Selon ton âge avancé ou pas, l’époque collège remonte plus ou moins mais misons sur le fait que tu t’en rappelles un minimum pour savoir faire preuve de recul. Il va te falloir un peu d’auto-dérision pour apprécier à sa juste valeur cet article. Car aujourd’hui je m’attaque à quelque chose de très important. Ce à quoi tu travaillais jour et nuit sans relâche : ton look.
Tu sais, celui que tu peaufinais pendant des heures dans ta chambre tout en implorant ton poster de Good Charlotte de t’octroyer gloire, popularité et une petite place sur le banc des gens cool.
Swaggity swag de gauche à droite.
De nos jours encore ton look est important, mais en ces temps immémoriaux, c’était quelque chose d’immanquable, sur lequel tu te prenais la tête pour y apporter un maximum de sophistication. C’était le moment de tenter de trouver ta place dans ce monde trop grand. Et pour ça il fallait t’intégrer à un groupe. Tu pouvais être un sosie pop-rock d’Avril Lavigne, une mini Joey Jordisson avec un peu plus de khôl, fredonner DJ de Diam’s en survêtement rose roudoudou ou nager dans un pantalon toile de tente avec du Tryo dans le casque.
Mais il y avait aussi les modes universelles. Celles que tu as forcément croisées, pas forcément adoptées mais au moins remarquées. Ce qui est sûr, par contre, c’est que si elles ont disparu, tu ne les as pas pleurées…
Les mi-bas résilles fluos
Je ne sais pas ce qui a poussé notre génération à atteindre un tel degré d’élégance — je suis née en 1992. Peut-être étions-nous tous dans une période où nos yeux n’avaient pas encore accumulé assez de bâtonnets pour voir les couleurs comme les adultes normaux, ou peut-être que les gens de mon collège passaient par une phase de daltonisme aigu. Je ne sais pas exactement ce qui se passait au creux de mon cerveau alors que j’avais environ treize ans. J’aimais d’un amour fou les mi-bas résilles.
Tu me diras que bien porté, c’est plutôt sympathique, ce n’est pas forcément vulgos sous une jolie jupe crayon qui tombe bien. Certes, mais sache qu’il ne s’agissait pas de simple résilles classiques comme on peut en voir dans les films vintage. Au collège je n’avais d’yeux que pour les résilles FLUOS.
Maintenant tu peux fêter les catherinettes sur tes jambes aussi !
Qu’elles soient roses, verte ou jaune (mieux) les résilles faisaient partie de la collégienne rebelle en vogue. Pas question néanmoins de les porter mi-cuisses comme des bas – bin oui c’était le collège quand même – mais de les laisser dépasser d’un pantalon retroussé à la mi-mollet. Le comble du chic étant de faire un ourlet à un seul côté du pantalon (pour le côté punk, sans doute).
Ce qui est fou, c’est que quand les trois-quarts de mon collège arborait des jarrets luminescents, au fond je trouvais ça moche. Comme quoi je n’étais pas totalement dénuée de lucidité. La mode avait tout de même raison de mon âme : je rêvais de voir mes jambes en Technicolor jours et nuits, tandis que mes profs cherchaient à se fournir en lunettes pour éclipses.
Malheureusement mes parents ne m’ont jamais laissé accéder à cette mode des plus délicates. Les malins fourbes. Farouchement opposés à cet étalage de ficelles de rosbif sous LSD, j’ai donc été astreinte à porter des chaussettes rayées pendant ces dures années de labeur à trimer sous le poids des cours de technologie.
Le porte-clés virus
Je me suis donc tournée vers son (tout petit) frère, le porte-clé virus. Mais si, souviens-toi ! Cette espèce de boule piquante-mais-molle que tu accrochais sur ta trousse ou sur ton sac. Elle prenait peu à peu la poussière du fond de ton casier. Pire : dans mon collège on avait l’habitude de balancer nos sacs à un endroit très précis au moment d’aller manger à la cantine. Une montagne d’Eastpack et autres Poivre Blanc formaient alors une immense montagne sous le préau. Imagine la tronche du porte-clé après.
