, tant que ceux-ci sont hideux et possiblement estampillés de personnages de dessins animés.
Je me sens très seule dans mon combat contre l’immondice vestimentaire. Les étals des magasins et mon thread Vinted pullulent d’articles qui me permettent de déduire que le designer de fringues pour enfants est au créateur de mode ce que le professeur de théâtre est à l’acteur hollywoodien : une personne qui aurait adoré réussir, mais qui n’avait pas suffisamment de talent pour ça (on rigole bien sûr).
L’attitude vestimentaire de mon enfant ne se contente pas de me crever les yeux, elle menace aussi ma réputation. Lorsque nous croisons un autre parent de la crèche dans la rue, je suis partagée entre l’envie d’enseigner à ma progéniture qu’il ne faut jamais se soucier du regard des autres et l’envie de hurler au monde entier : NON CE N’EST PAS MOI QUI AI CHOISI CE BONNET PAT PATROUILLE, C’EST ELLE QUI M’A FORCÉE.
Le petit enfant n’est pas très genderneutral
Au début, l’enfant est bébé et c’est très simple : je l’habille comme je veux et lui, il s’en fout. Parfois, une dame âgée me dit que ma petite fille est mignonne, car mon héritier porte la combinaison colorée de sa sœur au même âge. Comme rien ne ressemble plus à un bébé femelle qu’un bébé mâle et que je ne suis pas là pour refaire l’éducation d’une personne qui a 2,5 fois mon âge, je dis merci et je me barre fissa au cas où mon interlocutrice souhaiterait poursuivre la conversation.
Ensuite, l’enfant grandit, on ne peut plus reculer son entrée en collectivité éternellement et là, c’est le drame. En atteste ma fille qui n’avait pas foutu un demi-orteil sur le sol de la crèche qu’elle était déjà fan de rose et de robes de princesse. En soi, le rose ne me dérange pas. Ou plus précisément, j’adore le rose. Le problème, c’est que les robes pour petites filles ne sont absolument pas adaptées à la pratique intensive de roulades et de course tout terrain, aka le divertissement suprême quand on a 4 ans.
Le petit enfant est crasseux
Le vêtement pour enfant a une espérance de vie d’environ 10 minutes. Ce qui est environ 5 fois moins que le temps que je viens de passer à convaincre sa propriétaire de bien vouloir l’enfiler.
À peine habillée, mon engeance se rue dehors en hurlant. Aussi agile soit-elle, sa petite taille la rend particulièrement vulnérable aux aspérités de l’espace urbain. Une feuille morte glissante ou une poignée de graviers plus tard, je retrouve ma fille gisant dans une flaque d’eau noire. Je fais semblant de ne pas remarquer que la flaque funeste se trouve pile en face de notre porte d’entrée et qu’il serait encore possible de retourner se changer. À part perdre encore une éternité, cela ne change rien à notre futur proche : trempée ou bien au sec, nous sommes en novembre et ma fille tombera malade quoi qu’il arrive.
Quand je vois l’attrait de ma fille pour les choses qui tachent, je me dis que la vie est plutôt bien fichue. Si j’avais pu la vêtir de vêtements à mon goût je n’aurais pas résisté à l’envie de la tenir éloignée de tout ce qui ressemble de prêt ou de loin à un feutre ou à du chocolat, soit les deux choses qu’elle aime le plus au monde.
Je ne suis pas trop regardante sur les traces, il m’en faut beaucoup pour décréter qu’un habit mérite de se transformer en pyjama. Mais lorsque ça arrive, mon peu de considération pour l’habit en question rend la séparation beaucoup moins déchirante (vous l’avez ?).
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Image en une : Unsplash/NoorVasquez
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