Avant que je ne commence le mannequinat, il m’arrivait de baver devant les pages de papier glacé des magazines. J’achetais Vogue, Stilettos, Vanity Fair et mon préféré, Cosmopolitan. Ce que je préférais : les éditos et la couverture.
Les séries mode me transcendaient. Je me demandais à quoi ressemblait le travail accompli en amont pour fournir des images de qualité si vivantes.
Et puis, il y a eu Grazia. Grazia
qui proposait des séries loufoques, incroyables, dans un magazine qui ne coûtait pas grand-chose.
Benjamin Kaufmann pour Grazia (2011)
À partir de ce moment-là, les éditos des magazines ont abandonné le « less is more » stylistique pour aborder un angle plus léché, plus « catwalk » et haute couture. On a vu fleurir sur papier glacé ces silhouettes extraterrestres, presque irréelles et, avouons-le, totalement importables au quotidien. Les filles choisies sont elles-mêmes dingues, leurs attitudes sont surprenantes et le stylisme est barge !
J’aimais énormément la simplicité des vieux éditos de Vogue : juste des draps blancs et une fille avec des bijoux. Ces images à la Kate Moss réalisées par Corinne Day en noir et blanc, ces clichés de backstages qui devenaient des éditos à eux seuls.
Maintenant, les séries ne permettent plus de s’identifier à un style. Toutes les tendances se mélangent et nous amènent au fameux « mix and match ». On associe des rayures à des fleurs, un body à pois avec des sneakers et un tutu, les objets et accessoires se détournent et tout est sujet à la créativité. Ces séries mode, pour moi, ressemblent encore plus qu’avant à des oeuvres d’art desquelles chacune tire sa propre perception et interprétation… mais s’éloignent de plus en plus de l’identification personnelle (vous vous y retrouvez, vous, dans ce type d’images ?).
Jeong Seung Hwan pour Shisegae Style Summer 2012 / Zolton Tombor pour Grazia Italy (2012)
Cela dit, quand j’interroge mon entourage sur la portée de ces images dans la société, je me rends bien compte que la mode et les rédacteurs en chefs perdent parfois de vue leur public. Ces photos sont incroyables et pourraient être liées dans un projet artistique, mais est-ce qu’on n’oublie pas trop souvent la cible essentielle : le lectorat pour qui on écrit un magazine ?
Par exemple, j’aime beaucoup Cosmopolitan car sa cible est jeune, et il y a toujours au moins un édito dans le magazine qui reste simple et naturel (autant que faire se peut dans la presse féminine, comprenez-moi bien) ; bien souvent, c’est de la lingerie. Ces photos sont plus classiques et peuvent parler davantage à la cible que des looks loufoques. Ce sont donc celles qui me touchent le plus en temps que fille, avant de toucher mon côté mannequin ?
Je suis de celles qui découpent les looks dans les magazines… enfin… je l’étais. Maintenant, j’arrache les pages quand la pose et l’attitude de la fille m’intriguent, et je m’en inspire pour mon travail. Même si je n’ai pas le profil d’une mannequin édito (chacune son job !), je n’arrête pas de bosser mes techniques et mes recherches pour proposer de nouvelles choses aux client-e-s.
Au final, je termine mon année avec des classeurs qui débordent de photos découpées que j’étale au sol. Un peu comme un bilan de l’année mode vue par les magazines. On se rend alors compte combien les styles ont évolués, même en un an !
En réalité, les magazines que je préfère conserver restent les vieux Vogue que je trouve en brocante et qui sont authentiques, avec ces inspirations simplistes où la femme est sublime au naturel, sans un stylisme outrancier.
Et vous, que pensez-vous de cette façon, plutôt récente, d’aborder les shootings mode dans la presse féminine ? Vous préférez rêver avec des silhouettes improbables ou piocher des idées dans des photos plus réalistes ?
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