Beauté inébranlable mais qualité discutable
Les chaussures écrase-crottes
À l’époque du collège il y avait deux types de filles : celles qui traînaient des pieds en baskets et celles qui portaient des talons ou des ballerines. Je me rappelle qu’à l’époque cette seconde catégorie me choquait. Elles me paraissaient beaucoup trop « femmes » pour leurs âges. J’avais à peu près la même vision que quand j’apercevais des gamines de cinq ans avec des escarpins en plastique avec la tronche d’une princesse Disney dessus.
Il m’a fallu attendre le lycée pour comprendre que les talons n’étaient pas réservés uniquement aux femmes mûres et autres MILF. Du coup, pendant mes folles années de collège, j’étais plutôt du genre décontractée du petit doigt de pied.
La mode pour chausser tes petons n’était pas aux jolies choses fines, censé souligner la courbe délicate de ta voûte plantaire. Ne pense même pas à de beaux souliers en cuir ou même à une paire de Converse négligemment lacées sur le haut. Le but, c’était de porter les chaussures les plus ÉNORMES de tous les ensembles scolaires de la France et de Navarre.
Avril Lavigne (encore elle) a apporté aux années 2000 son lot de chansons à chanter devant la glace avec une bombe de laque Elnett en guise de microphone. Elle a aussi abattu la vague du skate sur tous les collèges du monde avec le clip de Sk8ter Boy. Du coup, les grosses pompes destinées à la pratique de la planche qui roule sont devenues les « It-Shoes » à posséder obligatoirement sous peine d’être traité-e de minable opercule de yaourt périmé.
En 2014, tu rêves de glisser les deux mignons moignons qui terminent ton corps dans une paire de Giuseppe Zanotti, mais rappelle-toi, en classe de 4èmeB, c’est vers ces étranges spécimens que ton coeur penchait :
« Ohhh », « Ahhh».
Oui, vraiment. Si tu n’étais pas complètement en pâmoison devant ces merveilleuses créations, je suis sûre que tu leur trouvais quand même un minimum de charme – sauf quand tu en perdais une malencontreusement après un sprint improvisé. Et
même si on y puait sacrément des pieds, on était vachement bien dans ces mignons souliers.
Les antennes de scarabée sur le front
Quand je parle de mode, il ne s’agit pas uniquement de vêtements. Au collège, si tu voulais avoir un minimum de reconnaissance, il te fallait entrer dans un grand moule, de la pointe de tes cheveux jusqu’au poil qui pousse sur ton gros doigt de pied gauche.
La coiffure y était bien évidemment pour quelque chose. Tu ne pouvais pas arborer un look sans faille et arriver avec une coiffure hors du temps. Ce qu’il te fallait, c’était une mise en beauté digne de ton statut de collégienne en conflit avec le système – et ton prof de musique, qui te refilait toujours l’instrument à percussion le plus pourri. Ce dont tu avais besoin, c’était une chevelure unique.
Pour ça, pas besoin d’embaucher un capilliculteur, il te suffisait de suivre quelques simples étapes. D’ailleurs, je te propose de te remettre dans le bain Vivelle Dop avec un petit tuto très simple et rapide à réaliser :
– Prépare ta crinière à cet acte de barbarie en la mouillant un peu.
– Prends tous tes cheveux et tire-les en une queue de cheval basse la plus plate possible sur le dessus. Pour t’aider, tu peux dois appliquer environ quarante grosses noix de gel extra-fort, histoire de lisser le tout autour de ton crâne. Sus aux frisotis, les boucles sont réservées aux blèches et à la prof d’art plastique !
– Pour finir en beauté, ressors deux mèches juste au-dessus de ton front. Fais en sorte qu’elles soit assez grosses pour pouvoir les travailler comme il se doit, mais assez petites pour ressembler à deux antennes d’insectes dégueulasses.
– Termine la bouteille de gel sur les mèches en les lissant bien droites. L’idée étant qu’elles ne bougent pas du tout au rythme de ta tête.
– Si tu as bien suivit tu est sensé te retrouver avec une toison laquée semblable à un postiche après un gang bang. Après quelques heures de séchage, le gel peut devenir blanc et former de petites particules solides qui se délitent. Ne t’en fais pas, l’adolescence c’est l’âge des pellicules, cela ne t’empêchera pas de sembler fraîche comme l’alizé dans les branches d’un saule centenaire – ou un Brise Touch & Fresh.
Entre ça et la névrose du lisse à tout pris, Franck Provost dirait que ça chauffait grave pour tes cheveux.
Honnêtement c’est aussi une tendance WTF que je n’ai jamais réellement comprise mais que j’adoptais quand même, juste parce que les jolies troisièmes se baladaient avec des tronches de coléoptères.
« Vite, vite venez tous voir : y’a Chloé et Marina qui se fight ! Y’en a une qui a dit que Bill Kaulitz avait une tête à sucer des chibres. Ça va saigner. »
Les garçons, eux, se faisaient des pics et c’était très très beau.
Le sac à dos sur le fessier
Les adolescents sont des êtres particulièrement étranges. Ce sont des personnes à fleur de peau, dont tous les nerfs sont à vif. Ils souffrent de n’être encore personne dans la société. Du coup, ils cherchent à exprimer par tous les moyens possibles et visibles leurs abyssals maux.
Tu dois te rappeler de ce phénomène qui consistait à porter son sac à dos au maximum des lanières censées le faire tenir sur ta frêle ossature dorsale. Cette maudite position te forçait à courber l’échine dans le sens contraire de sa propre nature.
Naturellement, les profs t’obligeaient à porter tous les livres en ne se souciant que de leur matière. Du coup tu te retrouvais avec un sac qui pesait environ vingt kilos. Tu aurais dû chercher à te soulager le dos, en le portant bien haut sur tes épaules, ou mieux, disposer d’un sac à roulettes.
Sacrilège ! Ce genre de « valises » était totalement prohibé de la cour de l’école. Je me rappelle d’une de mes premières journées de 6ème, arborant un sac DDP bordeaux avec une paire de petites roues flambants neuves. J’étais la plus fière du monde jusqu’à ce qu’un garçon me soulève toute entière par la poignée en hurlant comme un chasseur qui brandit son gibier. De conquérante je suis passée à pauvre lapin apeurée, et j’ai acheté un sac de sport Nike.
C’est un trauma qui est resté gravé. Puis qui s’est peu à peu évaporé au fur et à mesure que mon sac descendait sur mon arrière-train. Tu te rappelles de ce quotidien où tu étais obligé de faire des noeuds au bout de tes lanières au risque que ton sac se décroche de lui-même et s’écrase comme un étron sur le bitume ? Moi aussi.
Ensuite ton sac devenait un moyen d’exprimer ta sensible créativité, un peu comme une extension de ton Skyblog et de ta trousse. Tu laissais tes amis signer des autographes dessus et tu y écrivais des phrases te dictant une conduite de vie des plus lyriques. Genre, un vers de Lamartine ou une rime de Rohff.
Le mien était dans la norme. Remarque le porte-clé virus et les noms des membres de Tokio Hotel au blanc correcteur. Du plus bel effet.
Au collège, il valait mieux être un pauvre petit être vouté et tordu que d’être en bonne santé
Les manchettes en mousses à damier (et les manchettes en mousse tout court d’ailleurs)
Ces manchettes sont idéales si tu fais du sport, histoire d’éponger ton front de toute sa sueur dans un mouvement gracile. Mais dans un collège, où le seul réel effort que tu fournissais à l’année était de tenter de faire deux pauvres pyramides dans un gymnase, tu n’en avais vraiment pas besoin.
Pas du tout.
Alors oui, le collège apportait son lot de modes WTF. Pourtant, cet article n’est qu’une minime évocation de tout ce qui faisait briller ta cour de récréation – et donnait aux professeurs l’envie de déserter en demandant le droit d’asile à la porte de la fac. Je n’ai pas cité les clous, les casquettes bérets, les superpositions de vêtements improbables ou encore les mini-tétines en résine qui s’entassaient sur tes clés de maison.
De la 6ème à la 3ème on était sacrément moches, mais on s’amusait bien quand même, non ?
Non ?
Écoutez Laisse-moi kiffer, le podcast de recommandations culturelles de Madmoizelle.
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